24ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 18, 21-35) – Francis COUSIN)
« C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur.»
Attention à ne pas nous tromper dans l’interprétation de cette phrase.
Elle ne veut pas dire, comme on pourrait le croire au premier abord, que, si nous voulons être pardonné par Dieu, il faut que nous pardonnions nous aussi, et donc que le pardon que nous donnons est prioritaire (en ce sens qu’il est le premier) pour nous permettre d’être pardonné, et donc d’être sauvé.
Ce n’est pas ce que nous dit l’évangile.
Le pardon, celui que nous donnons, ne peut pas être une obligation nécessaire.
Dieu, qui est amour, nous laisse toujours libre !
Et puis, cette obligation nous donnerait comme une sorte d’avantage sur Dieu : « J’ai pardonné, donc tu dois me pardonner ».
Cela n’est pas possible … nous ne pouvons pas avoir ’’la main’’ sur Dieu.
Cela ressemblerait à un marchandage que nous ferions avec Dieu … ce qui ne peut se faire.
C’est une mauvaise interprétation de la parabole, car il ne faut pas oublier le début : le roi, c’est-à-dire Dieu, a commencé par donner son pardon, à remettre sa dette, une dette énorme, à son serviteur (qu’il nommera par la suite le serviteur méchant) … et ce qui est reproché à celui-ci est de ne pas avoir remis à son compagnon une dette de beaucoup inférieure à la sienne.
Ce serviteur n’a regardé que les faits : mon compagnon a une dette envers moi, donc il doit me rembourser ! Mais il ne l’a pas mise en relation avec sa propre dette annulée …
Comme toujours, Dieu est le premier à agir, et il nous demande de faire comme lui.
Il aime tout le monde, et comme il aime, il pardonne les fautes que ceux qui se reconnaissent pécheurs.
Cela demande de l’humilité de reconnaître ses fautes !
Et l’humilité nous permet de reconnaître que nous ne sommes pas meilleurs que les autres, ou que les autres ne sont pas moins bons que nous !
Se reconnaître pécheurs nous permet aussi de reconnaître que les autres peuvent aussi être pécheurs, tout comme nous, … et à leur pardonner.
Mais le pardon est une chose qui peut être difficile à faire.
Dans la vie courante, il arrive souvent, quand on bouscule quelqu’un, quand malencontreusement on lui marche sur les pieds, ou quand on passe devant lui, qu’on utilise simplement le mot « pardon ! », sans qu’on sache exactement si c’est une excuse ou une demande de pardon … D’ailleurs, on ne demande pas de réponse et la personne à laquelle on s’adresse n’en donne généralement pas non plus. C’est un pardon qui n’en est pas vraiment un, et qui ne ’’coûte’’ rien.
La plupart du temps, il faut se forcer pour demander (ou pour donner son) pardon … et il faut mettre une croix sur son orgueil … et se reconnaître humble …
Mais il arrive parfois (et c’est peut-être le plus souvent) que certains faits soient très difficiles à pardonner … et qu’ils soient même parfois qualifiés d’« impardonnables », comme les meurtres, les atteintes à la vie (physique, sociale, spirituelle …) par ceux qui les subissent, directement ou indirectement, … et même par le droit international, la presse, et tous ceux qui en ont connaissance …
Et pourtant, à la demande de Pierre de savoir s’il faut pardonner jusqu’à sept fois, Jésus nous dit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois. ».
Or le nombre sept, dans la Bible, représente la plénitude, la perfection. Pierre demandait donc s’il faut aller jusqu’à la perfection dans le pardon. Jésus lui, demande d’aller au-delà de la perfection, au-delà de la limite humaine, ce qui n’est possible que dans le surnaturel, dans ce qui est divin, donc seulement avec la grâce de Dieu. Le véritable pardon ne peut se faire qu’avec l’aide de Dieu.
Jésus, lui, est allé jusqu’au bout et il a demandé le pardon quand, humilié, bafoué, calomnié, outragé, « obéissant jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix » (Ph 2, 8), il demande à son Père : « Pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23,34).
Pour nous, quand le pardon devient difficile, on ne peut le demander (ou l‘accorder) qu’en demandant l’aide de Jésus.
Certains ont réussi à le faire … Pourquoi pas nous ?
Et si Jésus a pu dire : « C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Lc 15,7), on pourrait aussi ajouter, car cela me semble aussi vrai : « Et qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui est pardonné par celui à qui il a fait du tort … »
Seigneur Jésus,
tu nous invites à toujours pardonner …
mais bien souvent,
c’est au-dessus de nos forces,
car nous sommes humains,
trop fiers, pas assez humbles.
Donne-nous la grâce du pardon !
Francis Cousin
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