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Dimanche 17 mai, 6° Dimanche de Pâques (Jn 14,15-21)  – Messe télévisée sur RFO la 1° – Homélie de P. Pascal Mussard

Dans l’évangile, que nous venons d’entendre, Jésus prépare, enseigne ses disciples. Il sait que bientôt son heure va venir, qu’il va vivre la passion, la mort, la résurrection … et qu’il devra retourner vers son Père.

D’une certaine manière, il donne à ses disciples ses dernières consignes, son testament pour qu’ils puissent continuer la mission de son Père.

Il leur fait une promesse : je ne vous lâcherai pas, (non) je ne vous abandonnerai pas ! Je vous donnerai l’Esprit de vérité, l’Esprit Saint qui sera toujours auprès de vous, pour vous consoler, vous défendre, vous guider…

Pendant qu’il prononce ces paroles, Jésus ne pense pas seulement aux douze hommes qui l’ont accompagné tant bien que mal sur les routes de Palestine. Il pense aussi à chacun d’entre nous, à tous ceux qui souffrent, ceux qui cherchent une raison de vivre à laquelle s’agripper, notamment en cas de difficulté familiale, professionnelle ou de deuil.

Pour illustrer cette promesse de Jésus de toujours être avec nous, je voudrais vous partager le témoignage d’un prêtre.

« J’ai pu, dit-il, retrouver à quelques années de distance des parents qui avait perdu un enfant et dont la vie avait été brisée par le deuil. L’un d’eux m’a raconté  que les mois qui ont suivi ont été marqués par l’angoisse,  par un brouillard épais. Puis, lentement, un peu de calme entre dans le cœur. Non pas la sérénité, pas le bonheur, mais un peu de paix. Avec l’impression, de ne plus avoir peur de la mort non plus. Si je meurs un jour, en fin de compte, je ne meurs pas, je vais retrouver mon enfant. Je vis aujourd’hui intensément, je me dévoue pour les autres, pour ceux qui sont dans le besoin. »

Le Christ ne nous abandonne pas ! Il nous accompagne.

C’est le cas du disciple Philippe dans la 1e lecture qui s’en va en mission porté par l’espérance et par la foi ! Dans la 1ere lecture, Philippe fait partie du groupe des 7 diacres qui ont été appelé par les apôtres pour les aider dans leur mission. Il est envoyé, en terre étrangère, en Samarie, où il proclame le Christ ressuscité. Il fait comme Jésus l’a appris à ses disciples, il va vers les méprisés, il proclame la Parole, il enseigne, Il rassemble des foules, il délivre, il guérit et une grande joie envahit toute la ville.

 En écoutant ce récit, cela nous rappelle l’action de Jésus lui-même. Contempler Jésus, vivre ses commandements, annoncer le règne de Dieu, voilà la mission du disciple. Cette mission, il ne la vit pas seul, il la vit en communion avec les autres (disciples) et d’ailleurs (dans ce récit) Pierre et Jean, (les 2 apôtres) viennent imposer les mains à ces Samaritains pour que eux, aussi, puissent recevoir l’Esprit Saint, le Défenseur, l’Esprit de vérité et ainsi parfaire leur l’initiation à la foi.

Dans la seconde lecture, Pierre annonce le Christ avec beaucoup de zèle à des chrétiens qui se heurtent à la calomnie et à la persécution. Il leur rappelle que quelles que soient les épreuves et les difficultés, le disciple reste ferme dans la foi et qu’il doit toujours être prêt à rendre témoignage, avec douceur et respect, de l’espérance qui l’habite. La foi ne s’impose pas, elle se propose, avec douceur et dans le respect des personnes. Comme Jésus, Pierre nous rappelle que nous devons rejeter toute violence et agir pour le bien. Le Bien est d’une certaine manière l’ADN du chrétien, la signature des enfants de Dieu…

Je me souviens de cet homme de terrain qui était injustement accusé. Son directeur l’appel au téléphone et le convoque dans son bureau ! Cet employé conscient d’être dans son bon droit et se sentant injustement accusé se rend seul au bureau. En ouvrant la porte, on lui dit : « Oussa y lé out syndicat ! » Il répondit aussitôt : « Mon Syndicat c’est Jésus Christ ! »

Le Christ ne nous abandonne pas ! Il nous accompagne.

Les textes de ce dimanche nous invitent à méditer sur l’attitude du disciple du Christ. Le disciple répond à l’appel du maitre. Il accepte de se mettre à sa suite. Il l’accueille, il l’écoute, et il se laisse guider. Il aime son Seigneur, garde ses commandements et essaie de les vivre. Il prend conscience de sa fragilité, de sa pauvreté, mais aussi de ses qualités pour se mettre au service du Bien. Le disciple du Christ est celui qui rend témoignage de l’espérance, de la joie, de l’amour qui l’habitent.

Dans « la joie de l’évangile », le pape François, nous encourage à être des « disciples – Missionnaires ». Il dit : « Après avoir écouté et regardé comment Dieu agit, le « disciple – Missionnaire » se met lui-même à agir. Il invente de nouvelles routes, il est hardi, il ne se concentre pas sur lui mais sur ceux qui sont en dehors de l’Église, les incroyants, les pauvres, les marginaux. Il  n’y   va   pas avec un étendard, il n’est pas un propagandiste de l’Évangile, mais il cherche à rendre compte de la joie d’être chrétien.

Frères et sœurs, entendons-nous l’appel urgent, du pape François à être des « disciples – missionnaires » ?

Dieu notre Père, ravive en nous l’Esprit – Saint que nous avons reçu au baptême pour que nous soyons de vrais disciples du Christ, des disciples joyeux à faire le bien.

 Amen

                                                                                                      P. Pascal Mussard




« Pourquoi restez-vous là, à regarder le ciel … » (Mtt 28, 16-20) ; L’Ascension – Francis COUSIN)

En ce jeudi de l’Ascension, Jésus monte au ciel pour s’assoir à la droite de son Père, ainsi que l’a vu Etienne. Il ’’quitte’’ ses apôtres pour de bon à leurs yeux. Ou, comme on le dit maintenant depuis le Covid-19, il était en ’’présentiel’’ avec ses apôtres. Et maintenant, il va être en ’’distanciel’’ avec eux …

Oui, mais …

Ce qui est vrai pour les humains ne l’est pas pour Jésus ! Pour nous, nos rapports avec les autres se font soit en ’’présentiel’’, soit en ’’distanciel’’, … ou encore ils n’existent pas !

Mais Jésus est toujours présent avec nous : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. ». Il est donc toujours en ’’présentiel’’ pour nous ! Pire : il ne respecte même pas les gestes barrières, la ’’distanciation physique’’, puisqu’il entre dans notre cœur …

Cette terminologie nouvelle ne peut pas s’appliquer à Jésus, à Dieu … même s’il est ’’distant en ciel’’.

Jésus est donc entré dans la nuée. Les apôtres ne le voient plus ! Et ils sont là, tout hébétés !

On ne sait pas combien de temps ils sont restés comme cela … mais ça a dû prendre du temps … à tel point qu’il a fallu y mettre un terme, et qu’on envoie deux anges pour les rappeler à l’ordre : « Eh oh ! Il faut revenir sur terre ! Ce n’est plus le moment de se lamenter, d’avoir des regrets ! … de se faire un film sur le bon temps passé avec Jésus ! … Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? »

Comme lors de la transfiguration, où Pierre aurait bien voulu que cela dure plus longtemps en plantant des tentes ; Jésus ne l’avait pas permis, et les avait invités à redescendre vers les autres, vers le peuple …

Là, pour les consoler, les anges leur disent : « Ce Jésus qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. ». Prudents, les anges n’ont pas donné de date …

Mais en attendant, cela rappelle aux apôtres ce que Jésus vient de leur dire : ils ont une mission à remplir : être des témoins de la Bonne Nouvelle de Jésus, « à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. » (Première lecture). On part du plus proche, et par extension, on va de plus en plus loin …

« De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. ».

Non seulement Jésus est avec eux, mais en plus il leur donne une autre aide : « Vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous » (Première lecture) ; « c’est l’énergie, la force, la vigueur que [le Père] a mise en œuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité d’entre les morts et qu’il l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux. » (Deuxième lecture).

C’est le temps de l’Église qui se met en route, et qui prendra véritablement son essor le jour de la Pentecôte quand l’Esprit Saint viendra sur eux.

Toutes ces Paroles, elles ne sont pas réservées aux apôtres. Elles sont pour tous ceux qui font partie de l’Église, pour tous ceux qui sont baptisés, qui sont « devenus enfants de Dieu » (Jn 1,12), de tous les temps … Et elles sont donc aussi pour nous …

Jésus est avec nous …

L’Esprit Saint est avec nous … qui nous soutient, nous rappelle les Paroles de Jésus, nous les fait comprendre … pour que nous soyons, dans le monde, des témoins de Jésus ressuscité.

Mais si Jésus est toujours avec nous … il ne faut pas que nous mettions Jésus en ’’distanciel’’ par rapport à nous …

Seigneur Jésus,

c’est notre mission de baptisés

d’être témoins de ta Bonne Nouvelle.

Mais encore faut-il que nous soyons proches de toi,

que nous gardions le contact avec toi,

que nous ouvrions la porte de notre cœur.

 

Francis Cousin

 

 

 

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Prière dim Ascension A




« Attente… » (Jn 17, 1-11) ; 7° Dimanche de Pâques – Francis COUSIN)

Ce dimanche est un peu particulier, puisqu’il est entre l’Ascension de Jésus et la Pentecôte … entre le départ de Jésus vers son Père … et l’attente de l’Esprit Saint que le Père va envoyer, à la demande de son Fils, sur les apôtres et quelques disciples, hommes et femmes.

Et l’attente risque d’être longue ! En effet, Jésus n’a pas donné de date pour la venue de l’Esprit … Il n’a pas dit : « Dans dix jours, vous recevrez l’Esprit. » … Et quand l’attente est trop longue, on est un peu aigri, on est tout marri, on désespère … Et nous en savons quelque chose, nous qui attendons depuis plus de deux mois de pouvoir nous retrouver ensemble pour célébrer la messe et communier …

Alors, on est un peu surpris de voir les apôtres dont Luc nous dit qu’ils « retournèrent à Jérusalem, en grande joie. » (Lc 24,52). On s’attendrait plutôt à les voir tout tristes de la séparation d’avec Jésus.

Il est vrai que Jésus leur avait promis, outre l’envoi de l’Esprit Saint pour les aider dans leur mission, de leur préparer une place auprès de son Père pour qu’ils soient pour toujours avec lui. Et puis qu’il serait toujours avec nous dans ce monde.

Le chrétien est toujours dans l’attente entre deux joies.

La première joie est celle de la rencontre avec Jésus. C’est une joie que beaucoup ont oublié, parce qu’ils étaient trop petits ; c’était plutôt la joie de leurs parents de demander le baptême pour leur enfant. Mais c’est une joie qui se développera petit à petit avec les parents et les catéchistes, dans l’attente de la première communion. Puis dans l’attente de la confirmation. La joie ne se manifeste pas toujours de la même manière, … cela dépend essentiellement de la qualité de la rencontre avec Jésus. On la voit davantage chez les personnes plus âgées qui demandent les sacrements de l’initiation : il suffit de voir leurs regards et leurs sourires quand elles viennent juste d’être baptisées … avec parfois des larmes de joies …

Et cette joie se manifestera également pour chacun des sacrements reçus, parfois de manière plus intérieure. Il est vrai que la joie du mariage ou de l’ordination sacerdotale (ou des vœux pour les religieuses et religieux) est plus démonstrative que celle du sacrement de réconciliation ou des malades … mais il y a toujours une joie qui est ressentie par une paix intérieure, une sérénité, celle de la rencontre aimante de Dieu envers nous.

Et puis il y a toutes les autres rencontres avec Dieu, dans la prière. Rencontres individuelles, personnelles, … et les rencontres en communautés, paroissiales ou de mouvements … Rencontres que l’on attend impatiemment en ce moment …

Bien sûr, il peut arriver que l’attente soit trop longue, et que l’on s’impatiente, parce qu’on n’arrive pas à retrouver la joie de la rencontre avec Dieu, parce qu’on pense que Dieu nous a oublié, parce qu’on n’a pas le goût de prier … parce qu’on est plus intéressé par les attraits du monde … parce que …

« Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force (…) de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. » (Lc 21,36). « Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation ; l’esprit est ardent, mais la chair est faible. » (Mt 26,41).

Si à Gethsémani les apôtres n’avaient pas réussi à rester éveillés, ils se sont rattrapés après la résurrection puisque « tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière … » (première lecture)

Veillons, prions, soyons dans la joie de la rencontre habituelle avec Dieu, restons dans l’attente de ces rencontres avec Dieu … et surtout dans l’attente de la rencontre définitive avec lui, quand il nous accueillera dans son Paradis. Alors, ce sera la joie parfaite !

Seigneur Jésus,

tu es notre joie,

parce que tu n’es qu’amour

et que tu nous donnes tout ton amour,

reçu de ton Père,

dans le don de l’Esprit Saint.

Garde-nous dans l’attente aimante

de chacune de tes rencontres.

 

Francis Cousin

 

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Prière dim Pâques A 7°




« Si vous m’aimez … » (Jn 14,15-21) ; 6° Dimanche de Pâques – Francis COUSIN)

On peut être surpris par ce ’’si’’, puisque Judas n’est plus là, il est déjà sorti. Il ne reste donc dans la chambre haute que les apôtres et quelques disciples dont on peut penser qu’ils aiment Jésus, … même si les évènements qui vont suivre vont montrer quelques faiblesses de leur part …

Sans doute faut-il le comprendre, non dans un sens de doute de la part de Jésus, mais plutôt comme une affirmation : « Vous qui m’aimez … », en relation avec le verset 23 : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole … » où Jésus parle de tous ceux, présents et à venir, qui écouteront sa Parole, qui adhéreront à celle-ci, et qui aimeront celui qui l’a dite … même sans l’avoir vu.

Les deux phrases (v 15 et v 23) sont équivalentes : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. » et « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole … », ce qui veut dire que ’’les commandements’’ et ’’la Parole’’ sont une seule et même chose, la Parole de Jésus a force de commandement.

Et le résultat est le même : « Celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; moi aussi, je l’aimerai » et « mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui et, chez lui, nous nous ferons une demeure » (v 23) : il y a réflexivité de l’amour entre celui qui croit et Jésus, entre Jésus et le Père, et comme Jésus et le Père ne font qu’un, entre celui qui croit et le Père. Pour Jésus, tout est une question d’amour.

Mais pas seulement d’amour entre les hommes et Dieu, Père, Fils et Saint Esprit. À cet amour de Dieu, Jésus ajoute « un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. » (Jn 13,34).

Et c’est sans doute ce qui est le plus difficile : aimer les humains qu’on voit tous les jours, avec leurs défauts (comme nous !), avec leurs mauvaises réactions (comme nous !), avec leurs mensonges (comme nous !) et leurs vouloirs de paraître (comme nous !?) … Ce n’est pas évident.

Saint Jean nous dit : « Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas. » (1 Jn 4,20).

L’amour des autres ne peut exister que parce que Dieu nous a aimés le premier, d’un amour constant, quelles que soient nos erreurs, nos chutes, et que nous lui rendions son amour, dans une « rencontre intime avec Dieu, une rencontre qui est devenue communion de volonté pour aller jusqu’à toucher le sentiment. J’apprends alors à regarder cette autre personne non plus seulement avec mes yeux et mes sentiments, mais selon la perspective de Jésus Christ. Son ami est mon ami. Au-delà de l’apparence extérieure de l’autre, jaillit son attente intérieure d’un geste d’amour, d’un geste d’attention, que je ne lui donne pas seulement à travers des organisations créées à cet effet, l’acceptant peut-être comme une nécessité politique. Je vois avec les yeux du Christ et je peux donner à l’autre bien plus que les choses qui lui sont extérieurement nécessaires : je peux lui donner le regard d’amour dont il a besoin. Ici apparaît l’interaction nécessaire entre amour de Dieu et amour du prochain ( …). Si le contact avec Dieu me fait complètement défaut dans ma vie, je ne peux jamais voir en l’autre que l’autre, et je ne réussis pas à reconnaître en lui l’image divine. Si par contre dans ma vie je néglige complètement l’attention à l’autre, désirant seulement être «pieux» et accomplir mes «devoirs religieux», alors même ma relation à Dieu se dessèche. Alors, cette relation est seulement «correcte», mais sans amour. Seule ma disponibilité à aller à la rencontre du prochain, à lui témoigner de l’amour, me rend aussi sensible devant Dieu. Seul le service du prochain ouvre mes yeux sur ce que Dieu fait pour moi et sur sa manière à Lui de m’aimer. ( … ) Amour de Dieu et amour du prochain sont inséparables, c’est un unique commandement. Tous les deux cependant vivent de l’amour prévenant de Dieu qui nous a aimés le premier. Ainsi, il n’est plus question d’un «commandement» qui nous prescrit l’impossible de l’extérieur, mais au contraire d’une expérience de l’amour, donnée de l’intérieur, un amour qui, de par sa nature, doit par la suite être partagé avec d’autres. L’amour grandit par l’amour. » (Benoît XVI, Deus caritas est, n°18).

Heureusement, Dieu, dans son infinie bonté, nous a donné « un autre Défenseur qui sera pour toujours avec [nous] : l’Esprit de vérité. ».

Seigneur Jésus,

ouvre nos yeux

sur le monde qui nous entoure.

Nous ne sommes pas seuls sur le chemin,

ce serait trop facile :

penser à toi, penser à moi …

Et les autres ?

Ils ont besoin de moi !

En suis-je conscient ?

 

Francis Cousin

 

 

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Prière dim Pâques A 6°




6ième Dimanche de Pâques – par le Diacre Jacques FOURNIER (Jn 14, 15-21).

« Si quelqu’un m’aime, je me manifesterai à lui »

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements.
Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous.
l’Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous, et il sera en vous.
Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous.
D’ici peu de temps, le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi.
En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous.
Celui qui reçoit mes commandements et les garde, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; moi aussi, je l’aimerai, et je me manifesterai à lui. »

 

            Jésus nous invite ici à l’amour… « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements… Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime. » Or « le commandement » de Jésus n’est pas un programme de vie parfaite à accomplir, programme qui nous rendrait meilleur que les autres… Non, il est une invitation continuelle au repentir, pour que nous puissions recevoir le pardon de nos péchés. « En son Nom, le repentir en vue de la rémission des péchés sera proclamé à toutes les nations… De cela vous êtes témoins » (Lc 24,47-48). Jésus en effet, en tout son être est « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,29), inlassablement, jour après jour, de repentir en repentir, de recommencement en recommencement… En nous détournant de Dieu, le péché nous prive de la Plénitude de sa paix et de sa vie ? Nous la retrouvons aussitôt dès que nous nous retournons de tout cœur vers Lui, dans la vérité de notre être blessé. « Le salaire du péché, c’est la mort ; le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle, dans le Christ Jésus ». Voilà pourquoi, nous dit Jésus, « le Père lui-même, qui m’a envoyé, m’a donné son commandement sur ce que je dois dire et déclarer ; et je sais que son commandement est vie éternelle » (Rm 6,23 ; Jn 12,49-50).

            Si nous gardons son « commandement », se repentir de tout cœur, nous recevrons de sa Miséricorde le don de sa vie, qui nous sera transmis par « l’Esprit de Vérité » : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : l’Esprit de vérité », « l’Esprit Saint qui est Seigneur et qui donne la vie » (Crédo). Alors, la promesse de Jésus s’accomplira : « Le monde ne me verra plus, mais vous, vous verrez que je vis, et vous aussi vous vivrez ». En recevant la vie de Dieu dans nos cœurs, une vie qui est avant tout Paix, nous comprendrons que ce trésor ne vient pas de nous, et nous réaliserons au même moment que le Christ, que nous n’avons jamais vu, vit de la Plénitude de cette même vie. Nous réaliserons ainsi qu’il nous a, gratuitement, par amour, établis dans ce Mystère de Communion qu’il vit avec son Père de toute éternité : en étant ainsi par grâce « en lui », unis à lui dans la communion d’une même vie, d’une même paix, « vous reconnaîtrez », nous dit Jésus,  «  que je suis en mon Père, et vous en moi et moi en vous ».

            Mais cette vie est la vie de Dieu, un Dieu qui est Amour en tout son être… Sa simple présence en nos cœurs ne pourra alors que nous entrainer à notre tour sur les chemins de l’amour, qui se concrétisent dans le service de Dieu et de nos frères…                        DJF

 




Audience Générale du Mercredi 13 Mai 2020

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 13 Mai 2020


Frères et sœurs, la prière n’est pas seulement un mouvement de la sensibilité ni un pur acte de l’intelligence. Elle nait dans le secret de ce lieu intérieur que les auteurs spirituels appellent le Cœur. Loin d’être une action secondaire et marginale, la prière nait à l’intime de notre personne, comme un élan en recherche nostalgique d’une rencontre avec un Autre. Pour le chrétien, cet Autre s’est révélé en Jésus-Christ, et est entré en relation avec nous : « Dieu, personne ne l’a jamais vu, le Fils unique qui est dans le sein du Père, l’a fait connaître ». Les chrétiens s’adressent à Dieu en osant l’appeler « Père ». Le rapport que nous avons avec lui n’est pas de servilité, marqué par la peur, mais une alliance, une amitié, une communion, comme Jésus l’enseigne : « je ne vous appelle plus serviteurs, mais je vous appelle amis ». Dans la confidence de la prière, il est possible de tout lui dire, tout lui demander. Il n’importe pas que nous nous sentions en faute envers lui, et, de fait, nous sommes souvent insuffisants, ingrats, infidèles. Mais Dieu est fidèle et, si les hommes cessent de l’aimer, lui continue d’aimer, même si l’amour le conduit au calvaire.

Je salue cordialement les personnes de langue française.

Lorsque nous prions, efforçons-nous de nous adresser à Dieu avec confiance, comme un enfant s’adresse à son Père, chassant toute peur et toute distance. Il est toujours proche de nous, nous pouvons tout lui dire et tout lui demander.

Que Dieu vous bénisse !

 

 

 

 

 




 » La Vierge Marie, patronne de l’Ordre des prêcheurs  » (Fr Manuel Rivero O.P.)

Quand vous entendez « Vierge Marie », à quoi pensez-vous ? Qu’est-ce qui vous attire dans la vie de la Mère de Dieu ? Sous quel vocable aimez-vous l’appeler ?

La Réunion, île mariale, invite les chrétiens à se confier à l’intercession la mère de Jésus sous une multitude de vocables comme le montrent les titres de nos paroisses et de nos lieux de pèlerinage : Notre-Dame du Rosaire, Notre-Dame de la Salette, Notre-Dame de la Délivrance, Notre-Dame de la Source, Notre-Dame de la Trinité, Notre-Dame de l’Assomption, Notre-Dame de Lourdes, Notre-Dame du Mont-Carmel, Notre-Dame du Sacré-Cœur, Notre-Dame Reine du monde, Notre-Dame des neiges, Notre-Dame de la Paix, Notre-Dame des douleurs, Notre-Dame du Bon Port, Notre-Dame Auxiliatrice, Notre-Dame au Parasol, la Vierge noire …

Eglise de la Paroisse Notre Dame des Neiges, Cirque de Cilaos

Aujourd’hui nous faisons mémoire de Notre-Dame, patronne de l’Ordre des prêcheurs. Un ancien maître de l’Ordre au XIIIe siècle, le frère Humbert de Romans (+1277), témoignait déjà de la confiance des frères prêcheurs de l’Évangile dans le patronage de la Vierge Marie : « La bienheureuse Vierge Marie fut l’aide principale dans la fondation de l’Ordre … et l’on espère qu’elle le conduira à bon port », écrivait-il à ses frères.

C’est la Vierge Marie qui a voulu l’Ordre des prêcheurs pour que son fils Jésus, le Verbe fait chair, soit connu, loué et aimé.

Les moniales dominicaines commencent et finissent leurs journées en priant la Vierge Maria. Quand je cherchais ma vocation étant étudiant en sciences économiques, j’avais passé quelques jours au couvent dominicain de Caleruega (Espagne). C’était l’hiver. La neige habillait d’un blanc limpide les champs castillans. Le matin, avant l’aube, un frère novice réveillait les autres frères en chantant dans les couloirs. C’était romantique. C’était beau.

Le poète Baudelaire (+1867) disait à propos du père Lacordaire (+1861), dominicain : « Le père Lacordaire est un prêtre romantique et je l’aime ».

Vierge de silence, Marie de Nazareth gardait les enseignements et les événements de son Fils dans son cœur. Elle les priait en les interprétant à la lumière de l’Ancien Testament.

Marie, Paroisse St Martin à Grand Ilet, Cirque de Salazie

Femme, cent pour cent juive, cent pour cent chrétienne, Marie vivait de la parole de la Loi de Moïse, des Psaumes et des prophètes.

Fille de Dieu le Père, épouse du Saint-Esprit, mère et disciple du Fils de Dieu, le Verbe fait chair, Marie a été plongée dans le mystère de la sainte Trinité sans recevoir un baptême d’eau.

Par sa foi dans les paroles de l’ange Gabriel à l’Annonciation, Marie a conçu d’abord don Fils dans son cœur. À l’image du Père qui conçoit éternellement son Fils, Parole intérieure, dans l’amour de l’Esprit-Saint, Marie de Nazareth a conçu d’abord son Fils Jésus dans le silence du cœur par la pensée de foi en Dieu le Père dans l’amour de l’Esprit Saint.

Il nous arrive de dire à quelqu’un : « Excusez-moi, je ne t’ai pas envoyé la lettre que je t’avais écrite en pensée. »

Il en va de même dans le mystère de la sainte Trinité. Dieu le Père pense éternellement son Fils, la Parole vivante. Cette Parole vivante a pris chair en Marie par la foi. Le Verbe s’est manifesté dans l’Incarnation. Dieu, que personne n’a jamais vu, s’est révélé aux hommes en devenant homme.

La Parole de Dieu n’est une vibration de l’air mais la pensée intérieure du Père.

Depuis le commencement du monde, aucun homme n’avait pu imaginer ni voir le mystère de Dieu. La Vie de Dieu s’est dévoilée en Jésus, le Verbe fait chair, né d’une femme.

Marie, Musée de Sens

À l’exemple de notre pensée qui peut devenir lisible dans une lettre, le Fils de Dieu s’est fait connaître en tant homme grâce à Marie. C’est pourquoi, des docteurs de l’Église comme saint Albert le Grand appellent la Vierge Marie « la feuille blanche » sur laquelle Dieu a écrit notre salut. Sainte Catherine de Sienne, à son tour, voyait en Marie le livre où est écrite notre Rédemption.

Cela dit, nous ne sommes pas la religion du Livre mais la religion de la Parole vivante.

« Le silence, père des prêcheurs », dit un dicton dominicain enseigné aux novices comme la voie de la sagesse et de l’union à Dieu.

L’Annonciation, Basilique du Rosaire à Lourdes

Marie est la femme qui écoute dans le silence. C’est dans le silence du cœur que Marie a accueilli l’annonce de l’ange Gabriel : « Réjouis-toi, Marie, comblée de grâce ».

Dieu est silence et Il nous parle dans le silence. Le bruit nous empêche d’écouter Dieu. Le bruit casse nos conversations intérieures avec Dieu.

Femme habitée par le Verbe fait chair, Marie s’empresse de rejoindre la maison d’Élisabeth, sa cousine, qui était enceinte de Jean le Baptiste, pour lui apporter la grâce du Messie, qu’elle portait dans corps, Jésus.

Femme serviable, Marie aide sa cousine âgée à préparer la naissance de son fils.

Femme de louange, Marie chante le Magnificat : Dieu accomplit des merveilles chez les humbles et les humiliés.

La Visitation, Basilique du Rosaire à Lourdes

Femme appelée à la sainteté dans le quotidien, Marie prie Dieu qui aime la vie cachée : « Vraiment, tu es un Dieu caché, Dieu d’Israël, sauveur », s’exclame le prophète Isaïe.

Femme, épouse et mère, elle soutient avec tendresse la foi et le travail de Joseph, en partageant l’éducation de Jésus avec lui.

Membre du peuple d’Israël, Marie aime les pèlerinages à Jérusalem où elle monte en chantant les Psaumes.

Femme, ayant reçu l’allégresse de l’Esprit-Saint, Marie participe aux noces de Cana où elle danse avec les convives, en veillant à la réussite de la fête comme le montre son regard attentif et miséricordieux : « Ils n’ont pas de vin ». Femme ayant les pieds sur terre, Marie s’occupe des choses pratiques et matérielles. Ce jour-là, Jésus changea l’eau en vin et il manifesta sa gloire.

Femme des douleurs sur le Calvaire, Marie est donnée comme mère spirituelle à l’Église qui communie à la Passion de Jésus-Christ.

Première Église, première chrétienne, Marie fait corps avec les apôtres et les disciples de son Fils Jésus lors de la descente de l’Esprit Saint à la Pentecôte, dans la chambre haute, le Cénacle.

Marie, Basilique de la Dormition à Jérusalem

Femme prophète, Marie transmet aux apôtres et aux évangélistes, les secrets de l’avènement de son Fils en son cœur et en son corps. Sans son concourt, saint Luc n’aurait pas pu écrire les événements de l’enfance de Jésus.

Femme non possessive, tournée vers son Fils, Marie oriente l’humanité vers le seul Sauveur, le seul médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus : « Faites tout ce qu’il vous dira ».

Femme d’espérance, Marie prépare le retour de son Fils Jésus à la fin des temps.

Sa maternité spirituelle se déploie dans l’intercession auprès de son Fils. En priant elle touche le cœur de Dieu ; en touchant le cœur de Dieu, elle marque le cours de l’histoire, car Dieu seul en est le maître.

Icône de Marie, Basilique de la Nativité, Bethléem

Demandons à Dieu la grâce d’aimer Jésus comme Marie l’a aimé et d’aimer Marie comme son fils Jésus l’a aimé.

Nous manquons de mots humains pour dire la beauté et la grandeur des merveilles accomplies par Dieu sur l’intercession de la Vierge Marie.

C’est pourquoi nous faisons appel à une multitude de vocables qui n’épuisent pas le mystère de l’œuvre accomplie par Marie en notre faveur. Prions pour notre Église à La Réunion, île mariale, que la Mère de Dieu chérit et protège.

 

                Monastère des moniales dominicaines (Saint-Denis/La Réunion), mai 2020

                                                            Fr. Manuel Rivero O.P.

 




Homélie de la messe télévisée de ce 5° Dimanche de Pâques (Jn 14,1-12 ; P. Sébastien Vaast S.J.).

Paumés. Nous voyons que les disciples sont complètement paumés. Et encore, ils n’ont pas touché le fond car le pire reste à venir, puisque nous sommes à quelques heures de l’arrestation de Jésus. Ils ressentent ce que nous nous ressentons quand nous devons laisser partir un proche, un être cher… Quand nous sommes remplis d’interrogation, de peur, d’anxiété…

Et Jésus a bien senti que les disciples étaient inquiets puisqu’il commence par leur dire « Ne soyez donc pas bouleversés ». Oui les disciples sont complètement désemparés… On peut les comprendre, eux qui avaient laissé leur cœur s’attendrir par Jésus, eux qui s’étaient attaché à lui…  Ce que Jésus veut leur dire leur parait totalement incompréhensible. Et Thomas, le jumeau, celui qui nous ressemble ose dire son incompréhension sans chercher à la cacher : « Seigneur, on sait même pas où tu vas ; comment on pourrait connaitre le chemin ? ». Cette réaction de Thomas nous touche. Et elle rejoint nos propres doutes et interrogations. Oui, les disciples sont bien comme nous devant la promesse de Jésus. Une promesse difficile à recevoir pour celui qui souffre, qui n’a plus d’espoir, qui est seul et qui ne comprend pas.

Cette page d’Evangile peut, nous aussi, nous laisser déboussolés aujourd’hui, et nous faire nous poser beaucoup de questions… Par exemple, quand Jésus dit « Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure ». Qu’est-ce que ça peut vouloir dire ?

De même quand Jésus dit : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie (…) Personne ne va vers le Père sans passer par moi ». Est-ce que ça veut dire que seuls ses disciples iront au ciel ?

Moi aussi je suis perdu, je ne comprends pas, je suis comme mon jumeau Thomas. Et devant cet enseignement de Jésus je suis déconcerté comme les disciples. Alors quand on est perdu, déboussolé, angoissé, une seule solution : revenir à l’école du maître et tenter de rentrer dans sa logique, dans ses pensées car « mes pensées ne sont pas vos pensées, dit le Seigneur, et mes chemins ne sont pas vos chemins ».

Et la seule pensée, la seule logique de Jésus, c’est celle de l’Amour…

Nous savons que nous n’aurons jamais fini d’apprendre jusqu’où va l’amour, et particulièrement l’amour tel que Jésus l’a manifesté tout au long de sa vie…

Alors, cela nous invite nous, disciples du XXIème siècle, à revenir sans cesse à ce qu’a dit et fait Jésus, à constamment méditer ses paroles et contempler sa vie. Car Jésus est habité par un seul raisonnement : celui de l’Amour. Il nous dit une seule chose : Dieu est Amour. Il fait une seule chose : nous montrer son Amour. Il nous donne un seul commandement : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. ». Il nous laisse un seul signe : « A ceci tous reconnaitront que vous êtes mes disciples, à l’amour que vous aurez les uns pour les autres. »

Jésus qui vient de Dieu et qui retourne à Dieu, connaît la profondeur du cœur du Père. Et cet amour du Père qu’il porte pleinement en lui, lui permet déjà de voir plus loin que sa Passion et que sa mort. Grâce à cet amour il est déjà capable d’annoncer son retour après les évènements douloureux qu’il va vivre : « Quand je serai allé, je reviendrai vous prendre avec moi ». Promesse d’un futur…

Il sait que dans ce cœur de Père il y a toujours de la place, c’est pourquoi Jésus nous invite à une très grande et paisible confiance… « Quand je serai allé, je reviendrai vous prendre avec moi ». Cette parole nous promet une place auprès du bon Dieu. Elle sème en nous espérance et consolation, surtout chez ceux qui ont le sentiment de ne pas trouver leur place en ce monde.

Et pour ne pas laisser ses disciples perdus et désemparés, Jésus leur donne 3 mots, 3 clés : chemin, vérité, Vie. Au moment où les disciples sont bouleversés, ces 3 mots-clés sont pour eux, comme pour nous aujourd’hui, révélateurs de l’identité de Jésus, et message d’espérance pour tous. Ces 3 mots-clés sont sa signature et résument tout son témoignage d’amour : Jésus est le chemin qui conduit vers Dieu ; il est la vérité qu’est Dieu ; il est la vie de Dieu, et cette vie il nous la donne.

Chemin, Vérité, Vie, le programme de toute une existence.

Dit autrement, si Jésus était une fleur, l’amour en serait le cœur, et ces 3 mots-clés en seraient les pétales.

A tous ceux qui reconnaissent qu’ils ne savent pas aimer ou se laisser aimer, Jésus dit : je suis le chemin. À tous ceux qui craignent de se tromper en choisissant l’amour, Jésus dit : je suis la vérité. À tous ceux qui s’inquiètent que l’amour puisse ne pas avoir le dernier mot, même sur la mort, Jésus dit : je suis la vie. À tous ceux qui croient que le paradis ce n’est pas pour eux, Jésus dit : je vais vous préparer une place et je reviendrai vous prendre avec moi. À tous ceux qui doutent que leur foi puisse changer le monde, Jésus dit : celui qui croit en moi accomplira des œuvres encore plus grandes que moi.

Que ces 3 mots-clés du maître : Je suis le chemin, la vérité et la vie, nous permettent de faire l’expérience de l’amour de Dieu dans nos vies. L’expérience d’un Dieu qui nous a tout donné en son Fils. Ainsi nous pourrons passer, de la peur à la confiance, de la désespérance à la joie, et de la mort à la Résurrection. Amen

                                                                                                           P. Sébastien VAAST




En mai, le Pape François invite à prier pour les diacres…

Ce mardi 5 mai 2020, le Pape François a invité à prier pour les diacres :

« Les diacres ne sont pas des prêtres de seconde catégorie. Ils font partie du clergé et vivent leur vocation en famille et avec la famille. Ils sont consacrés au service des pauvres qui portent sur eux le visage du Christ souffrant. Ils sont les gardiens du service de l’Eglise.

Prions pour que les diacres, fidèles à leur charisme au service de la Parole et des pauvres, soient un signe vivifiant pour toute l’Eglise. »

 

Pour accéder à la vidéo où le Pape François exprime cette prière, cliquer sur le lien suivant :

https://www.vaticannews.va/fr/pape/news/2020-05/intention-de-priere-pape-francois-mois-de-mai-diacre.html




 » Le pape François, avocat de la dignité sacrée des personnes détenues  » (Fr Manuel Rivero O.P.)

Un investissement exceptionnel

Rarement dans l’histoire de l’Église, un pape s’est autant investi dans l’évangélisation des personnes détenues comme le fait le pape François. Il se rend dans les prisons de Rome, d’Italie, du Mexique et du Chili. Il aime les rencontrer, hommes et femmes, pour les écouter, leur apporter la Parole de Dieu, défendre leur dignité sacrée et leurs droits, leur laver les pieds, partager leur repas[1], leur ouvrir un chemin d’espérance : « ‘Courage’. Ce mot vient du cœur. Courage, parce que vous êtes dans le cœur de Dieu, vous êtes précieux à ses yeux, et même si vous vous sentez perdus et indignes, ne perdez pas courage. (…) Ne vous laissez jamais emprisonner dans la cellule sombre d’un cœur sans espérance, ne cédez pas à la résignation. Dieu est plus grand que tout problème, et il vous attend pour vous aimer. Mettez-vous devant le Crucifix, sous le regard de Jésus »[2].

La croix

La croix et le chapelet sont très demandés par les personnes détenues. Prier devant le Crucifix leur donne d’entrer dans le cœur de Jésus qui manifeste l’amour du Père pour l’humanité, jusqu’au supplice de la croix et la mort. Le chapelet comporte une croix, avec laquelle commence et finit la méditation des mystères du Rosaire. Le pape François prêche le mystère de la croix de Jésus. La croix dit l’amour libérateur de Dieu. La croix exprime l’amour de Dieu, sans domination ni calcul. En prison, comme à l’extérieur des murs, la libération de l’homme passe par l’amour et le pardon qui représente un don par-dessus tout : par-don : « L’amour vrai est la vraie liberté. Il rend libre, même en prison si l’on est faible et limité »[3]. L’ego rend prisonnier, prisonnier de soi-même. Le pape aime citer dans ses enseignements le théologien allemand Romano Guardini (1968), pour qui la libération de l’homme passe par « l’ancrage sur quelqu’un de plus grand que lui-même ». Pour y parvenir, l’homme doit s’appuyer sur Dieu, pour vaincre le mal par le bien, à l’exemple de Jésus en croix.

En traversant la porte des prisons, il avoue se demander : « Pourquoi eux et pas moi ? »[4]Il aurait pu se retrouver en prison, mais la miséricorde de Dieu l’en a libéré et il ne se considère pas meilleur que ceux qui sont en prison : « Nous faisons tous des erreurs dans la vie et nous sommes tous pécheurs »[5]. Sa devise épiscopale à Buenos Aires : « Miserando atque aligendo »[6](ayant pitié de lui, il le choisit) qui trouve son origine dans la vocation de Matthieu, le publicain, manifeste l’expérience de la miséricorde de Dieu par le pape François. Il raconte sa confession le 21 septembre 1953 au père Carlos Duarte Ibarra : « Je me suis senti accueilli par la miséricorde de Dieu en me confessant à lui ». La honte lui apparaît à la suite des enseignements de saint Ignace de Loyola, une grâce à demander à Dieu, car elle fait passer le pécheur de la culpabilité, qui enferme, au pardon qui libère.

Amour de Dieu pour les personnes détenues

Dans la prison San Vittore de Milan, le pape avait déclaré aux détenus le 25 mars 2017 : « Le Seigneur aime autant vous que moi, le même Jésus est en vous et en moi[7]. (…) Je me sens chez moi parmi vous » (…) Vous êtes le cœur de Jésus blessé ».

Le pape recommande aux chrétiens de pratiquer des œuvres de miséricorde en allant visiter les détenus, en rappelant l’importance des gestes comme le sourire, la poignée de main … Ces petites attentions peuvent illuminer les visages des personnes détenues sur lesquels coulent souvent beaucoup de larmes : « Combien de larmes ai-je vu couler sur les joues de prisonniers qui n’avaient peut-être jamais pleuré de leur vie ; et ceci, seulement parce qu’ils se sont sentis accueillis et aimés[8] ».

Le pape invite les chrétiens à ne pas juger les détenus. Qui connaît les souffrances et le cœur de l’homme ? Il est juste de punir ceux qui ont commis des crimes, mais le plus important pour les croyants est de ne pas « se laver les mains trop facilement affirmant qu’ils se sont trompés. Un chrétien est plutôt appelé à les prendre en charge, pour que celui qui s’est trompé comprenne le mal commis et rentre en lui-même. (…) Que personne, donc, ne pointe le doigt contre quelqu’un [9] ».

Le pape François parle en mystique qui a goûté la douceur du Christ Jésus : « Dieu ne force pas la porte, il demande la permission d’entrer[10] ». C’est Jésus qui prend l’initiative de rencontrer l’humanité : « La vie de Jésus, surtout dans les trois dernières années de son ministère public, a été une rencontre incessante avec les personnes[11]. »

Proche des détenus

L’ambiance des prisons n’a rien de réjouissant. Tout au contraire, les personnes détenues en parlent comme d’un lieu sans vie, un parfum de mort, une sorte de cimetière, sans liberté, oppressant, stressant. Pourtant le pape François déclare se sentir à l’aise dans les bâtiments des prisons. Il se dit proche de ceux qui y sont incarcérés et de ceux qui y travaillent. Il est resté fidèle aux liens créés avec des détenus d’une prison de Buenos Aires auxquels il téléphone, le dimanche, tous les quinze jours[12].

 

En rentrant en prison, la personne perd la liberté mais non sa dignité : « La prison est le lieu de la peine dans la double signification de punition et de souffrance, et elle nécessite beaucoup d’attention et d’humanité. C’est un lieu où tous, Police pénitentiaire, chapelains, éducateurs et bénévoles, sont appelés à la difficile tâche de soigner les blessures, de ceux qui, à cause des erreurs qu’ils ont commises, se retrouvent privés de leur liberté personnelle. Il est connu qu’une bonne collaboration entre les différents services dans la prison permet une action d’un grand soutien pour la rééducation des détenus. (…) Personne ne peut condamner l’autre pour les erreurs qu’il a commises, et encore moins infliger des souffrances en offensant la dignité humaine. Les prisons ont besoin d’être toujours plus humanisées. (…) Pour la société, les détenus sont des individus qui dérangent. Ils sont un rebut, un poids. C’est douloureux, mais l’inconscient collectif nous conduit là. (…) Mais l’expérience montre que la prison, avec l’aide du personnel pénitentiaire peut devenir un lieu de rachat, de résurrection et de changement de vie : et tout ceci est possible à travers des parcours de foi, de travail et de formation professionnelle[13] ».

Le pape connaît la puissance des mots : « Soyez des personnes détenues : le substantif doit passer toujours avant l’adjectif, la dignité humaine doit toujours précéder et éclairer les mesures de détention[14] ».

Visiter les prisonniers

Le pape, successeur de saint Pierre qui a subi la prison à Rome, oriente l’Église vers les prisons pour mettre en pratique l’enseignement de Jésus qui s’identifie aux personnes détenues : « J’étais en prison et vous êtes venus me voir » (Mt 25,36). Il rappelle cet événement pour sensibiliser les chrétiens au monde de la prison : « Et n’oublions pas que Jésus et les apôtres ont fait l’expérience de la prison. (…) Et saint Pierre et saint Paul aussi ont été en prison (cf. Ac 12,5 ; Ph 1, 12-17). Dimanche dernier, qui était le dimanche du Jubilé des détenus, dans l’après-midi, est venu me trouver un groupe de détenus de Padoue. Je leur ai demandé ce qu’ils allaient faire le lendemain, avant de rentrer à Padoue. Ils m’ont dit : « Nous irons à la prison Mamertine pour partager l’expérience de saint Paul ». C’est beau, entendre cela m’a fait du bien. Ces détenus voulaient trouver Paul prisonnier. La page des Actes des apôtres où est racontée la prison de Paul est émouvante : il se sentait seul et désirait que quelques-uns de ses amis lui rendent visite (cf. 2 Tm 4, 9-15). Il se sentait seul parce que la grande majorité l’avait laissé seul … le grand Paul[15] ».

Confucius (479 av. J.-C), le grand philosophe chinois, pensait que l’empereur ressemblait à l’étoile polaire qui ne bouge pas, et pourtant tout le monde agit par rapport à elle. Ce penseur humaniste exigeait des responsables politiques la vertu car ils sont regardés et imités par le peuple ; d’où l’importance de leur exemple.

Le pape François oriente l’Église vers la miséricorde envers les personnes détenues par son exemple. Il ne peut pas exercer un ministère d’aumônier de prison, mais il suscite l’évangélisation des prisons par sa parole, ses visites et ses gestes prophétiques et symboliques.

Le pape pousse l’Église à « sortir vers les périphéries ». Les chrétiens sont souvent interpellés : « D’où parles-tu ? » Le souverain pontife qui réside au Vatican tient à parler dans les prisons et depuis les prisons, entouré de ses frères et de ses sœurs détenus.

En prison, les hommes et les femmes privés de liberté redoutent l’oubli de leurs proches et de la société qui les a condamnés. Le pape agit en avocat qui défend la dignité inaliénable des personnes en détention. À l’image des avocats, non seulement il plaide en faveur des détenus mais il prend la parole en leur nom. Ils ne peuvent pas crier leurs souffrances dans les moyens de communication sociale ni dénoncer des abus de pouvoir. Le pape le fait pour eux et en leur nom, au nom de Jésus-Christ. À l’occasion de l’Année de la Miséricorde, le pape avait demandé un geste de clémence pour les détenus au cours de l’Angélus du 6 novembre 2016, place Saint-Pierre[16].

Dieu accomplit des merveilles

Dans ses prises de parole, le pape prêche la dignité sacrée des personnes détenues et l’amour de Dieu à leur égard : « Ne perdez pas courage (…) vous êtes importants pour Dieu qui veut accomplir des merveilles en vous[17] ».

En prison, comme à l’extérieur des murs, l’homme risque de devenir prisonnier de lui-même, esclave de ses passions, victime de ses propres mensonges. En prison, comme à l’extérieur des murs, l’homme peut faire l’expérience de la liberté, de l’amour et du bonheur.

Le père Lataste (1832-1869)[18], dominicain, apôtre des prisons, a découvert les merveilles de Dieu dans le cœur des femmes détenues dans la prison de Cadillac (Gironde), à la suite de sa prédication de la miséricorde du Christ et à une nuit d’adoration: « J’ai vu des merveilles ! J’ai vu des merveilles !  Ah ! Ce que j’ai vu ? J’ai vu cette prison, objet de tristesse et d’effroi pour les hommes, transformée cette nuit en un lieu de délices, en un séjour de gloire et de bonheur ! Je l’ai vu, grand Dieu, ce Dieu de toute gloire et de toute pureté (…) passer toute la nuit comme un Père, comme un ami, au milieu de pauvres femmes et de pauvres filles que la société dédaigne et dont les hommes ne veulent pas. (…) Il a lavé leurs souillures, il a pansé leurs plaies, il a guéri leur lèpre, il leur a rendu leur antique beauté, leur antique innocence ; il s’est fait prisonnier au milieu des prisonnières pour les guérir, les consoler et les aimer. Oh ! Merveille ! Merveille ! » (Sermon 202). Moments de fulguration qui illumineront à jamais sa mission.

Il avait été envoyé par ses supérieurs dominicains pour prêcher aux femmes de la prison de force de Cadillac, près de Bordeaux, dans le sud de la France, il s’y était rendu, le cœur serré, avec « la pensée que ce serait sans doute inutile. »

En voyant ces femmes plongées dans des conditions misérables dans une prison sordide, son premier mouvement avait été de reculer. Mais le père Lataste s’était repris pour dire : « Mes chères sœurs ».

Mais ces femmes au visage fermé s’ouvrirent à la grâce, se relevant « à l’image des fleurs qui se relèvent fraîches après la pluie ».

Sainte Catherine de Sienne (1380), la grande mystique dominicaine, avait contemplé les merveilles de Dieu dans l’oraison. Le père Lataste a perçu les merveilles de Dieu dans le cœur des femmes détenues qui adoraient le Saint-Sacrement au point d’en devenir rayonnantes.

Conversion culturelle

Évêque de Rome, le pape a pour mission de conduire son diocèse et l’Église catholique dans l’esprit de l’Évangile. Annoncer Jésus-Christ, sanctifier par les sacrements et gouverner le Peuple de Dieu constituent les trois missions des évêques. Les moyens financiers restent bien limités par rapport aux besoins de l’humanité. Mais le pape compte sur la grâce du Christ ressuscité et sur la puissance de la communication qui façonne l’opinion publique, les lois et les pratiques. Il vise la conversion culturelle[19]des mentalités pour passer de la peur et de l’indifférence à la fraternité et à la proximité.

L’étymologie du mot « pontife » (faire des ponts) montre le sens de sa mission. Le pape s’évertue à créer des ponts entre le monde à l’intérieur des prisons et le monde de l’extérieur, car l’humanité est une et l’Église aussi. L’Église qui vit dans les prisons ne fait qu’un seul corps, le Corps du Christ, avec l’Église de l’extérieur. Dans ses prises de parole à Rome comme dans ses voyages apostoliques, le pape relie les hommes libres et ceux qui ont été privés de liberté, les condamnés et ceux qui jouissent de la reconnaissance de tous leurs droits civiques. Le pape bâtit des ponts entre les différentes personnes concernées par la prison : magistrats, employés de l’administration pénitentiaire et des services médicaux et éducatifs, les personnes détenues et leurs familles, les aumôniers et les intervenants bénévoles de l’Église …

Le pape exprime sa proximité envers les détenus en parole et en actes. Il se plaît à partager leur repas lors des visites aux prisons. Il les écoute. Les familles ont aussi accès au pape. Les enfants des détenus sont près de lui. Ah ! Les enfants des parents en prison m’ont toujours impressionné, aussi bien en France métropolitaine, qu’en Haïti et à La Réunion. Comment ne pas être ému devant un enfant qui vous fait part à voix basse de l’emprisonnement de son père ou de sa mère ou des deux ! L’enfant participe à la prison des parents. Il y pense tout le temps.

 

Chemin de croix du Vendredi saint 2020

 

Lors du Chemin de croix du Vendredi saint du 10 avril 2020[20], il a été rappelé à l’Église que la famille rentre en prison quand un de ses membres y est condamné. Le pape François rencontre ces enfants des mères en prison ou les familles des détenus quand cela s’avère possible.

En choisissant des membres de la prison de Padoue pour rédiger le Chemin de croix du Vendredi saint 2020, le pape a donné la parole non seulement à l’aumônier et à l’équipe de la pastorale mais aussi aux personnes détenues, aux familles des victimes, aux surveillants, éducateurs, magistrat et à un détenu reconnu innocent après avoir purgé une longue et dure peine de prison… L’aumônier de la prison, le père Marco Pozza, théologien et écrivain, a œuvré avec la journaliste Tatiana Mario pour aboutir à un Chemin de croix riche de quatorze histoires des personnes concernées par la justice : « J’ai choisi la prison dans sa totalité, pour faire en sorte que, cette fois-ci encore, ce soit les plus petits qui nous donnent le rythme. Avec Don Marco Pozza, que vous connaissez bien, nous avons pensé les méditations comme l’œuvre d’un chœur, en unissant les différents visages qui composent le monde des prisons. » (Lettre du pape François à Monsieur le directeur Paolo Possamai. ZENIT, le 10 mars 2020).

Les familles des détenus

L’approche pastorale du pape comprend les familles. Les personnes détenues ont besoin du soutien des familles. En particulier, les mères de famille en prison ont besoin de l’amour des enfants. L’enfant peut apporter un grand réconfort aux parents en détention. Les parents peuvent soutenir leurs enfants depuis la détention. Le pape François aide les familles à grandir dans l’amour et l’espérance. Lors de sa visite à la prison pour femmes, Saint Joaquin à Santiago du Chili, le 16 janvier 2018, le pape a béni les enfants des femmes détenues. Il a exhorté l’assemblée à enlever les étiquettes et à dépasser le fatalisme : « abandonner la logique simpliste de diviser la réalité entre bons et mauvais, pour entrer dans cette autre dynamique à même d’assumer la fragilité, les limites y compris le péché, pour nous aider à aller de l’avant » ; « Aujourd’hui, vous vous trouvez devant un défi très semblable (à celui de la maternité) : il s’agit aussi de donner la vie. Aujourd’hui, on vous demande d’engendrer l’avenir… Vous, les femmes, vous avez une capacité incroyable de pouvoir vous adapter aux situations et d’aller de l’avant » ; « lutter contre tout type de carcan, d’étiquette selon lesquels on ne peut pas changer, ou que cela ne vaut pas la peine, ou que tout revient au même[21] ». Quand on achète des vêtements, nous enlevons les étiquettes. Il en va de même dans les relations sociales.

Le pape encourage les chrétiens à ne pas se laisser « voler l’espérance[22] ».

En prison, les femmes et les hommes ont un défi à relever : engendrer l’avenir. Cervantes (1616), l’auteur du Don Quijote de la Mancha, disait que « nous sommes fils de nos actes ». Des actes répréhensibles conduisent en prison. Des actes de foi et d’amour conduisent à la liberté. Fils de nos actes mauvais, nous pouvons renaître aussi à une vie nouvelle, comme le disait Jésus à Nicodème : « Il vous fait naître d’en haut » (Jn 3, 7). Cette nouvelle naissance en prison est rendue possible par la foi en Jésus et par l’aide des personnes aimantes qui se mettent au service des détenus.

 

Les enfants des détenus

En tant qu’aumônier de prison, je constate la joie des enfants qui rencontrent leurs parents et la consolation des parents qui voient leurs enfants. Je pense à cette petite fille, habillée en blanc pour sa Première communion, et qui attendait son père un dimanche matin sur le parking de la prison. Il avait obtenu une permission pour la journée afin de participer à la messe de la Première communion de sa fille. Celle-ci était rayonnante en attendant la sortie de son père. Les rencontres des détenus avec leurs enfants au parloir des prisons aident à supporter l’épreuve quotidienne. Il arrive aussi que les détenus ne veuillent pas que leurs enfants les voient en prison pour qu’ils ne soient pas traumatisés par ce souvenir négatif. Parfois, l’un des conjoints fait tout son possible pour punir l’autre conjoint, le privant de la présence des enfants. Le pape François rencontre les familles pour les fortifier dans la foi et l’espérance.

Différents moyens de communication

Le pape transmet ses messages de plusieurs manières : audiences au Vatican, rencontres avec les groupes représentants la justice et les prisons, visites pastorales dans son diocèse de Rome, en Italie et à l’étranger (Mexique, Chili), lettres et messages écrits, catéchèses, communications téléphoniques et vidéos, comme il l’a fait avec un groupe d’étudiants de Buenos Aires qui accompagne des personnes détenues … Le pape a encouragé le projet de ces étudiants argentins en faveur de la réinsertion par la musique sous l’égide de l’université de Buenos Aires[23].

Hypocrisie

Le pape dénonce « une certaine hypocrisie[24] » dans le regard porté sur les personnes détenues réduites à leur faute sans possibilité de changement[25]. En tant qu’aumônier de prison, je constate aussi que d’aucuns à l’intérieur et à l’extérieur de la prison jugent et méprisent les personnes détenues, afin de se valoriser de manière injuste, car tout le monde commet des fautes. Ce mépris apparaît dans le langage : « ces gens ! » ;  « ils ont beaucoup de choses à se faire pardonner » ; « racaille ». Le pape François prêche la Bonne Nouvelle du Salut pour tous les hommes car ils sont tous pécheurs. La Première épître de saint Jean dénonce l’hypocrisie de celui qui se dit juste, sans péché, et qui fait de Dieu un menteur[26]. Pour les chrétiens, les hommes sont des condamnés à mort à cause de leur péché, mais amnistiés par la miséricorde du Christ qui a cloué l’acte de notre condamnation à la Croix[27]pour nous rendre libres et justes. Les hommes ne sont pas justes. Ils sont justifiés, ajustés à Dieu par le seul Juste, Jésus, le Fils bien-aimé du Père. L’Église n’est pas composée de purs, mais des pécheurs justifiés par le Sang de Jésus : « L’Église n’est pas une communauté de parfaits mais de disciples en chemin, qui suivent le Seigneur parce qu’ils reconnaissent qu’ils sont pécheurs et qu’ils ont besoin de pardon. La vie chrétienne est donc une école d’humilité qui nous ouvre à la grâce. (…) J’ai entendu une fois ce beau dicton : ‘Il n’y a pas de saint sans passé et il n’y a pas de pécheur sans avenir’[28] ».

Pour le pape François, les prisons sont un « symptôme » de la société et de « la culture du rejet[29] ». Au Mexique, le pape a rappelé que « le problème de la sécurité ne se résout pas par le seul emprisonnement, mais il est un appel à intervenir pour faire face aux causes structurelles et culturelles de l’insécurité qui touchent tout le tissu social[30] ».

Le père Carré, dominicain, avait intitulé l’un de ses livres : « Chaque jour, je commence ». Cette devise dit bien le sens de la vie chrétienne qui n’est pas écrite à l’avance comme un destin inexorable, mais qui ressemble à une page blanche à écrire chaque matin ou bien à un chemin à parcourir, comme le disait le poète castillan, Antonio Machado : « Voyageur, il n’y a pas de chemin, on fait le chemin en marchant ». Lors du Jubilé des prisonniers, le pape François a encouragé à ne pas s’enfermer dans le passé : « L’histoire qui commence aujourd’hui, et qui regarde l’avenir, est encore toute à écrire, avec la grâce de Dieu et avec votre responsabilité personnelle. Ne tombons pas dans la tentation de penser de ne pouvoir être pardonné[31] ». Cela me fait penser à une parole d’espérance qu’un surveillant de prison dit aux détenus dans « le quartier des arrivants » : « Ici, tout commence ». Ce n’est pas la fin mais la possibilité d’une vie nouvelle.

En célébrant le Jubilé de la Miséricorde, le pape François a exhorté les détenus à se tourner vers le Père : « Dieu espère ! Sa miséricorde ne le laisse pas tranquille »[32].

Communication symbolique : cristal, chaîne rompue , la Porte et le lavement des pieds

Son langage passe aussi par les symboles, comme il l’a manifesté en offrant un crucifix en cristal aux membres d’une prison au Mexique : « Le Christ sur la croix est la plus grande fragilité de l’humanité. Pourtant, avec cette fragilité, il nous sauve[33] ». Par ailleurs, la libération de l’homme a été symbolisée par une chaîne rompue : « Aujourd’hui, nous vénérons la Vierge Marie dans cette statue qui la représente comme la Mère qui porte dans ses bras Jésus avec une chaîne rompue, la chaîne de l’esclave et de la détention[34] ». La traversée de la Porte de la Miséricorde a été aussi une étape marquante, non seulement à Rome dans la basilique Saint-Jean-du-Latran, la cathédrale des papes, mais sur les cinq continents où les croyants ont traversé les différentes portes de la miséricorde prévues à cet effet. Le Jubilé de la Miséricorde a été inauguré le 8 décembre 2015. Dans les prisons, les détenus chrétiens ont pu vivre aussi cette démarche en signe de leur foi dans « l’amour du Père céleste, qui recrée, transforme et redonne vie » (homélie du pape François le 13 décembre 2015)[35].

Le geste du lavement des pieds, le Jeudi saint, parle de lui-même. Le jeudi 29 mars 2018, le pape a lavé les pieds de douze détenus loin des caméras : « Je suis un pécheur, mais je viens à vous comme un ambassadeur du Christ[36] ». Parmi eux, il y avait deux musulmans, un orthodoxe et un bouddhiste. Ce choix montre le souci du pape en faveur de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux.

Jubilé de la Miséricorde et Journée Mondiale des Pauvres

Le « Jubilé de la miséricorde » et le lancement de la « Journée mondiale des pauvres » ont marqué l’Église et la société civile sensibilisée ainsi à la souffrance des personnes détenues : « Les pauvres nous évangélisent, en nous aidant à découvrir chaque jour la beauté de l’Évangile[37] » ; « Si aux yeux du monde, [les pauvres] ont peu de valeur, ce sont eux qui nous ouvrent le chemin du ciel, ils sont nos « passeports pour le paradis » … notre véritable richesse[38] » ; « personne ne peut penser être inutile », a-t-il déclaré dans son homélie au cours de la messe pour la première Journée mondiale des pauvres.

Réinsertion possible

Face à la culture du « jetable », le pape propose l’espérance dans la réinsertion et la miséricorde : « En Dieu, il y a toujours une place pour recommencer, pour être consolé et réhabilité par la miséricorde qui pardonne[39]. À la sortie de prison, le détenu peut devenir témoin et prophète[40]. Les blessés peuvent agir en « guérisseurs » ayant fait l’expérience de la souffrance et de l’ ‘enfer’ : « blessés-guérisseurs ». Dans son homélie du 22 mai 2015[41], le pape François parlait des trois regards de Jésus : celui de l’élection, celui du pardon et celui de la mission. L’apôtre Pierre a rencontré ces trois regards. Comme lui, chaque chrétien bénéficie de ces trois regards d’amour de Jésus. La personne détenue est appelée, pardonnée et envoyée comme témoin de la résurrection de Jésus.

« Recoudre ensemble l’Italie » était la devise choisie par la ville de Padoue, « Capitale européenne du volontariat 2020 ». Le pape François a relié cette démarche à la guérison des blessures et des déchirures physiques, psychologiques et spirituelles. À ce propos, je pense au prêtre de Marseille, Jean Arnaud (2000), qui appelait le Saint-Esprit « la couturière de l’Église », celui qui recoud les tissus déchirés pour qu’elle devienne un jour « la tunique sans couture » du Christ, dans l’unité de la foi et de l’amour.

Les journalistes rappellent aux responsables religieux qu’ils ne sont pas chargés de transmettre des croyances ni de faire de la catéchèse ; leur travail concerne les événements. « Les faits sont sacrés, les commentaires sont libres », dit une devise des journalistes. En créant des événements, le pape François rend possible la communication non seulement dans les médias de l’Église mais aussi et surtout dans les moyens de communication sociale de la société civile.

Dans la doctrine sociale de l’Église, nous avons un principe de progrès moral qui correspond à l’histoire humaine et à l’expérience de l’Église : « Que la charité d’aujourd’hui devienne la justice de demain. » L’Église s’est occupée des enfants des rues, sans possibilité d’aller à l’école. L’Église a pris soin des malades, sans moyens financiers. Aujourd’hui, l’État prend souvent en charge et l’école et les soins médicaux.

Contre la peine de mort

Le pape François plaide pour l’abolition de la peine de mort et pour des peines de prison qui ne détruisent pas l’espoir des personnes détenues : « Le commandement ‘tu ne tueras pas’ a une valeur absolue et concerne l’innocent comme le coupable… Même un criminel garde le droit inviolable à la vie[42] » ; « Pour que la peine soit féconde, elle doit avoir un horizon d’espérance[43] ». Le pape aspire ainsi à faire reculer la culture de la peur pour que celle de la paix avance[44].

Il demande à « repenser sérieusement l’emprisonnement à vie[45] ». Devant 11 000 surveillants pénitentiaires et des fonctionnaires des prisons, le pape a souligné l’importance de l’espérance pour le détenu : « La réclusion à perpétuité n’est pas la solution aux problèmes … parce que si l’on enferme l’espérance en cellule, il n’y a pas d’avenir pour la société[46] ». Il a exhorté aussi les pouvoirs publics à remédier à la surpopulation carcérale, comme il le disait aux surveillants de prison, car elle « fait grandir en chacun un sentiment de faiblesse, sinon d’épuisement. Quand les forces diminuent, la méfiance augmente. Il est essentiel de garantir des conditions de vie décentes, sinon les prisons deviendront des poudrières de colère, à la place de lieux de réinsertion[47] ».

La mission des surveillants

Les aumôniers de prison ne sont pas les aumôniers des surveillants qu’ils rencontrent quotidiennement et avec lesquels ils échangent de manière respectueuse et cordiale. Le pape tient à mettre en valeur leur travail qui n’est pas toujours compris, ni estimé, comme l’évoque l’utilisation du mot « maton » en argot. En prenant le contre-pied de cette mentalité, le pape leur a déclaré : « N’oubliez pas, s’il vous plaît, le bien que vous pouvez faire chaque jour. Votre comportement, vos attitudes, vos regards sont précieux[48] ».

Le pape a exprimé sa reconnaissance envers les surveillants : « Merci pour toutes les fois où vous vivez votre service non seulement comme une surveillance nécessaire, mais comme un soutien à celui qui est faible. Je sais que ce n’est pas facile, mais lorsque, en plus d’être gardiens de la sécurité, vous êtes une présence de proximité pour celui qui est tombé dans les filets du mal, vous devenez constructeurs de l’avenir. : vous posez les bases pour une cohabitation plus respectueuse et donc pour une société plus sûre[49] » ; «  Vous êtes ainsi appelés à être des ponts entre la prison et la société civile : par votre service, en exerçant une compassion juste, vous pouvez dépasser les peurs réciproques et le drame de l’indifférence. Merci.[50] »

Le philosophe français, Blaise Pascal (1662) a écrit : « Le propre de la puissance est de protéger[51] ». La puissance de l’homme se manifeste dans la protection de la vie. Le surveillant défend la vie des personnes détenues qui lui sont confiées. L’étymologie du mot « évêque », en grec, veut dire « surveillant », « veiller sur ». Le pape, évêque de Rome, veille sur l’Église. Le surveillant veille sur les personnes détenues. La force d’une civilisation, aussi bien que d’une personne, se manifeste dans la défense des faibles. Àce propos, il est bon de rappeler le préambule de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 : « La force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres[52] ».

Le pape François ne s’immisce pas dans les affaires juridiques des pays, mais il plaide pour un humanisme intégral et pour le bien commun.

Le code pénal français signale les trois buts des peines en prison : sanctionner le non-respect de la loi ; protéger la société et parfois le condamné lui-même et la réinsertion[53]. Le pape François rappelle sans cesse cette troisième finalité de la prison : la réinsertion dans la société. Il ne s’agit pas de torturer le condamné ni de l’abattre mais de lui rendre possible une nouvelle vie en société. Le pape évoque l’image de « la fenêtre ouverte[54] » pour réveiller l’espoir de réinsertion : « Une peine sans espérance ne sert pas, n’aide pas, elle provoque dans le cœur des sentiments de rancœur, bien souvent de vengeance et la personne qui sort est pire qu’en entrant[55].

Un avenir bouché risque de pousser au suicide. Pour réussir la réinsertion, tous les membres présents et agissant dans les prisons sont appelés à œuvrer ensemble, en synergie : la personne détenue doit faire un travail sur elle-même ; elle est responsable de sa propre libération ; les magistrats et les employés de l’administration pénitentiaire ainsi que les éducateurs et les psychologues, les membres de l’équipe de la pastorale, bref, tous gagnent à travailler de manière harmonieuse pour atteindre la cible de la réinsertion.

En France, l’administration pénitentiaire nomme un aumônier titulaire qui devient son interlocuteur pour le culte en question, sur proposition de l’aumônerie catholique nationale des prisons, à partir de la lettre de mission envoyée par l’évêque du diocèse. D’autres aumôniers, dits bénévoles, ainsi que des auxiliaires et des intervenants forment l’équipe de la pastorale. Le pape encourage ces équipes à porter l’Évangile : « Continuez avec le cœur qui écoute. Continuez, à vous charger des fardeaux des autres et à les porter dans la prière. Continuez, au contact avec la pauvreté que vous rencontrez, à voir vos pauvretés. C’est un bien, parce qu’il est essentiel de reconnaître, avant tout, que l’on a besoin de pardon. Alors ses propres misères deviennent des réceptacles de la miséricorde de Dieu : alors, de personne, l’on devient des témoins crédibles du pardon de Dieu. (…) Continuez alors, avec Jésus sous le signe de Jésus, qui vous appelle à être des semeurs de sa Parole (cf. Mt 13, 18-23), des chercheurs infatigables de Celui qui est perdu, des annonciateurs de la certitude que chacun est précieux pour Dieu, des pasteurs qui portent les brebis les plus faibles sur leurs épaules fragiles (cf. Lc 15, 4-10). Continuez, avec générosité et joie : par votre ministère, vous consolez le cœur de Dieu[56] ».

Le pape agit aussi en faveur des personnes détenues par sa prière dont il rappelle la puissance. Quand Pierre était en prison, la communauté chrétienne priait avec insistance (cf. Ac 12,5)[57].

Les membres des équipes de pastorale en prison avouent avec joie qu’ils reçoivent beaucoup de la part des personnes détenues, soit par des témoignages de repentir et de vérité, soit parce que les détenus mettent tout simplement à leur place ceux qui risqueraient de s’estimer justes. Le pape François a écrit dans son Exhortation post-synodale adressée aux jeunes, datée du 25 mars 2019 : « On apprend et mûrit beaucoup lorsqu’on ose entrer en contact avec la souffrance des autres. De plus, il y a chez les pauvres une sagesse cachée, et ils peuvent, avec des mots simples, nous aider à découvrir des valeurs que nous ne voyons pas[58] ».

Sagesse des détenus

Cet enseignement du pape correspond à l’expérience des intervenants catholiques en prison qui disent « recevoir plus qu’ils ne donnent ». Nombreux sont les témoignages reçus de cette sagesse des personnes détenues parfois jeunes et analphabètes. Je pense à deux exemples. Une femme détenue avait écrit un poème : « Je dirai toujours au Seigneur : Merci pour ta miséricorde qui a défait mes cordes ». Une autre fois, un jeune détenu est venu me poser des questions sur un mot rare que j’avais utilisé dans la prédication à la messe, « acédie », pour évoquer la perte du goût des choses spirituelles, le découragement, l’abandon de la prière … Il me dit : « Si j’ai bien compris, ‘acédie’ est le contraire d’‘assidu’ » ? Je lui ai répondu : « Tout à fait ! ». Les mots simples dont parle le pape !

Le pape François affectionne l’expression « fréquenter l’avenir », de l’écrivain italien Antonio Tabucchi (2000) : « Fréquenter l’avenir, c’est fréquenter cet horizon d’attente et fréquenter ce qui est en devenir dans l’Histoire. », dit le pape en commentant le livre du cardinal A. Bocos sur la vie consacrée[59].

L’expérience du confinement, à cause de la pandémie du coronavirus, fait toucher du doigt à l’ensemble de la population la souffrance de l’enfermement. Il est facile de demander de longues peines pour les infracteurs au risque de leur faire perdre le goût de l’effort, la confiance en eux-mêmes et la faculté de vivre en société après de longues années d’isolement.

Personnellement, j’ai connu des jeunes qui se sont suicidés, en partie à cause de la longueur de la peine. Par ailleurs, il convient de penser au coût d’une journée de prison, tous frais confondus, qui s’élève en moyenne en France à 100,00 euros par jour. Le contribuable paye ces frais, et il est en droit de s’attendre à une amélioration des personnes à la sortie de la prison, et non à voir des personnalités cassées ou des fauves.

La justice française s’efforce de réduire les mandats de dépôt en les remplaçant par des travaux d’intérêt général (TIG).

Justice restaurative

Le pape François a rappelé l’apport de la justice restaurative[60], lors de l’audience accordée aux membres du XXèmeCongrès mondial de l’association international de Droit Pénal le 15 novembre 2019[61] : « Nos sociétés sont appelées à avancer vers un modèle de justice fondé sur le dialogue, la rencontre, afin que, dans la mesure du possible, les liens affectés par le crime soient rétablis et le préjudice réparé. » ; « Je ne pense pas que ce soit une utopie, mais certainement un grand défi. Un défi que nous devons tous relever si nous voulons aborder les problèmes de notre coexistence civile de manière rationnelle, pacifique et démocratique. »

La justice restaurative repose sur le dialogue entre les infracteurs et les victimes, en présence des représentants de l’administration pénitentiaire, de la psychiatrie et de la société civile, car celle-ci est concernée par les infractions aux lois. Le but de ces rencontres, autour de six fois, entre infracteurs et victimes, est d’accorder la parole surtout aux victimes qui peuvent exprimer le ressenti et les conséquences des violences et des crimes bien au-delà des moments du délit. Les infracteurs, non concernés directement par des délits touchant aux victimes présentes, peuvent mieux prendre conscience de la gravité de leurs actes. La justice restaurative fait partie du droit français depuis le 15 août 2014.

À l’occasion de cette même audience sur le droit pénal, le pape a dénoncé la gravité des délits économiques qui ont à ses yeux « la gravité de crimes contre l’humanité » : « la macrodélinquance des entreprises », les conduites « écocides » contre l’écologie qui détruisent les écosystèmes, les « paradis fiscaux », la spéculation …

Par ailleurs, le pape François a signalé « l’usage impropre de la détention préventive » qui garde en prison pendant un temps excessif celui qui jouit, a priori, de la présomption d’innocence tant qu’il n’est pas condamné. Il a rappelé le pourcentage démesuré dans certains pays où les détenus en attente de jugement dépasse largement cinquante pour cent de la population carcérale.

Nous voyons comment l’action pastorale du pape François ne se cantonne pas à l’annonce explicite de l’Évangile et aux sacrements, mais comment elle comporte des enseignements sur la justice et la paix, qui relèvent de la doctrine sociale de l’Église.

                                                               Saint-Denis (La Réunion), le 4 mai 2020.

                                              Fr. Manuel Rivero O.P., aumônier de la prison de Domenjod.

 

 

 

[1]Cf. ZENIT, 25 mars 2017. Le pape a partagé avec les détenus de la prison San Vittore de Milan le repas préparé par eux-mêmes. Le menu était typiquement milanais : riz au safran, côtelette et frites, et comme dessert la « pana cotta ».

[2]Cf. ZENIT, 14 septembre 2019.

[3]Cf. ZENIT, 12 septembre 2018. Audience générale.

[4]Cf. ZENIT, 6 novembre 2016.

[5]Cf. Lettre du pape François aux détenus italiens de l’île de Gorgone (Toscane). Cf. ZENIT 24 juin 2019.  Cf. Le nom de Dieu est miséricordedu vaticaniste Andrea Tornielli sur le pape François. Voir ZENIT, 10 janvier 2016.

[6]Cf. Homélies de saint Bède le Vénérable sur saint Matthieu. Cf. Maison Sainte-Marthe . Miserando atqueeligendoJeudi 21 septembre 2017.http://www.vatican.va/content/francesco/fr/cotidie/2017/documents/papa-francesco-cotidie_20170921_miserando-atque-eligendo-fr.html

[7]Cf. ZENIT, 25 mars 2017.

[8]Cf. ZENIT, 9 novembre 2016.

[9]Cf. ZENIT, 9 novembre 2016.

[10]Cf. https://fr.zenit.org/articles/dieu-ne-force-pas-la-porte-il-demande-la-permission-d-entrer/. Catéchèse sur la famille. 18 novembre 2015.

[11]Cf. ZENIT, 9 novembre 2016.

[12]Cf. ZENIT, 7 février 2019. Audience au personnel de la maison d’arrêt « Regina Coeli » de Rome le jeudi 7 février 2019.

[13]Cf. ZENIT, 7 février 2019.

[14]Cf. ZENIT, 23 janvier 2017. Lettre du pape François au centre de détentions « Due Palazzi » de Padoue (Italie).

[15]Cf. ZENIT, le 9 novembre 2016.

[16]Cf. ZENIT, le 6 novembre 2016.

[17]Cf. ZENIT, 14 septembre 2019.

[18]Monique Longueira. Le père Jean-Joseph Lataste, dominicain, apôtre des prisons.Paris. Nouvelle Cité. 2012. P. 59.Jean-Marie Gueulette, « Ces femmes qui étaient mes sœurs … », Vie du père Lataste, apôtre des prisons (1832-1869),Paris. Cerf. 2012.

 

[19]Cf. ZENIT, 23 janvier 2017. Lettre du pape François au centre de détention « Due Palazzi » de Padoue (Italie).

[20]Cf. http://www.vatican.va/news_services/liturgy/2020/documents/ns_lit_doc_20200410_via-crucis-meditazioni_fr.html

[21]Cf. ZENIT, 16 janvier 2018.

[22]Cf. ZENIT, 17 janvier 2017.

[23]Cf. ZENIT, 24 août 2017.

[24]Cf. ZENIT, 9 novembre 2016.

[25]Cf. ZENIT, 6 novembre 2016. Le pape cite 1 Jn 3,20 : « Dieu est plus grand que notre cœur » ; et Rm 2, 1-11, sur le jugement des autres et la justice.

[26]Cf. 1 Jun 1, 19.

[27]Cf. Colossiens 2,14.

[28]Cf. ZENIT, 13 avril 2016. Catéchèse.

[29]Cf. ZENIT, le 17 février 2016. Au Mexique.

[30]Cf. ZENIT, le 17 février 2016.

[31]Cf. ZENIT, 6 novembre 2016.

[32]Cf. ZENIT, 6 novembre 2016.

[33]Cf. ZENIT, le 17 février 2016. Au Mexique.

[34]Cf. ZENIT, 6 novembre 2016.

[35]Cf. ZENIT, le 14 décembre 2015.

[36]Cf. ZENIT, 14 juin 2018.

[37]Cf. ZENIT 14 juin 2018. Sur la Journée mondiale des pauvres du 18 novembre 2018.

[38]Messe du 19 novembre 2017 pour la première Journée mondiale des pauvres. Cf. ZENIT, 19 novembre 2017.

[39]Cf. ZENIT 23 janvier 2017. Lettre du pape François au centre de détention « Due Palazzi » de Padoue (Italie).

[40]Cf. ZENIT 17 février 2016. Voyage au Mexique, à Ciudad Juarez. Les détenus l’ont accueilli avec chants et de la musique.

[41]Cf. ZENIT, le 25 mai 2015.

[42]Cf. ZENIT, 22 février 2016. À l’occasion du congrès « Pour un monde sans la peine de mort », organisé à Rome le 22 février 2016 par la Communauté de Sant ‘Egidio, à la Chambre italienne des députés.

[43]Cf. ZENIT, 24 août 2017.

[44]Cf. ZENIT, 21 février 2016.

[45]Cf. ZENIT, le 18 novembre 2019.

[46]Cf. ZENIT, 14 septembre 2019.

[47]Cf. ZENIT, 14 septembre 2019.

[48]Cf. ZENIT, 14 septembre 2019.

[49]Cf. ZENIT, 14 septembre 2019.

[50]Cf. ZENIT, 14 septembre 2019.

[51]Blaise Pascal, Pensées diverses VI, Fragment n°5/5.

[52]Cf. https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19995395/index.html

[53]Cf. Article 130-1, créé par Loi n°2014-896 du 15 août 2014 – art. 1 : « Afin d’assurer la protection de la société, de prévenir la commission de nouvelles infractions et de restaurer l’équilibre social, dans le respect des intérêts de la victime, la peine a pour fonctions : 1° De sanctionner l’auteur de l’infraction ; 2° De favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion.

[54]Cf. ZENIT, 7 février 2019.

[55]Cf. ZENIT, 7 février 2019.

[56]Cf. ZENIT, 14 septembre 2019.

[57]Cf. ZENIT, 16 novembre 2015.

[58]Cf. https://fr.zenit.org/articles/le-christ-vit-texte-integral-de-lexhortation-apostolique/

[59]A. Bocos, Un relato del Espíritu. La vida consagrada postconciliar, 2 edición. Publicaciones Claretianas, Madrid, 2018. P. 104.

[60]Sur les principes de la justice restaurative : https://www.justicerestaurative.org/les-principes-de-la-justice-restaurative/

[61]Cf. ZENIT, le 18 novembre 2019.