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7ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (Lc 6, 17.20-26)

« Aimez vos ennemis ! »

 

Voilà l’un des passages des évangiles les plus difficiles à admettre pour la plupart des gens, et sans doute le plus difficile à mettre en pratique !

Jésus va tout à fait à l’opposé de la pratique humaine la plus répandue et la plus partagée par l’ensemble des humains.

Aimer un ennemi ! Aimer quelqu’un qui ne m’aime pas, qui me veut du mal ! Cela ne passe pas … ou du moins, cela passe mal …

Et pourtant, c’est dans la logique d’amour de Dieu pour les hommes, qui est au cœur du message de Jésus : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 13,34)..

Avant cela, c’était le règne de la loi du Talion connue par son résumé : « Œil pour œil, dent pour dent ».

C’était déjà un progrès, car cela limitait la réaction à l’action première, et évitait toute surenchère dans la vengeance, ou dans les décisions de justice.

Les propos de Jésus ne permettent même pas d’avoir une attitude indifférente vis-à-vis des actions de nos ennemis : « Il m’a fait ça … c’est son problème, moi, ça ne m’intéresse pas. ».

C’est une attitude de dédain … on se considère au-dessus de l’autre … et on est bien loin d’une attitude amicale …

Bien sûr, ce n’est pas haïr … ça ne met pas d’huile sur le feu … mais ce n’est pas aimer.

Des fois, on n’est même pas concerné par un quelconque différent, mais simplement suite à un reportage à la télévision, combien de fois n’entendons-nous pas à propos du responsable d’un homicide : « Après ce qu’il a fait, on devrait le tuer ! ». Bien sûr, c’est une parole en l’air ! On ne dit pas « je », mais on … Il n’empêche …

Et quand les tueurs du Père Hamel ont été tués par les forces de l’ordre, combien de fois avons-nous entendu : « Bien fait pour eux ! » …

Sommes-nous vraiment encore chrétiens quand nous nous exprimons ainsi ?

Pourtant il arrive parfois, même si on ne les aime pas, que nous ayons une forme de respect pour ceux qui nous veulent du mal.

Un exemple nous est donné dans la première lecture, quand David et Abishaï entrèrent de nuit dans la tente de Saül, pendant que tous dormaient. Quand Abishaï veut tuer Saül, David refuse : « Qui pourrait demeurer impuni après avoir porté la main sur celui qui a reçu l’onction du Seigneur ? ». Il ne le fait pas parce qu’il aime Saül, mais pas respect pour lui, et surtout pour le Seigneur qui lui avait fait donner l’onction pour devenir roi, par crainte d’être mal vu du Seigneur.

Dans la deuxième lecture, saint Paul parle des deux Adam : « Le premier homme, Adam, devint un être vivant ; le dernier Adam – le Christ – est devenu l’être spirituel qui donne la vie. Ce qui vient d’abord, ce n’est pas le spirituel, mais le physique ; ensuite seulement vient le spirituel. »

Et, dans la vie de chaque être humain, il doit en être de même. Actuellement, sommes-nous seulement dans le domaine physique, de la terre … ou déjà en partie dans le domaine spirituel, du ciel ? Quand passe-t-on d’un domaine à l’autre ?

Sans doute, pour la plupart d’entre nous, nous pensons que ce sera après notre mort … après le purgatoire ? Peut-être est-ce le futur utilisé par saint Paul qui y fait penser ?

Mais c’est être trop pessimiste et attentiste que d’attendre cela.

Parce que, quand Jésus parle, il n’utilise pas le présent de l’indicatif, mais l’impératif … c’est-à-dire que c’est une obligation : aimez vos ennemis, faites du bien, souhaitez du bien, priez, donnez, soyez miséricordieux, ne jugez pas,  ne condamnez pas, pardonnez,…

Et il n’y a pas lieu d’attendre, à cause de la comparaison avec les pécheurs ’’qui en font autant’’ … alors que nous, nous devons faire autrement …

Ce n’est pas pour demain, ou après, mais maintenant … « car la mesure dont vous vous servez pour les autres servira de mesure aussi pour vous. »

Comment faire pour suivre cet enseignement ?

Saint Paul nous dit : « comme le Christ est du ciel, ainsi les hommes seront du ciel. »

Il faut donc se configurer au Christ, comme l’a fait saint Paul : « Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi. » (Ga 2,20).

Et Jésus a vécu cet amour pour ses ennemis, et de manière la plus forte possible, quand sur la croix il s’écrit : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23,34).

Alors que faire maintenant ?

Relire ce passage d’évangile … le relire encore …

Le méditer …

Le relire souvent … pour qu’il rentre bien dans notre tête …

Tout est dit dedans …

Et faire ce que Jésus nous demande de faire …

Même si c’est difficile !

Mais avec la grâce de Dieu, tout est possible !

Seigneur Jésus,

Tu nous demandes

vraiment une chose difficile !

Aimer nos ennemis !

C’est au-dessus de nos moyens humains.

Toi seul peut nous permettre d’y arriver,

si nous nous laissons faire par toi.

Aide-nous !

                                                                                   Francis Cousin

Pour accéder à la prière illustrée, cliquer sur le lien suivant : Image dim ord C 7°




Redémarrage du Cycle Long à Saint Denis (02/22)

Ces samedi 12 février et Dimanche 13 février, les deux groupes Cycle Long de Saint Denis ont redémarré l’aventure après plus d’un an de suspension suite à l’épidémie de Covid 19. Joie de pouvoir se replonger dans la Parole de Dieu pour recevoir, avec elle et par elle, ce que Dieu seul peut donner : l’Esprit Saint dont la Plénitude accueillie constituera notre Trésor, notre Lumière et notre Bonheur pour l’éternité… Et St Jean Paul II, dans cette salle qui lui est dédiée, nous présentait dès l’entrée, le Christ, « Verbe fait chair » (Jn 1,14), « Lumière du monde » (Jn 8,12)…

Juste en face de lui, Géraldine et toute l’équipe accueillaient les participants :

Puis, après la prière du matin, Les Laudes, toute l’équipe de service s’est présentée :

Et le temps de travailler, sous la conduite de P. Joseph Lekundayo, bibliste, a commencé :

Puis vint l’heure du repas, notre traiteur sur St Denis, Didier Lacaille, apportant à tout le groupe ses bons petits plats, montés dans la salle par Yoland :

Tout devait être vraiment très bon, car plus personne par la suite n’a pensé à prendre d’autres photos…

Et le groupe St Denis Dimanche est venu prendre la relève, le lendemain matin. Là aussi, après la prière du matin, vint le temps de la présentation du P. Joseph Lekundayo, l’intervenant, et de l’équipe de service :

Il était temps maintenant de prendre le petit déjeuner récupéré très tôt le matin même dans une boulangerie de Saint Denis par Frédéric, responsable du groupe St Denis Dimanche, le tout ayant été présenté avec amour par toute l’équipe :

A gauche, P. Joseph Lekundayo

Frédéric et Jean Hugues

Puis, le travail commençait, Bible en main…

… et après avoir servi les participants, toute l’équipe pouvait prendre, elle aussi, un bon petit déjeuner…

Belle aventure à tous… « En toi », Seigneur, « ils espéraient, et n’étaient pas déçus » (Ps 21)…

 




6ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Père Rodolphe EMARD

Homélie du 6ème dimanche du Temps Ordinaire / Année C

Lectures de référence :

Jr 17, 5-8 ; Ps 1 ; 1 Co 15, 12. 16-20 ; Lc 6, 17. 20-26

Frères et sœurs, les quatre textes de ce sixième dimanche du Temps Ordinaire soulignent clairement que Dieu veut notre bonheur, que nous soyons heureux. Le terme « heureux » revient cinq fois dans les lectures : une fois dans le psaume et quatre fois dans l’Évangile.

Dieu nous appelle donc au bonheur et les lectures de ce dimanche nous donnent de précieuses pistes pour ne pas tomber dans les pièges des « faux bonheurs » du monde, éphémères et qui ne satisfont qu’un temps.

Le bonheur dont il est question n’est pas un bonheur à court terme, il est en vue du Royaume de Dieu, la gloire éternelle du Ciel.

 

►Dans la première lecture, l’oracle du prophète Jérémie nous met face à un choix : mettre sa foi dans un mortel ou mettre sa foi dans le Seigneur. Deux voies nous sont proposées avec des résultats différents :

  • L’homme « qui met sa foi dans un mortel » est « comme un buisson sur une terre désolée, il ne verra pas venir le bonheur ». Il a « pour demeure les lieux arides du désert, une terre salée, inhabitable ». Cet homme-là est « maudit ».

  • L’homme « qui met sa foi dans le Seigneur» est « comme un arbre, planté près des eaux, qui pousse, vers le courant… », un arbre verdoyant qui « ne manque pas de porter du fruit ». Cet homme-là est « béni ».

L’homme « qui met sa foi dans un mortel » : entendons par-là, l’homme qui met sa foi dans l’esprit du monde, sa foi en lui-même, ne comptant que sur ses propres forces. Ou encore cette foi de l’homme en ce qui concerne le savoir, le pouvoir et l’avoir, recherchés uniquement pour soi-même…

Certains de ces aspects peuvent nous concerner tous. La Parole de Dieu nous avertit aujourd’hui…

►Nous avons proclamé le Psaume 1. Notons que le premier mot du psautier (qui contient 150 psaumes) commence par le terme « heureux ». Nous avons une béatitude dans ce Psaume : « Heureux est l’homme qui (…) se plaît dans la loi du Seigneur et murmure sa loi jour et nuit ! »

Cela n’est pas sans nous rappeler que la loi du Seigneur nous est communiquée dans les saintes Écritures. Sans nous y référer, nous risquons de louper le chemin du bonheur. D’où l’importance que nous rappelons sans cesse de méditer la Parole de Dieu.

►Dans la deuxième lecture, Paul nous donne une belle catéchèse sur la résurrection, celle du Christ et celle des morts. Si nous nions la résurrection du Christ, notre foi « est sans valeur ». Paul proclame haut et fort que « le Christ est ressuscité d’entre les morts » et qu’il est le gage de notre propre résurrection à venir.

Voilà notre vrai bonheur ! L’espérance de la résurrection qui a commencé à notre baptême, telle est l’heureuse nouvelle que nous devons vivre et annoncer.

►Dans l’Évangile, nous avons le récit des Béatitudes de Luc. La version de Luc diffère de celle de Matthieu :

  • D’un point de vue géographique. Chez Luc, Jésus enseigne sur « un terrain plat » et chez Matthieu, Jésus enseigne sur la montagne.

  • D’un point de vue numérique. Chez Luc, il y a quatre Béatitudes alors que chez Matthieu, il y en a neuf.

Comme le prophète Jérémie, Jésus nous met également face à un choix. Ce choix est du même registre que celui de Jérémie :

  • Soit mettre sa foi dans la richesse, les plaisirs immédiats et l’arrogance.

  • Ou soit consentir à des situations -certes- moins valorisantes comme la pauvreté, pour laisser le Règne de Dieu grandir en nous. « Heureux » sont ceux qui choisissent cette voie !

Mais « malheur » à ceux qui mettront leur foi en ce monde : les riches, ceux qui sont repus, les rieurs, ceux qui se complaisent dans les compliments de façade. On pourrait aussi ajouter ceux qui sont portés par l’insouciance, par un « carpe diem » cherchant surtout à assouvir tous ses désirs de l’instant présent, la jouissance à outrance. Tout cela n’amènera pas au vrai bonheur sans fin !

S’il y a quatre Béatitudes, il y a aussi quatre mises en garde par ce terme « malheur ». Il ne faut pas se tromper de sens sur ce mot. Il ne s’agit pas d’une malédiction de Jésus mais d’une lamentation : Jésus déplore des attitudes… Il invite ainsi à la conversion…

Que cette Eucharistie nous éclaire frères et sœurs ! Qu’elle nous aide à faire la pleine vérité sur nos actes et nos paroles. Que nous puissions davantage prendre en compte que notre vrai bonheur se trouve dans le Christ, la résurrection et la Vie. Amen.




LE TÉMOIGNAGE DE BERNADETTE (Noéline Fournier)

            7 JANVIER 1844 : Bernadette naît à Lourdes : premier enfant du meunier François SOUBIROUS et de Louise CASTÉROT.

            Elle reçut le baptême, le 9 janvier, sous le nom de Bernarde-Marie.

            Bernadette SOUBIROUS était bien une des dernières auxquelles la sagesse humaine eût fait appel pour porter un message céleste.

            Tout ce qui donne du poids dans le monde (fût-ce le monde ecclésiastique) lui fait défaut. Elle est pauvre en tout : argent, santé, instruction.

           L’instruction religieuse même laisse à désirer : à quatorze ans, « elle ignore tout du Mystère de la Trinité » et n’a pas fait sa Première Communion.

            La misère l’a soustraite au catéchisme et immergée dans une ignorance qui la fait tenir pour sotte ; Nous savons en quel mépris la pauvreté avait fait tomber les SOUBIROUS : suspects à la police par l’excès même de leur détresse.

            Ceux qui rentraient chez eux avec l’argent refusé, rendu, jeté par Bernadette, avaient éprouvé, en actes, le choc du message évangélique sur la richesse et la pauvreté : ce message appelé à prendre pour chacun, selon sa condition, une forme personnelle en pleine vie (Lc 16 ,9).

Dès le 29 mars 1858, Antoinette TARDHIVAIL écrit :

            – « Ses parents sont très pauvres et cependant, ils ne prennent rien… Ils sont pauvres, aussi pauvres que l’était Notre Seigneur sur la terre, et c’est sur cet enfant que Marie a jeté les yeux préférablement à tant de jeunes personnes riches qui, dans ce moment, envient le sort de celle qu’elles auraient regardée avec mépris, et qui s’estiment heureuses de pouvoir l’embrasser ou lui toucher la main. »

8 DÉCEMBRE 1854 : PIE IX proclame le dogme de l’Immaculée Conception de la Vierge Marie.

 

11 FÉVRIER – 16 JUILLET 1858 : La Vierge Marie apparaît dix-huit fois à Bernadette.

            Principales apparitions : la première, le 11 février ; la 8ème, le 24 février : le triple appel à la pénitence ou à la conversion ; la 9ème, le 25 février : la source ; la 13ème, le 2 mars : la procession et la Chapelle ; la 16ème, le 25 mars : « Je suis l’Immaculée Conception ».

            Le 16 avril 1879, Bernadette – en religion Sœur Marie Bernard – mourait dans l’infirmerie, dite de Sainte-Croix, du Couvent Saint-Gildard à Nevers : elle avait trente cinq ans.

            La Sainte Vierge m’avait dit « qu’elle ne me promettait pas de me faire heureuse en ce monde, mais dans l’autre ». C’était le 18 février 1858, lors de la 3ème apparition. Oui, nous avons bien entendu : « Pas dans ce monde ». Promesse de la Vierge Marie.

            Bernadette avait toujours été une « enfant chétive. » Très jeune, elle souffrait déjà de l’estomac, puis, après avoir échappé de justesse à l’épidémie de choléra, de 1855, elle connut de douloureuses crises d’asthme. Cette mauvaise santé faillit lui fermer à tout jamais les portes de la vie religieuse.

            Bernadette vit au « cachot », le pauvre logis familial qui leur avait été prêté, trop insalubre pour les prisonniers, puis à l’hôpital tenu par les Sœurs de Nevers. C’est le temps du témoignage : visites, enquêtes se succèdent : Bernadette raconte fidèlement ce qu’elle a « vu et entendu ».

7 Juillet 1866 : Bernadette entre au Couvent Saint-Gildard, à Nevers : c’est la Maison-Mère et le Noviciat des Sœurs de la Charité et de l’Instruction Chrétienne.

            « Monseigneur, elle sera un pilier d’infirmerie », avait répondu Mère Générale Louise FERRAND à Monseigneur FORCADE qui lui proposait d’accueillir Bernadette parmi les sœurs de Nevers.

            29 Juillet : Bernadette reçoit l’habit des Sœurs : elle s’appellera désormais Sœur Marie-Bernard.

            Trois fois au moins dans sa courte existence, elle reçut « l’extrême onction », c’est-à-dire « le sacrement des malades ».

            Le vendredi 28 mars, on lui propose, une fois de plus, la quatrième au moins depuis 1858, l’onction des malades. Elle proteste, instruite par l’expérience :

            – « J’ai guéri toutes les fois que je l’ai reçue… »

            On passe sur ses réticences. L’aumônier arrive à deux heures et demie du soir :

            « Je lui administrai la sainte Communion en Viatique, et ensuite le sacrement de l’Onction. Après la petite allocution que je lui adressai avant la réception de Notre Seigneur Jésus-Christ, elle prit la parole devant un grand nombre de sœurs réunies et d’une voix forte et distincte, elle s’exprima à peu près en ces termes.

            – Ma chère Mère, je vous demande pardon de toutes les peines que je vous ai faites par mes infidélités dans la vie religieuse, et je demande aussi pardon à mes compagnes des mauvais exemples que je leur ai donnés… surtout par mon orgueil. »

Dans le parc du couvent de St Gildard :

Vierge devant laquelle Bernadette aimait venir prier…

Bernadette acceptait sans amertume les observations et reconnaissait ses défauts… y compris l’orgueil.

Selon Sœur Marthe, « la Supérieure générale, les maîtresses et même l’infirmière » lui disaient : « Vous n’êtes qu’une orgueilleuse. » Pourquoi ce reproche ? Cela tenait, semble-t-il, à une certaine existence, à une certaine assurance de Bernadette.

            Elle avait un sens inné du comportement adapté en toutes circonstances, et n’aimait pas changer arbitrairement sur une simple injonction, fût-ce d’une supérieure. Lorsqu’on dénonçait ce « défaut », elle se contentait de répondre avec beaucoup d’humilité et de simplicité : – « C’est bien vrai ». Elle disait encore :

–   « La maîtresse a raison ; j’ai beaucoup d’orgueil ». Parfois elle ajoutait :

– « Priez pour ma conversion ».

            Mais elle savait que « l’orgueil » ainsi compris habite le cœur de tout homme doué de quelque existence. De là cette parabole en actions :

            – Un jour, en récréation, comme on parlait d’amour-propre, Sœur Marie-Bernard (Bernadette) fit avec le pouce et l’index d’une de ses mains un cercle en disant :

            – «  Que celle qui n’en a pas mette ici son doigt. »

            Elle retrouvait ainsi, sans y songer sans doute, le test de Jésus devant la femme adultère, mais pour une faute plus subtile et plus cachée. L’humilité était chez elle pratique, laborieuse, volontaire. Elle disait à d’autres, et se disait à elle-même :

            – « Cet acte d’humilité, il faut le faire ».

            Pourtant, Bernadette n’accueillait pas l’humiliation de manière passive, comme un cadavre, mais bien comme une personne vivante qui sent et ressent, en deçà du ressentiment toutefois.

            Au témoignage de Sœur Marthe, lorsqu’elle recevait des reproches immérités, elle disait : « Le Bon Dieu voit mes intentions. Fiat !

            Et elle gardait la même sérénité d’âme.

            «  Je lui disais » : « Vous êtes bien heureuse, vous ne laissez rien paraître extérieurement. Vous êtes impassible ! Moi, je ne puis en faire autant. »

Elle se montrait aussi aimable qu’auparavant avec les personnes qui lui avaient fait de la peine. »

            Le secret de son humilité, c’est, en définitive, la vive conscience d’avoir tout reçu, sans esprit d’appropriation, et c’est la conviction d’avoir été un instrument, sans être rien par elle-même, devant l’amour qui la comblait.

            Cette humilité est le ressort de son obéissance.

            « Elle n’a jamais failli à cette vertu, » déclare Sœur Marie DELBREL.

            Ce n’était pas pour elle chose facile, car l’obéissance était alors conçue de manière absolue, stricte, minutieuse ; et Bernadette était douée d’une assurance et d’un entêtement exceptionnellement robuste. C’est en ce sens qu’elle assurait à Sœur CHATELAIN en 1872 : « Vous trouverez le bonheur dans l’obéissance »

            Et surtout, son obéissance est relativisée en profondeur par une référence à Dieu. C’est à lui, en fait, qu’elle obéit en toutes choses. C’est selon cette liberté spirituelle, qui fait prévaloir l’homme et Dieu sur le Sabbat que Bernadette a pu dire : « Le bonheur sur la terre, c’est l’obéissance. »

            A l’asthme, s’adjoignirent peu à peu d’autres maladies : tuberculose pulmonaire, tumeur blanche au genou droit, etc…

            Bernadette accepte la souffrance mais ne la cherche pas. Au plus intolérable de la douleur, elle recourait à la croix du Christ. C’est son point de référence, « le fond » de ses « pensées ». Submergée par la douleur, elle « baisait son crucifix ».

            Aussi disait-elle encore : « Je suis plus heureuse avec mon crucifix sur mon lit de souffrance, qu’une reine sur son trône ».

            Le mercredi 16 avril, ses douleurs redoublèrent d’intensité. Un peu avant onze heures, elle parut près d’étouffer. On la transporta dans un fauteuil, les pieds sur un appui, devant le foyer où pétillait un grand feu. Elle mourut vers 15 heures 15.

 

            Ce lot d’épreuves qui était le sien, Bernadette s’attachait à y voir un gage et une assurance : « La Sainte Vierge ne m’a pas menti. »

            Elle se référait à la parole du 18 février 1858, 3ème apparition :

   « Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en ce monde, mais dans l’autre ».

L’accomplissement des premiers mots garantissait celui des derniers qui constituaient la face positive de la Promesse, la face cachée.

            Ainsi confiait-elle à Sœur Marthe : « On dit qu’il y a des saints qui ne sont pas allés tout droit au ciel parce qu’ils ne l’avaient pas assez désiré. Pour moi, ce ne sera pas mon cas ».

            Elle tenait la promesse de la Vierge pour conditionnelle : « Il suffirait d’une pensée d’orgueil… » disait-elle encore.

            Au père PAYRARD qui lui rappelait l’assurance de bonheur donné par la Vierge à la grotte de Massabielle, elle répondit :

            – « Oui, mais à condition que je ferai ce qu’il faut… »

Basilique de Lourdes : l’Ascension

            Pour elle le Ciel, ce n’est pas une imagination lumineuse, une contemplation rutilante, c’est le fruit mystérieux d’une Promesse. C’est ce qu’elle disait à une sœur découragée :

« Ayez confiance, cela n’a qu’un temps.. ; vous en serez récompensée au ciel. » 

« Travaillons pour le ciel, tout le reste n’est rien », ou encore : « Faisons tout pour gagner le ciel ; offrons nos travaux, nos souffrances ».

Ainsi voyait-elle dans le noviciat « le ciel sur la terre » : formule qu’elle a souvent répétée oralement et par écrit. C’est pourquoi, bien qu’éprouvée au-delà de toute imagination, Bernadette est une Sainte Joyeuse.

Elle a su adhérer à tout ce qu’elle vivait comme à un don de Dieu. Elle a vu, dans la souffrance même « une caresse du divin époux », comme elle a dit un jour à sa cousine.

Elle a tenu pour « folie de se replier sur soi ».

Elle a su vivre cela dans un constant amour des autres en Jésus-Christ. Elle ne conçoit pas le Ciel en un sens individualiste, mais comme permanence et accomplissement de toute amitié : « Je n’oublierai personne, disait-elle. Et de même, dans sa lettre au Pape, en 1876, elle dira : « L’arme du sacrifice tombera mais celle de la prière me suivra au ciel où elle sera puissante. »

 

Sœur Thérèse de l’Enfant Jésus dira plus tard, avec plus d’art :

« Je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre ».

 

C’est au niveau de l’amour et de sa gratuité que Bernadette, condamnée à « l’inutilité », a su découvrir consciemment son emploi. Cela nous conduit au plus profond de sa vie, à ce qui explique le reste : la Charité (Rm 12, 9-10 ; Gal. 5,14).

            Entre la petite fille Bernadette choisie pour sa pauvreté et Celle dont le Seigneur avait regardé la pauvreté (Lc 1,48), c’est d’abord un contact silencieux, un contact dans la prière. Les actes ont le pas sur les paroles.

           Dès le début de la première apparition, Bernadette a tiré son chapelet, d’instinct. Elle a tenté de faire le signe de la croix. Ce geste avait en elle des racines.

La seule prière que Bernadette connaisse encore : le chapelet.

            Chaque soir, dans la pénombre du cahot où meurt la dernière braise, elle monte de leurs voix rudes et lassées ; elle monte du cœur aussi. Jamais ils n’ont songé à faire reproche au ciel de ce qui leur arrive, à eux « pauvres pécheurs ».

            Bernadette a reçu cela de source, dans sa famille.

            Le chapelet lui est déjà familier. Aux heures calmes, aux heures difficiles, elle répète volontiers ces phrases en français dont les mots lui échappent, mais qui lui suffisent à rejoindre une Présence.

 

L’Immaculée Conception – Seizième Apparition

 

Le dogme est proclamé le 25 Mars 1858, jour liturgiquement assorti au mystère.

Tout d’abord, elle manifeste le sens et la portée.

 Celle qui est venue choisir Bernadette, cette petite fille pauvre, c’est Celle qui a été choisie Elle-même pour sa « pauvreté » au plein sens de ce mot selon la grâce : la qualité des humbles en Dieu assumée : « Il a regardé la pauvreté de sa servante. » (Lc 1,48). « Il a renversé les puissants de leur trône, et élevé les pauvres » (1,52).

 

Celle qui est venue rappeler la pénitence, dans sa pleine dimension de conversion du cœur, c’est celle dont le cœur a été entièrement tourné vers Dieu, sans ombre de défaillance, depuis le premier instant, c’est aussi Celle qui, personnellement exempte de péché, a consenti à porter le fardeau de notre pénitence, depuis la crèche de Bethléem et surtout, au Golgotha où sa part fut la pire douleur qui pouvait être arrachée à un cœur de mère, une douleur en pleine Rédemption.

Ici encore, en effet, la réalité a devancé les paroles. Bernadette a d’abord appris à connaître la Vierge en la regardant, en regardant cette jeune fille sans ombre de vanité dans sa lumière, en reflétant son sourire – comme l’enfant qui apprend ainsi à connaître sa mère avant d’en connaître le nom – en imitant sa prière, en obéissant à ses ordres.

            A Bernadette, tout a été donné dans une Présence Lumineuse, humble, priante et si triste lorsqu’elle parlait des pécheurs !

Nous autres pécheurs, nous oscillons dangereusement entre dureté et complicité à l’égard des autres. Ou bien nous condamnons ceux qui font le mal avec un mépris pharisaïque, ou bien, si nous nous penchons pour les comprendre, nous perdons le sens du mal : nous n’excusons pas seulement le pécheur, mais le péché même.

            Qui aime vraiment un malade haït sa maladie et cherche tous les moyens de l’en guérir.

            Qui aime vraiment un pécheur haït pareillement son péché et n’a de cesse qu’il ne l’en tire.

            Non, ce n’est pas par le péché qu’on comprend les pécheurs, mais par l ‘amour et la miséricorde.

            Or, on trouve chez la Vierge Marie la plus haute conscience de la plus haute miséricorde de Dieu : la plus haute miséricorde, car Dieu ne l’a pas purifiée, mais préservée du péché, et comblée dès l’origine d’une plénitude de grâces ; la plus haute conscience de cette miséricorde, car sa pureté la rendait plus capable que nul autre de ce sentiment rare et difficile entre tous : la Reconnaissance.

            La vie de Bernadette se réfère en la Présence de l’Immaculée.

            Le décès de sa mère, en la fête de l’Immaculée Conception, avait pour elle un sens. Elle le dit plus tard à Sœur Casimir, en la consolant de la perte de son père :

            «  Moi aussi, j’ai perdu ma mère le 8 décembre. La sainte Vierge le voulait ainsi pour me montrer qu’elle remplacerait ma mère que j’avais perdue ».

            « On sentait son amour pour la sainte Vierge », rapporte une Sœur (1867) ; elle l’exprime parfois en mots simples et courants : « Mes enfants, aimez la Sainte Vierge », dit-elle aux orphelines de Varennes.

            Elle en parlait volontiers, rapporte Sœur Casimir ; elle exprimait surtout sa « grande confiance ».

            Le 14 juin 1925, Pie XI proclamait officiellement Bernadette « Bienheureuse ».

            En ces jours d’août 1925, commençait le long pèlerinage des amis de Sainte Bernadette.

            Et c’est ce que le Père RAVIER  a écrit :

            « Oui, c’est bien le corps de Bernadette,

            dans l’attitude de recueillement et de prière qu’il a prise dans son premier cercueil.

C’est ce visage qui s’est tendu dix-huit fois vers la « Dame de Massabielle ».

Ce sont ces mains qui égrenaient le chapelet avant et pendant les Apparitions.

Ces doigts qui ont gratté le sol et fait jaillir la source miraculeuse.

Ce sont ces oreilles qui ont entendu le message ;

Ces lèvres qui ont redit au Curé PEYRAMALE le nom de la Dame :

« JE SUIS L’IMMACULÉE CONCEPTION ».

            C’est aussi son cœur qui a tant aimé Jésus-Christ et la Vierge Marie

                       et les pécheurs. »

Du petit corps si frêle, elle qui semble absorbée en Dieu, jaillit une voix silencieuse qui nous atteint au plus intime de nous-mêmes.

Bernadette est présente.

Bernadette prie avec nous.

Osons le dire : Bernadette est, en quelque sorte vivante.

Bernadette continue chaque jour, auprès de chaque pèlerin, la mission que lui avait confiée, au nom de Dieu, « l’Immaculée Conception » :

Elle nous redit que Dieu est Amour

            et qu’il ne cesse de nous appeler à passer de la nuit de notre péché

                       à son admirable Lumière.

            Notre Dame de Lourdes, priez pour nous et pour notre conversion !

            Sainte Bernadette, priez pour nous, pécheurs !

            Sainte Bernadette ; priez pour les malades !

                       Fête de Notre Dame de Lourdes – Père René LAURENTIN

                                 Noéline FOURNIER.

 




Audience Générale du Mercredi 9 février 2022

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 9 février 2022


Catéchèse sur saint Joseph – 11. Saint Joseph, patron de la bonne mort

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans la dernière catéchèse, stimulée une fois encore par la figure de Saint Joseph, nous avons réfléchi sur le sens de la communion des saints. Et c’est précisément à partir de là que je voudrais aujourd’hui approfondir la dévotion particulière que le peuple chrétien a toujours eu pour Saint Joseph, comme patron de la bonne mort. Une dévotion née de la pensée que Joseph soit mort avec l’assistance de la Vierge Marie et de Jésus, avant que ceux-ci ne quittent la maison de Nazareth. Il n’y a pas de données historiques, mais [sic] comme on ne voit plus Joseph dans la vie publique, on pense qu’il est mort là, à Nazareth, dans sa famille. Et pour l’accompagner dans la mort, Jésus et Marie étaient là.

Le pape Benoît XV, il y a un siècle, écrivait que « par Joseph, nous allons directement à Marie, et par Marie à l’origine de toute sainteté, qui est Jésus ». Aussi bien Joseph que Marie nous aident à aller à Jésus. Et encourageant les pratiques pieuses en l’honneur de saint Joseph, il en recommande une en particulier, et disait ceci : « Puisqu’il est considéré à juste titre comme le protecteur le plus efficace des mourants, ayant expiré avec l’assistance de Jésus et de Marie, il sera du ressort des saints pasteurs d’inculquer et de favoriser […] les pieuses associations qui ont été instituées pour implorer Joseph en faveur des mourants, comme celles « de la Bonne Mort », du « Transit de Saint Joseph » et « pour les Agonisants » ». (Motu proprio Bonum sane, 25 juillet 1920) : c’étaient les associations de l’époque.

Chers frères et sœurs, peut-être certains pensent-ils que ce langage et ce thème ne sont qu’un héritage du passé, mais en réalité notre relation avec la mort ne concerne jamais le passé, mais c’est toujours le présent. Le pape Benoît disait il a quelques jours, en parlant de lui-même, qu’il « se tient devant la porte obscure de la mort ». C’est bien de remercier le Pape qui a cette lucidité, à 95 ans, pour nous dire ceci : « Je suis devant l’obscurité de la mort, la porte obscure de la mort ». Un bon conseil qu’il nous a donné, n’est-ce pas ? La soi-disant culture « du bien-être  » tente d’évacuer la réalité de la mort, mais de manière spectaculaire la pandémie de coronavirus l’a remise en évidence. Cela a été terrible : la mort était partout, et tant de frères et de sœurs ont perdu des êtres chers sans pouvoir être près d’eux, ce qui a rendu la mort encore plus difficile à accepter et à traiter. Une infirmière me racontait qu’elle se trouvait devant une grand-mère en train de mourir de Covid, et qu’elle lui a dit : « Je voudrais dire au revoir aux miens avant de m’en aller ». Et l’infirmière, assez courageuse, a sorti son téléphone portable et l’a connectée avec les siens. La tendresse de cet adieu…

Malgré cela, l’on cherche par tous les moyens d’écarter la pensée de notre finitude, s’illusionnant ainsi d’ôter à la mort son pouvoir et chasser la peur. Mais la foi chrétienne n’est pas une façon d’exorciser la peur de la mort, elle nous aide plutôt à l’affronter. Tôt ou tard, tous nous passerons par cette porte…

La vraie lumière qui éclaire le mystère de la mort vient de la résurrection du Christ. Voici la lumière. Et saint Paul écrit : « Nous proclamons que le Christ est ressuscité d’entre les morts ; alors, comment certains d’entre vous peuvent-ils affirmer qu’il n’y a pas de résurrection des morts ? S’il n’y a pas de résurrection des morts, le Christ non plus n’est pas ressuscité. Et si le Christ n’est pas ressuscité, notre proclamation est sans contenu, votre foi aussi est sans contenu » (1 Co 15, 12-14). C’est une certitude : Christ est ressuscité, Christ est ressuscité, le Christ est vivant parmi nous. Et c’est la lumière qui nous attend derrière cette porte obscure de la mort.

Chers frères et sœurs, ce n’est que par la foi en la résurrection que nous pouvons regarder l’abîme de la mort sans être submergés par la peur. Non seulement cela, mais nous pouvons redonner un rôle positif à la mort. En effet, la réflexion sur la mort, éclairée par le mystère du Christ, nous aide à regarder d’un œil nouveau toute la vie. Je n’ai jamais vu un camion de déménagement derrière un corbillard ! Derrière un corbillard : jamais vu. Nous irons seuls, sans rien dans les poches du linceul : rien. Parce que le linceul n’a pas de poches. Cette solitude de la mort : c’est vrai, je n’ai jamais vu un camion de déménagement derrière un corbillard.  Il ne sert à rien d’accumuler si un jour nous mourrons. Ce que nous devons accumuler, c’est la charité, la capacité de partager, la capacité de ne pas rester indifférent aux besoins des autres. Ou encore, à quoi bon se disputer avec un frère, ou avec une sœur, un ami, un membre de la famille ou un frère ou une sœur dans la foi si ensuite un jour nous mourrons ? Quel est l’intérêt de se mettre en colère, de se mettre en colère contre les autres ? Face à la mort, tant de questions sont redimensionnées. C’est bon de mourir réconcilié, sans rancune et sans regret ! Je voudrais dire une vérité : tous nous cheminons vers cette porte, tous.

L’Évangile nous dit que la mort arrive comme un voleur, comme le dit Jésus : elle arrive comme un voleur, et même si nous essayons de maîtriser son arrivée, peut-être en planifiant notre propre mort, elle reste un événement avec lequel nous devons compter et devant lequel nous devons aussi faire des choix.

Deux considérations s’imposent à nous, chrétiens. La première est que nous ne pouvons pas éviter la mort, et c’est précisément pour cette raison que, après avoir fait tout ce qui est humainement possible pour guérir la personne malade, il est immoral de s’engager dans l’acharnement thérapeutique (cf. Catéchisme de l’Église catholique, n. 2278). Cette phrase du peuple fidèle de Dieu, des gens simples : « Laisse-le mourir en paix », « aide-le à mourir en paix » : quelle sagesse ! La deuxième considération concerne la qualité de la mort elle-même, la qualité de la douleur, de la souffrance. En effet, nous devons être reconnaissants pour toute l’aide que la médecine s’efforce d’apporter, afin que, grâce aux « soins palliatifs », toute personne qui s’apprête à vivre la dernière partie de sa vie puisse le faire de la manière la plus humaine possible. Cependant, il faut se garder de confondre cette aide avec des dérives inacceptables qui portent à tuer. Nous devons accompagner les personnes jusqu’à la mort, mais ne pas la provoquer ni favoriser aucune forme de suicide. Je rappelle que le droit aux soins et aux traitements pour tous doit toujours être prioritaire, afin que les plus faibles, notamment les personnes âgées et les malades, ne soient jamais écartés. En effet, La vie est un droit, non la mort, celle-ci doit être accueillie, non administrée. Et ce principe éthique concerne tout le monde, pas seulement les chrétiens ou les croyants. Mais je voudrais souligner ici un problème social mais réel. Cette « planification » – je ne sais pas si c’est le mot qui convient – mais l’accélération de la mort des personnes âgées. Nous constatons souvent, dans une certaine classe sociale, que les personnes âgées, parce qu’elles n’ont pas les moyens, reçoivent moins de médicaments par rapport à ce dont ils auraient besoin, et c’est inhumain : cela ce n’est pas les aider, cela c’est les pousser plus rapidement vers la mort. Et cela n’est ni humain ni chrétien. Il faut prendre soin des personnes âgées comme d’un trésor de l’humanité : elles sont notre sagesse. Et si elles ne parlent pas, et si elles sont dénuées de sens, mais elles sont le symbole de la sagesse humaine. Ce sont ceux qui nous ont précédés et qui nous ont laissé tant de belles choses, tant de souvenirs, tant de sagesse. S’il vous plaît, n’isolez pas les personnes âgées, ne précipitez pas la mort des personnes âgées. Caresser une personne âgée c’est la même espérance que caresser un enfant, car le début de la vie et la fin sont toujours un mystère, un mystère qu’il faut respecter, accompagner, soigner. Aimer.

Que Saint Joseph nous aide à vivre le mystère de la mort de la meilleure manière possible. Pour un chrétien, la bonne mort est une expérience de la miséricorde de Dieu, qui est proche de nous aussi dans ce dernier moment de notre vie. Également dans la prière de l’Ave Maria, nous demandons à la Vierge d’être près de nous « à l’heure de notre mort ». C’est précisément pour cette raison que je voudrais terminer cette catéchèse en priant tous ensemble la Vierge, un Ave Maria pour les mourants, pour ceux qui passent par cette porte obscure, et pour tant de familles qui sont en train de vivre le deuil. Prions ensemble : Ave Maria…


Je salue cordialement les personnes de langue française présentes aujourd’hui, en particulier les jeunes venus de France, le groupe de pèlerins du Sacré Cœur de Marseille, et le groupe de l’Arche de Reims. Ce matin, nous prions en particulier pour les mourants et pour ceux qui sont en deuil. Que la tendresse de Dieu les rejoigne dans leur souffrance, et leur donne l’espérance de la résurrection.

Que Dieu vous bénisse !




6ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (Lc 6, 17.20-26)

« Bénédictions et malédictions ! »

 

L’évangile de ce jour, tiré du livre de saint Luc, nous propose quatre bénédictions (ou béatitudes) et quatre malédictions.

On connaît davantage les neuf Béatitudes selon saint Matthieu données au début du discours sur la montagne (même si on a du mal à les mettre en pratique …).

Ici, Jésus descend de la montagne, et s’arrête dans un terrain plat … Il y a avec lui beaucoup de ses disciples, « et une grande multitude de gens venus de toute la Judée, de Jérusalem, et du littoral de Tyr et de Sidon », donc des gens divers qui sont venus pour l’écouter et se faire guérir, des juifs et des païens …

Et au moment de commencer son enseignement, Jésus lève « les yeux sur ses disciples », c’est-à-dire que ce qu’il va dire s’adresse d’     abord à eux … parce que les autres juifs et les païens ne peuvent pas encore en saisir le sens …

À chaque bénédiction correspond, en sens inverse, une malédiction :

Heureux les pauvres                                        Malheur pour les riches

            le Royaume de Dieu est à vous                              vous êtes déjà consolés

Heureux ceux qui ont faim                               Malheur pour les repus

            vous serez rassasiés                                              vous aurez faim

Heureux ceux qui pleurent                               Malheur à ceux qui rient

            vous rirez                                                                 vous pleurerez

Heureux ceux qui sont haïs                             Malheur à ceux dont on dit du bien

            votre récompense sera grande dans le ciel           ils seront traités de faux prophètes

Et pour chacune des phrases, il y a un présent auquel correspondra un futur.

Le problème est de savoir où se trouve le passage, la limite, entre le présent et le futur.

Saint Luc nous donne la réponse dans une parabole de Jésus, dont il est le seul à faire mention : la parabole du riche mauvais et du pauvre Lazare (Lc 16,19-31) : c’est le moment de la mort, et plus précisément celui du jugement dernier.

C’est alors que l’on comprend pourquoi cet enseignement ne peut être compris pour le moment que par les disciples de Jésus : il faut croire au Royaume de Dieu après la mort.

Dans la parabole du jugement dernier (Mt 25,31-46), le Fils de l’homme sépare les brebis des boucs, et le Roi accueille dans son royaume toutes les brebis, et rejette dans le feu éternel les boucs, suscitant l’incompréhension des uns et des autres.

Pourquoi suis-je pris dans le Royaume des Cieux ? Pourquoi vais-je en enfer ?

Parce qu’ils n’avaient pas compris que leurs actions étaient bonnes ou mauvaises … Ils n’avaient pas conscience du bien comme du mal. Et que le seul juge du bien et du mal était la relation avec l’accueil de Jésus.

Ce passage de l’évangile nous met en garde contre une vision purement humaine de la vie, une vie qui serait seulement terrestre, qui s’arrête à la mort physique des humains.

Saint Paul fait la même réflexion quand il dit, dans la deuxième lecture : « Si nous avons mis notre espoir dans le Christ pour cette vie seulement, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes. »

C’est ce que disait déjà le prophète Jérémie : « Béni soit l’homme qui met sa foi dans le Seigneur, dont le Seigneur est la confiance. » (1° lecture). Jérémie, qui ne connaissait pas Jésus, bien sûr, mais comme la Parole de Jésus est celle du Père, le Seigneur de Jérémie est équivalant à la Trinité. C’est pour nous le moyen « de porter du fruit. ».

Mettons notre foi dans le Seigneur, à la lumière de la Résurrection, avec l’aide du Saint Esprit !

Seigneur Jésus,

nous vivons notre vie sur terre

comme si elle était la fin de tout !

Et nous oublions ton projet :

Nous amener dans la vie éternelle,

dans « la demeure de Dieu avec les hommes »

 

                                     Francis Cousin

Pour accéder à la prière illustrée, cliquer sur le lien suivant : Image dim ord C 6°




Tous appelés à la Vie par la Miséricorde de Dieu (Lc 5,1-11) – DJF

« La foule serrait de près Jésus et écoutait la Parole de Dieu »… En effet, nous dit Jésus, « ce n’est pas de moi-même que j’ai parlé, mais le Père qui m’a envoyé m’a lui‑même prescrit ce que j’avais à dire et à faire connaître. Ainsi donc ce que je dis, tel que le Père me l’a dit, je le dis » (Jn 12,50).

Or qu’est-ce que le Père a dit à Jésus ? Les Evangiles nous permettent de pressentir le cœur de ce message. En effet, au jour de son baptême par Jean Baptiste, Marc, Matthieu et Luc nous retransmettent la Parole que ce jour là le Père dit au Fils : « Tu es mon Fils bien aimé ; tu as toute ma faveur » (Mc 1,11 ; cf Mt 3,17 ; Lc 3,22). De même, au jour de sa Transfiguration sur le Mont Thabor, les trois Evangélistes nous ont rapporté la Parole que le Père a adressée cette fois-ci aux trois disciples présents avec Lui, et à travers eux à nous tous : « Celui-ci est mon Fils bien aimé ; écoutez-le » (Mc 9,7 ; cf. Mt 17,5 ; Lc 9,35).

Et de fait, Jésus ne fera que rendre témoignage (Ap 1,5 ; Jn 3,11 ; 3,31-33 ; 5,31-32) à cette « vérité qu’il a entendue de Dieu » pour Lui‑même (Jn 8,40), « Tu es mon Fils bien-aimé », une vérité qui nous concerne tous nous aussi car, nous dit-il, « le Père lui-même vous aime » (Jn 16,27). Oui, « Père », dira-t-il juste avant de mourir sur une croix pour chacun d’entre nous, « il faut que le monde reconnaisse que tu m’as envoyé et que tu les as aimés comme tu m’as aimé » (Jn 17,22). Tel est le cœur de l’Evangile, le cœur de la Bonne Nouvelle…

Dieu aime toute femme, tout homme sur cette terre, et rien ni personne ne pourra l’empêcher de nous aimer… Cette réalité, en effet, est propre à ce qu’il est, et rien, absolument rien ne pourra empêcher Dieu d’être ce qu’Il Est… Or « Dieu est Amour » nous dit St Jean par deux fois (Jn 4,8.16). Ainsi, « Dieu nous aime parce qu’il est amour, et l’amour tend de nature à se répandre, à se donner » déclare le Pape François (Audience du mercredi 14 juin 2017). Alors, si « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5), il est ce Soleil qui se lève sur « les méchants et sur les bons » (Mt 5,45), car « Dieu ne fait pas acception des personnes » (Ac 10,34 ; Rm 2,11). Il est cette « Lumière véritable qui éclaire tout homme venant dans le monde » (Jn 1,9), ce « Soleil qui donne la grâce, qui donne la gloire » (Ps 84,12), en donnant « l’Esprit de la grâce » (Hb 10,29), « l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu » (1P 4,14), cet Esprit Saint qui est Lumière (Jn 4,24 et 1Jn 1,5) et Vie (Jn 6,63 ; 2Co 3,6 ; Ga 5,25)…

C’est ce Mystère d’Amour et de Don gratuit qui se vit entre le Père et le Fils de toute éternité : « Le Père aime le Fils et il a tout donné en sa main » (Jn 3,35), tout ce qu’il est, « tout ce qu’il a » (Jn 16,15 ; 17,10). Et qu’a-t-il, sinon « l’insondable richesse » de sa divinité (Ep 3,8), ce qui fait qu’il est Dieu de toute éternité… Voilà ce qu’il donne au Fils, gratuitement, tout simplement parce qu’il l’aime. Et c’est par ce Don éternel de son Amour que le Père engendre le Fils en « né du Père avant tous les siècles, Dieu né de Dieu, Lumière née de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu, de même nature que le Père » (Crédo)…

Or si le Fils rend témoignage à cet Amour du Père dont il est l’heureux bénéficiaire depuis toujours et pour toujours, c’est pour nous permettre de prendre conscience à notre tour que toute femme, tout homme sur cette terre est aimé du même amour, totalement gratuit, « inconditionnel » (Pape François). En nous révélant qu’il est le Fils, éternellement engendré par le Père, comblé par le Don de son Amour qui lui donne d’Être de la Plénitude même du Père, Jésus nous révèle au même moment quelle est notre vocation de créatures (Gn 1,26‑28), car nous sommes tous appelés à « reproduire l’image du Fils » (Rm 8,29) en accueillant nous aussi avec le Fils ce que le Fils reçoit du Père de toute éternité, ce par quoi le Père l’engendre en Fils de même nature que Lui… « Comme le Père a la vie en lui-même, de même a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui-même » (Jn 5,26). « Je vis par le Père » (Jn 6,57), éternellement, ce qui pour nous, dans le temps, se traduit par un « instant après instant ». Autrement, c’est le Père qui, par le Don de la Plénitude de son Esprit Saint, donne au Fils d’être ce qu’il est : « Lumière » (Jn 8,12 ; 12,46) par le Don de cet « Esprit » (Jn 4,24) qui est « Lumière » (1Jn 1,5), « Seigneur de la Gloire » par le don de « l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu » (1P 4,14), « Prince de la vie » par le Don de « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63 ; 2Co 3,6), « le Saint » (Ac 3,14) par le Don de l’Esprit Saint (Lc 4,1)… Sans le Père, le Fils n’est rien, le Fils ne peut rien (Jn 5,19-20.30)…

Or cette dynamique concerne tout être humain, par le simple fait qu’il existe et donc qu’il a été créé par « Dieu, le Père Tout Puissant, Créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible » (Crédo). En effet, écrit St Paul, nous avons tous été « prédestinés à reproduire l’image de son Fils, afin qu’il soit l’aîné d’une multitude de frères ; et ceux qu’il a prédestinés, il les a aussi appelés ; ceux qu’il a appelés, il les a aussi justifiés ; ceux qu’il a justifiés, il les a aussi glorifiés » (Rm 8,29-30) et cela par le Don de ce même Esprit, « l’Esprit de Dieu, l’Esprit de gloire », avec lequel et par lequel le Père engendre le Fils depuis toujours et pour toujours. C’est pour cela que le Christ ressuscité déclare à ses disciples, et à travers eux à nous tous : « Recevez l’Esprit Saint » (Jn 20,22), ce même Esprit qu’il reçoit Lui-même du Père de toute éternité…

Mais pour cela, il va nous inviter à adopter la même attitude que la sienne : Lui, en effet, est « toujours tourné vers le sein du Père » (Jn 1,18), recevant ainsi ce Don du Père qui l’engendre en Fils… Alors, la première parole qu’il nous adresse, à nous, pécheurs, est : « Repentez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle » de cet « Amour Inconditionnel » (Pape François). Avec l’aide de la grâce de Dieu, détournez-vous de tout cœur du mal, et « apprenez à faire le bien » (Is 1,16). Alors, en le laissant nous « arracher aux ténèbres » (Col 1,13), nous pardonner, nous purifier (Ez 36,24-28) et nous retourner vers le Père (Ac 5,31 ; 11,18), nous pourrons dire avec Lui « Père » (Lc 10,21 ; Jn 11,41 ; 17,1), « notre Père » (Mt 6,9 ; 6,1). Et nous recevrons alors avec Lui ce Don de l’Esprit qui nous communiquera à nous aussi sa Plénitude de vie, de paix (Jn 14,27), de joie (Jn 15,11 ; Ac 13,52 ; Ga 5,22 ; 1Th 1,6) et nous établira ainsi en communion avec Lui et entre nous dans « l’unité de l’Esprit » (Ep 4,3), dans « la communion du Saint Esprit » (2Co 13,13). Cette joie, cette Plénitude expérimentée sont un avant goût du vrai Bonheur qui nous attend : elles ne peuvent que nous attirer encore et encore vers Jésus (Jn 6,44 ; 6,65 ; 12,32)… et c’est pourquoi les foules se pressent ici autour de Lui pour l’écouter, car « jamais homme n’a parlé comme cela » (Jn 7,46) : il a « les Paroles de la vie éternelle » (Jn 6,68).

Et pour aider Pierre à le reconnaître, Jésus va lui donner de vivre l’impensable pour un pécheur professionnel : lui qui sait que les poissons ne remontent en surface que la nuit, il va capturer, à son invitation, et cela en plein jour, une telle « multitude de poissons que leurs filets se rompaient ». Pierre est bouleversé : « il se jeta aux genoux de Jésus et lui dit : « Eloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur ». Mais Jésus le sait bien ! Et cette misère sera l’occasion pour Pierre de découvrir à quel point Dieu l’aime gratuitement, et cela sans aucun mérite de sa part… Bien plus : il lui semblerait normal d’être rejeté, écarté, délaissé, mis de côté… Mais Dieu fait tout le contraire car il sait à quel point ce mal qui domine l’homme le fait finalement souffrir, et il est « bouleversé » de compassion (Os 11,7‑9) face aux ravages qu’il occasionne dans les vies… Pour Dieu, un pécheur est avant tout un souffrant, qu’il veut consoler, guérir, relever, fortifier, sanctifier… « Quand nous sommes infidèles, Dieu, lui reste à jamais fidèle » car il est Amour, il n’est qu’Amour (2Tm 1,13), ne cessant de rechercher le meilleur pour tous les hommes qu’il aime (Lc 2,14). Voilà le témoignage que St Pierre sera invité à lui rendre, témoignage avec lequel et par lequel Dieu agira dans les cœurs pour les attirer à Lui et les sauver… pour leur plus grand bonheur… éternel…

D. Jacques Fournier




6ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

Béatitudes

Lc 6, 17-26

Jamais, mes frères, la lecture des Béatitudes ne m’a laissé indifférent ! Elle joue même, pour moi, un rôle de révulsif car elles nous annoncent exactement le contraire de ce que le monde nous recommande. Prenez le contraire de cette lecture et vous aurez le portrait de la mentalité du citoyen-moyen de notre époque : ce qu’il pense, avec ses projets, ses désirs, ses phobies et ses ambitions.

Faisons l’expérience, inversons les Béatitudes et nous aurons ceci :  

« Heureux vous qui vous vous amusez, vous qui riez, vous qui prenez du bon temps : profitez-en ! »   

« Heureux êtes-vous si les hommes vous respectent et sont pleins de déférence à votre égard !

Mais :

« Malheureux si vous pleurez ! Malheureux si l’on dit du mal de vous, vous serez méprisés. Vous êtes des faibles et le monde au lieu d’avoir pitié de vous, vous écrasera ! »

C’est bien ce que nous entendons tous les jours à la radio, dans les réflexions de nos voisins, dans les slogans de publicité.

Or, le Christ aujourd’hui, ose nous dire le contraire : il prend le contre-pied de ce que dit « tout le monde ». Il s’élève contre les idées reçues. Bref, il nous présente un monde à l’envers.

Pour lui, oui, c’est le pauvre : celui qui a faim, celui qui pleure, celui qui est méprisé, c’est celui-là qui est heureux, alors que le riche, le satisfait, le fêtard, l’homme respecté serait le dernier des derniers.

Les Béatitudes, c’est l’inverse des valeurs mondaines, c’est le contraire de ce que tout le monde pense.

A tel point, que, si elles ne produisent pas un choc chez celui qui les entend, c’est :    

– ou bien qu’il n’a pas écouté

– ou bien qu’il est réellement vacciné à la Parole de Dieu, que cette dernière n’a plus aucun effet sur lui

– ou bien que l’on prend les paroles du Christ pour celles d’un révolutionnaire utopique et rêveur qui n’a aucune chance de recruter des disciples.   

Posons aujourd’hui la question dans un monde qui a de plus en plus soif de bonheur, qui veut devenir heureux : est-ce le riche, le satisfait, le joyeux drille, l’homme arrivé que chacun salue ou bien le pauvre, l’insatisfait, l’homme accablé par les échecs, celui que l’on méprise parce que c’est un raté de la vie ?

Pour le Christ, pas d’hésitation : ce sont ceux-là, ces derniers, ces ratés à qui le bonheur est promis et non pas aux autres.

Réfléchissons quelques instants, voulez-vous, sur ce curieux bonheur des gens malheureux et à la fin de cette réflexion, peut-être pourrons-nous rejoindre la pensée du Christ en concluant que le vrai bonheur n’est peut-être pas ce que l’on dit ou ce que l’on croit ou ce que l’on voit.

Attention, nous dit Jésus. Aujourd’hui, il y a bonheur et bonheur, tout comme il y a le paradis et les paradis artificiels.

 A quel niveau le situons-nous, ce bonheur ?

Sommes-nous exigeants sur la qualité ou nous contentons-nous d’un bonheur de pacotille ? Un peu comme dans ces bals ou carnavals  où  les  chapeaux, les  masques, les  cotillons  et  les  serpentins ne sont que du carton et du papier avec du clinquant de bazar qui ne fait illusion que quelques heures et qui le lendemain de la fête gisent lamentablement sur le sol et la poussière en attendant le coup de balai.

Parce que Jésus nous aime, il désire pour nous autre chose que les accessoires : il exige pour nous l’essentiel, le définitif, le vrai, l’inusable, ce qui ne se dévalue pas. Bref, en un mot : l’éternel et non le temporel ! En regardant le monde dans lequel il a vécu et dans lequel nous vivons, Jésus constate un fait. Quel fait ? C’est que ceux qui ont tout : l’argent, le confort, la réputation, ceux qui sont satisfaits par ce qu’ils sont, parce qu’ils ont et par ce monde tel qu’il est, ceux qui n’ont plus soif ni faim de rien d’autre : ceux-là n’ont donc rien à attendre, plus rien à aimer, plus rien à espérer, plus rien à désirer, plus rien à bâtir et à créer. Ils sont arrivés, « parvenus« . Ces pauvres bonheurs leur suffisent. Ils sont contents avec ça et ils n’ont plus qu’à se refermer sur eux-mêmes, qu’à dormir et qu’à mourir…

Aux yeux de Jésus, le bonheur consiste au contraire à créer, à bâtir, à vivre dans l’espérance active d’un monde meilleur, à s’engager pour changer ce monde ci et le recréer.

Le bonheur, il est dans la croissance, dans le désir, dans l’insatisfaction, dans la soif jamais désaltérée. Il est dans la communication avec les autres, dans le don de soi-même aux autres ; Il est dans l’amour.

Le bonheur, c’est se dépasser, d’aller toujours au-delà…

Alors, oui, soyez heureux, vous qui ne courez pas après des kits-ersatz de bonheur mais qui aspirez à un monde tout autre !

Soyez heureux, vous qui avez faim et soif d’autre chose, vous ne serez jamais des satisfaits d’ici-bas !

Soyez heureux, vous qui êtes sensibles au mal et à la souffrance des autres et qui ne pouvez pas vous empêcher de pleurer, de crier, de protester car vos cris sont des cris d’amour qui font écho au cri de Dieu !

Soyez heureux, même si l’on se moque de vous, si l’on vous tourne en dérision, même si l’on vous persécute car vous n’allez pas vous résigner, ni vous écraser, mais marcher vers la vraie vie, vers le Royaume de Dieu !

Ces Béatitudes, mes frères, avez-vous remarqué que c’est le portrait de Jésus lui-même ! Il n’y a même, que le Christ qui les ait réalisées parfaitement. Lui seul a été parfaitement pauvre, né dans une étable, entouré des gens les plus simples, n’ayant rien pour reposer sa tête, mort sur la Croix. Personne n’a su pleurer comme lui avec ceux qui pleurent, prendre sur lui les peines et les souffrances des autres, lui qui ne cessait de guérir, de relever, de réintégrer ceux que la société avait marginalisés.

Quant à sa faim, c’était notre salut : « ma nourriture » répétait-il  volontiers, « c’est  de  faire  la  volonté  de mon Père », « que pas un seul de ses petits ne se perde ». C’était là sa mission et il l’a remplie jusqu’au bout c’est-à-dire jusqu’à être rejeté par les siens et condamné par son peuple jusqu’à la Croix.

Dieu nous appelle à sa suite, même si c’est dur, même si on nous montre du doigt car, voyez-vous, l’Evangile n’est pas neutre. Devant ceux qui souffrent, qui pleurent, qui ont faim, nous non plus  ne pouvons rester neutres. Allons à sa suite et soyons heureux, mais du vrai bonheur !  AMEN




6ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (Lc 6,17.20-26)

La Bonne Nouvelle offerte aujourd’hui à notre foi

Jésus descendit de la montagne avec eux et s’arrêta sur un terrain plat. Il y avait là un grand nombre de ses disciples et une grande multitude de gens venus de toute la Judée, de Jérusalem, et du littoral de Tyr et de Sidon.
Et Jésus, levant les yeux sur ses disciples, déclara : « Heureux, vous les pauvres, car le royaume de Dieu est à vous.
Heureux, vous qui avez faim maintenant, car vous serez rassasiés. Heureux, vous qui pleurez maintenant, car vous rirez.
Heureux êtes-vous quand les hommes vous haïssent et vous excluent, quand ils insultent et rejettent votre nom comme méprisable, à cause du Fils de l’homme.
Ce jour-là, réjouissez-vous, tressaillez de joie, car alors votre récompense est grande dans le ciel ; c’est ainsi, en effet, que leurs pères traitaient les prophètes.
Mais quel malheur pour vous, les riches, car vous avez votre consolation !
Quel malheur pour vous qui êtes repus maintenant, car vous aurez faim ! Quel malheur pour vous qui riez maintenant, car vous serez dans le deuil et vous pleurerez !
Quel malheur pour vous lorsque tous les hommes disent du bien de vous ! C’est ainsi, en effet, que leurs pères traitaient les faux prophètes. »

         Cet Evangile est celui des paradoxes… La pauvreté, en effet, est souvent source de souffrances : impossibilité de se loger, de se nourrir, de se soigner correctement… Et pourtant, à tous ceux et celles qui sont confrontés à de telles épreuves et qui comptent sur lui, Jésus promet le bonheur… Notons que la béatitude est au présent : la vraie joie est offerte dès maintenant, dans la foi et par la foi, au cœur de toutes ces situations qui, pourtant, ne peuvent que générer larmes et plaintes… Et Jésus ose insister par trois fois : « Heureux les pauvres… Heureux ceux qui ont faim… Heureux ceux qui pleurent »…

            Et humainement parlant, quelles sont les vies qui sont si souvent présentées comme des modèles à imiter ? Celui qui, parti de rien, a réussi à devenir milliardaire… Celui dont la table n’est garnie que de mets délicats… Celui qui va de plaisir en plaisir… Pourtant, Jésus se lamente sur tous ceux et celles qui vivent ces situations apparemment si enviables… Et là encore, il ose insister par trois fois : « Malheureux, vous les riches… Malheureux, vous qui êtes repus… Malheureux, vous qui riez »…

            Mais quelqu’un qui parle ainsi est un fou ! « Il a perdu la raison », diront les membres de sa propre famille…

            Jésus sait que son message va à l’encontre de la plus élémentaire sagesse humaine, si celle-ci ne cherche qu’un bonheur immédiat, et donc éphémère… « Tu as un démon » lui diront certains Pharisiens… Et « du moment qu’ils ont traité de Béelzéboul le maître de maison, que ne diront-ils pas de ses disciples ! » Eux aussi ne pourront qu’être « haïs, repoussés, insultés, rejetés comme méprisables »… Voilà des situations qui, humainement parlant, ne sont guère enviables… Et pourtant, nouveau paradoxe de Jésus : il déclare « heureux » ceux et celles qui vivent tout cela « à cause du Fils de l’Homme »…

            C’est en effet la relation de cœur avec lui qui apporte la seule vraie joie : celle de Dieu lui-même, celle pour laquelle nous avons tous été créés, celle que nous sommes tous invités à recevoir de sa bonté… Et cette joie est donnée avec d’autant plus d’intensité que nous pouvons connaître ici-bas des situations difficiles, injustes, inhumaines… Paradoxe de la Croix que Dieu porte avec nous en nous comblant de toutes les richesses de ses consolations…              DJF




5ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (Lc 5, 1-11)

« Avance au large. »

 

L’évangile nous parle de l’appel des premiers disciples, selon saint Luc.

Jésus se trouve au bord du lac de Génésareth, un lieu qu’il aime particulièrement.

On ne dit pas à quel endroit, mais certainement à côté de Capharnaüm, là où habitait la famille de Simon-Pierre.

Il y était déjà venu avant d’aller à Nazareth, le village de sa jeunesse.

Ce jour-là, il y avait foule autour de lui, et il lui était difficile de se faire entendre. Alors, voyant deux barques sur le rivage, il monte dans l’une, celle de Simon, et il s’éloigne un peu pour enseigner la foule.

Son enseignement terminé, il dit à Simon : « Avance au large, et jetez vos filets ».

Protestation de Simon : « On n’a rien pris de toute la nuit ! ». Mais il avait écouté l’enseignement de Jésus, et cela l’avait certainement un peu bouleversé : un enseignement nouveau, avec des paroles d’amour, de bonté … Il n’avait jamais entendu parler comme cela à la synagogue … alors il ajoute « mais, sur ta parole, je vais jeter les filets. ».

Bien lui en a pris ! Des poissons en quantité ! Les filets craquent …

Ils sont obligés de faire appel à leurs collègues de l’autre barque … et les deux barques furent remplies !

Réaction de Simon : « Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur. ».

Une petite phrase, mais qui dit beaucoup !

D’abord le verbe : Éloigne-toi de moi ! Sur une barque, cela n’est pas très facile de le faire physiquement, Il n’y a pas beaucoup de place … et en plus avec tous les poissons qu’ils avaient pris, c’était impossible.

Il s’agit donc d’un autre type d’éloignement : « nous ne sommes pas du même monde », non pas vraiment en terme de classe sociale, peut-être pas encore en terme de monde spirituel … mais il était bouleversé. Et le fait qu’il appelle Jésus « Seigneur » montre que lui-même met de la distance entre Jésus et lui …

Et la raison qu’il donne est intéressante : « car je suis un homme pécheur. ». Il ne dit pas : « Je ne suis qu’un moins que rien ». Non. Il met la distance entre eux en terme de ’’Justesse’’, et pour un juif, c’est la justesse devant Dieu. Et le juste devant Dieu est quelqu’un qui ne fait pas de péché. Alors, a-t-il senti plus ou moins confusément que Jésus était au moins juste devant Dieu, un prophète … et au plus … le Messie ? On ne peut pas le savoir !

Et tous étaient saisi d’effroi : Simon, ceux qui étaient avec lui (Qui ? des ouvriers ? son frère André ? Luc ne précise pas …) ainsi que Jacques et Jean, fils de Zébédée, dans l’autre barque.

Jésus dit alors à Simon : « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras. ».

J’aime bien quand Jésus dit : « Sois sans crainte », et qu’il ajoute une phrase que Simon ne peut pas comprendre … Et qui aurait pu la comprendre ? Il faudra certainement attendre la Pentecôte pour que Simon-Pierre arrive à comprendre le sens de cette phrase !

Mais les voies de Dieu ne sont pas les nôtres …

Et malgré la crainte de tous ces gens, Luc nous dit : « ils ramenèrent les barques au rivage et, laissant tout, ils le suivirent. » !

On a envie de dire : « C’est la magie de Dieu ! » …

Mais Dieu ne fait pas de magie !

Il parle au cœur des gens, … Il leur dit dans le secret son amour … et les gens sont transformés !

Est- ce que nous sommes prêts à nous laisser transformer par l’amour de Dieu ?

Seigneur Jésus,

Tu es vraiment formidable !

Dans cette situation,

personne n’aurait été capable

de transformer le cœur des gens

pour qu’ils te suivent,

et toi, l’air de rien, tu le fais !

 

                                     Francis Cousin

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