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24ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 18, 21-35) – Francis COUSIN)

« C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur.»

 

Attention à ne pas nous tromper dans l’interprétation de cette phrase.

Elle ne veut pas dire, comme on pourrait le croire au premier abord, que, si nous voulons être pardonné par Dieu, il faut que nous pardonnions nous aussi, et donc que le pardon que nous donnons est prioritaire (en ce sens qu’il est le premier) pour nous permettre d’être pardonné, et donc d’être sauvé.

Ce n’est pas ce que nous dit l’évangile.

Le pardon, celui que nous donnons, ne peut pas être une obligation nécessaire.

Dieu, qui est amour, nous laisse toujours libre !

Et puis, cette obligation nous donnerait comme une sorte d’avantage sur Dieu : « J’ai pardonné, donc tu dois me pardonner ».

Cela n’est pas possible … nous ne pouvons pas avoir ’’la main’’ sur Dieu.

Cela ressemblerait à un marchandage que nous ferions avec Dieu … ce qui ne peut se faire.

C’est une mauvaise interprétation de la parabole, car il ne faut pas oublier le début : le roi, c’est-à-dire Dieu, a commencé par donner son pardon, à remettre sa dette, une dette énorme, à son serviteur (qu’il nommera par la suite le serviteur méchant) … et ce qui est reproché à celui-ci est de ne pas avoir remis à son compagnon une dette de beaucoup inférieure à la sienne.

Ce serviteur n’a regardé que les faits : mon compagnon a une dette envers moi, donc il doit me rembourser ! Mais il ne l’a pas mise en relation avec sa propre dette annulée …

Comme toujours, Dieu est le premier à agir, et il nous demande de faire comme lui.

Il aime tout le monde, et comme il aime, il pardonne les fautes que ceux qui se reconnaissent pécheurs.

Cela demande de l’humilité de reconnaître ses fautes !

Et l’humilité nous permet de reconnaître que nous ne sommes pas meilleurs que les autres, ou que les autres ne sont pas moins bons que nous !

Se reconnaître pécheurs nous permet aussi de reconnaître que les autres peuvent aussi être pécheurs, tout comme nous, … et à leur pardonner.

Mais le pardon est une chose qui peut être difficile à faire.

Dans la vie courante, il arrive souvent, quand on bouscule quelqu’un, quand malencontreusement on lui marche sur les pieds, ou quand on passe devant lui, qu’on utilise simplement le mot « pardon ! », sans qu’on sache exactement si c’est une excuse ou une demande de pardon … D’ailleurs, on ne demande pas de réponse et la personne à laquelle on s’adresse n’en donne généralement pas non plus. C’est un pardon qui n’en est pas vraiment un, et qui ne ’’coûte’’ rien.

La plupart du temps, il faut se forcer pour demander (ou pour donner son) pardon … et il faut mettre une croix sur son orgueil … et se reconnaître humble …

Mais il arrive parfois (et c’est peut-être le plus souvent) que certains faits soient très difficiles à pardonner … et qu’ils soient même parfois qualifiés d’« impardonnables », comme les meurtres, les atteintes à la vie (physique, sociale, spirituelle …) par ceux qui les subissent, directement ou indirectement, … et même par le droit international, la presse, et tous ceux qui en ont connaissance …

Et pourtant, à la demande de Pierre de savoir s’il faut pardonner jusqu’à sept fois, Jésus nous dit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois. ».

Or le nombre sept, dans la Bible, représente la plénitude, la perfection. Pierre demandait donc s’il faut aller jusqu’à la perfection dans le pardon. Jésus lui, demande d’aller au-delà de la perfection, au-delà de la limite humaine, ce qui n’est possible que dans le surnaturel, dans ce qui est divin, donc seulement avec la grâce de Dieu. Le véritable pardon ne peut se faire qu’avec l’aide de Dieu.

Jésus, lui, est allé jusqu’au bout et il a demandé le pardon quand, humilié, bafoué, calomnié, outragé, « obéissant jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix » (Ph 2, 8), il demande à son Père : « Pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23,34).

Pour nous, quand le pardon devient difficile, on ne peut le demander (ou l‘accorder) qu’en demandant l’aide de Jésus.

Certains ont réussi à le faire … Pourquoi pas nous ?

Et si Jésus a pu dire : « C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. » (Lc 15,7), on pourrait aussi ajouter, car cela me semble aussi vrai : « Et qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui est pardonné par celui à qui il a fait du tort … »

Seigneur Jésus,

tu nous invites à toujours pardonner …

mais bien souvent,

c’est au-dessus de nos forces,

car nous sommes humains,

trop fiers, pas assez humbles.

Donne-nous la grâce du pardon !

 

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 24°




Audience Générale du Mercredi 2 Septembre 2020

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 2 Septembre 2020


Chers frères et sœurs, bonjour !

Après tant de mois, nous reprenons notre rencontre face à face et non devant un écran. Face à face. C’est beau ! L’actuelle pandémie a mis en évidence notre interdépendance : nous sommes tous liés, les uns aux autres, tant dans le mal que dans le bien. C’est pourquoi, pour sortir meilleurs de cette crise, nous devons le faire ensemble. Ensemble, pas tout seuls, ensemble. Seuls non, parce que l’on ne peut pas ! Ou on le fait ensemble, ou on ne le fait pas. Nous devons le faire ensemble,  tous, dans la solidarité. Je voudrais souligner ce mot aujourd’hui : solidarité.

En tant que famille humaine, nous avons notre origine commune en Dieu ; nous habitons dans une maison commune, la planète-jardin, la terre dans laquelle Dieu nous a placés ; et nous avons une destination commune dans le Christ. Mais quand nous oublions tout cela, notre interdépendance devient dépendance de certains à l’égard d’autres – nous perdons cette harmonie de l’interdépendance dans la solidarité – qui accroît l’inégalité et la marginalisation ; le tissu social s’affaiblit et l’environnement se dégrade. Toujours la même chose. La même façon d’ agir.

C’est pourquoi, le principe de solidarité est aujourd’hui plus que jamais nécessaire, comme l’a enseigné saint Jean-Paul II (cf. Enc. Sollicitudo rei socialis, nn. 38-40). Dans un monde interconnecté, nous faisons l’expérience de ce que signifie vivre dans le même « village global ». Cette expression est belle : le grand monde n’est autre qu’un village global, parce que tout est lié. Mais nous ne transformons pas toujours cette interdépendance en solidarité.  Il y a un long chemin entre l’interdépendance et la solidarité. Les égoïsmes – individuels, nationaux et des groupes de pouvoir – ainsi que les rigidités idéologiques alimentent au contraire des « structures de péché » (ibid., n. 36).

« Le mot “solidarité” est un peu usé et, parfois, on l’interprète mal, mais il désigne beaucoup plus que quelques actes sporadiques de générosité. C’est plus que cela ! Il demande de créer une nouvelle mentalité qui pense en termes de communauté, de priorité de la vie de tous sur l’appropriation des biens par quelques-uns » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 188). Cela signifie solidarité. Il ne s’agit pas seulement d’aider les autres – c’est bien de le faire, mais c’est plus que cela –  il s’agit de justice (cf. Catéchisme de l’Eglise catholique, nn. 1938-1940). L’interdépendance, pour être solidaire et porter des fruits, a besoin de fortes racines dans l’humain et dans la nature créée par Dieu, elle a besoin du respect des visages et de la terre.

Dès le début, la Bible nous avertit. Pensons au récit de la Tour de Babel (cf. Gn 11, 1-9), qui décrit ce qui se produit quand nous cherchons à atteindre le ciel – notre objectif – en ignorant le lien avec l’humain, avec la création et avec le Créateur. C’est une façon de dire : cela arrive chaque fois que l’on veut monter, monter, sans tenir compte des autres. Moi seulement ! Pensons  à la tour. Nous construisons des tours et des gratte-ciels, mais nous détruisons la communauté. Nous unifions les édifices et les langues, mais nous mortifions la richesse culturelle. Nous voulons être les maîtres de la Terre, mais nous détruisons la biodiversité et l’équilibre écologique. Je vous ai raconté au cours d’une autre audience l’histoire de ces pêcheurs de  San Benedetto del Tronto qui sont venus cette année et qui m’ont dit : « Nous avons récupéré de la mer 24 tonnes de déchets, dont la moitié était du plastique ». Imaginez ! Ces hommes capturent des poissons, oui, mais ils ont aussi l’idée de capturer les déchets et de les extraire pour nettoyer la mer. Mais cette [pollution] signifie détruire la terre, ne pas avoir de solidarité avec la terre qui est un don et l’équilibre écologique.

Je me souviens d’un récit médiéval qui décrit ce « syndrome de Babel », qui se produit quand il n’y a pas de solidarité. Ce récit médiéval  dit que, lors de la construction de la tour, quand un homme tombait – c’étaient des esclaves – et mourait, personne ne disait rien, au mieux : « Le pauvre, il s’est trompé et est tombé ». Mais si une brique tombait, tous se plaignaient. Et si quelqu’un était coupable, il était puni ! Pourquoi ? Parce qu’une brique coûtait cher à fabriquer, à préparer, à cuire. Il fallait du temps et du travail pour fabriquer une  brique. Une brique valait plus que la vie humaine. Que chacun de nous pense à ce qui se produit aujourd’hui. Malheureusement, aujourd’hui aussi, quelque chose de ce genre peut se produire. Le marché financier perd quelques points – nous l’avons vu sur les journaux ces jours-ci – et la nouvelle est rapportée par toutes les agences. Des milliers de personnes tombent à cause de la faim, de la misère, et personne n’en parle.

En opposition totale à Babel, nous trouvons la Pentecôte, nous l’avons entendu au début de l’audience (cf. Ac 2, 1-3). L’Esprit Saint, en descendant d’en haut comme le vent et le feu, investit la communauté enfermée au cénacle, lui insuffle la force de Dieu, la pousse à sortir et à annoncer à tous le Seigneur Jésus. L’Esprit crée l’unité dans la diversité, il crée l’harmonie. Dans le récit de la Tour de Babel, il n’y avait pas l’harmonie : il y avait le fait d’aller de l’avant pour gagner de l’argent. Là, l’homme n’était qu’un simple instrument, une simple « force de travail », mais ici, avec la Pentecôte, chacun de nous est un instrument, mais un instrument communautaire qui participe de tout son être à l’édification de la communauté. Saint François d’Assise le savait bien et, animé par l’Esprit, il donnait à toutes les personnes, et même aux créatures, le nom de frère ou sœur (cf. LS, n. 11; cf. Saint Bonaventure, Legenda maior, VIII, 6: FF 1145). Même le frère loup, rappelons-nous.

Avec la Pentecôte, Dieu se fait présent et inspire la foi de la communauté unie dans la diversité et dans la solidarité. Diversité et solidarité unies dans l’harmonie, telle est la voie. Une diversité solidaire possède les « anticorps » afin que la particularité de chacun – qui est un don, unique et irrépétible – ne tombe pas malade à cause de l’individualisme, de l’égoïsme. La diversité solidaire possède également les anticorps pour guérir les structures et les processus sociaux qui ont dégénéré en systèmes d’injustice, en systèmes d’oppression (cf. Compendium de la doctrine sociale de l’Eglise, n. 192). La solidarité est donc aujourd’hui la voie à parcourir vers un monde après la pandémie, vers la guérison de nos maladies interpersonnelles et sociales. Il n’y en a pas d’autre. Ou nous allons de l’avant sur la voie de la solidarité ou les choses seront pires. Je veux le répéter : on ne sort pas pareils qu’avant d’une crise. La pandémie est une crise. On sort d’une crise meilleurs ou pires. Nous devons choisir. Et la solidarité est précisément une voie pour sortir meilleurs de la crise, pas avec des changements superficiels, avec un coup de peinture comme ça tout va bien. Non ! Meilleurs !

Au milieu de la crise, une solidarité guidée par la foi nous permet de traduire l’amour de Dieu dans notre culture mondialisée, non pas en construisant des tours ou des murs – et combien de murs se construisent  aujourd’hui – qui divisent mais ensuite s’écroulent, mais en tissant des communautés et en soutenant des processus de croissance véritablement humaine et solide. C’est pour cela que la solidarité peut aider. Je pose une question : est-ce que je pense aux besoins des autres ? Que chacun réponde dans son cœur.

Au milieu des crises et des tempêtes, le Seigneur nous interpelle et nous invite à réveiller et à rendre active cette solidarité capable de donner une solidité, un soutien et un sens à ces heures où tout semble sombrer. Puisse la créativité de l’Esprit Saint nous encourager à engendrer de nouvelles formes d’accueil familial, de fraternité féconde et de solidarité universelle. Merci.


Je salue cordialement les pèlerins de langue française.

En ces temps difficiles que nous traversons je vous encourage à répondre dans la foi aux appels que l’Esprit-Saint nous adresse à faire preuve de solidarité envers les personnes que nous rencontrons et qui comptent sur notre soutien fraternel.

Que Dieu vous bénisse !




23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Claude WON FAH HIN

Ézékiel 33 7–9 ; Romains 13 8–10 ; Matthieu 18 15–20

 

Les textes d’aujourd’hui ont en commun de parler de la communauté qu’est l’Eglise, et des petits groupes de chrétiens au sein de l’Eglise. Et dans une communauté ou même des groupes, il y a des règles du vivre ensemble. Ces règles sont établies par les responsables hiérarchiques quand il s’agit de l’Église, et il y a tout simplement des règles du savoir-vivre ensemble que les gens d’une même région ou du même quartier connaissent sans que cela soit clairement indiqué. En tout cas, concernant les chrétiens qui se rassemblent, toutes les règles n’ont qu’une fin : union, solidarité, entre aide, paix, bonne entente et tout cela, en toile de fond, le commandement du Christ : « aimez-vous les uns les autres ». Et c’est en suivant les commandements de Dieu qu’on reconnaît celui qui aime Jésus. Jn 14,21 : « Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime; or celui qui m’aime sera aimé de mon Père; et je l’aimerai et je me manifesterai à lui ». Et c’est parce qu’on oublie les commandements de Dieu et les enseignements du Christ que l’on finit par ne regarder que ses propres intérêts. On finit alors par s’éloigner du Christ, à commettre des fautes, à semer la mésentente. Le fait d’oublier le Christ, d’oublier ses commandements, d’oublier l’Eglise, nous amène à ne s’occuper que de nous-mêmes, bien égoïstement. Egoïstement parce qu’on est toujours bien attaché au monde et non pas à Dieu ou au Christ. Grignion de Monfort : §75 – « Cette sagesse du monde (qui concerne ceux qui délaissent Dieu) est une conformité parfaite aux maximes et aux modes du monde; c’est une tendance continuelle vers la grandeur et l’estime; c’est une recherche continuelle et secrète de son plaisir et de son intérêt, non pas d’une manière grossière et criante, en commettant quelque péché scandaleux, mais d’une manière fine, trompeuse et politique; autrement ce ne serait plus selon le monde une sagesse, mais un libertinage. §76 – Un sage du siècle (c’est-à-dire quelqu’un qui semble ne pas avoir besoin de Dieu) est un homme qui sait bien faire ses affaires, et faire réussir tout à son avantage temporel, sans quasi paraître vouloir le faire; qui sait l’art de déguiser et de tromper finement sans qu’on s’en aperçoive; qui dit ou fait une chose et pense l’autre; qui n’ignore rien des airs et des compliments du monde; qui sait s’accommoder à tous pour en venir à ses fins, sans se mettre beaucoup en peine de l’honneur et de l’intérêt de Dieu; qui fait un secret mais funeste accord (ou un mélange) de la vérité avec le mensonge, de l’Evangile avec le monde, de la vertu avec le péché, de Jésus-Christ avec Bélial (2Co 6,15 :  c’est-à-dire avec le diable); qui veut passer pour un honnête homme, …. Enfin, un sage mondain est un homme qui, ne se conduisant que par la lumière des sens et de la raison humaine, ne cherche qu’à se couvrir des apparences de chrétien et d’honnête homme, sans se mettre beaucoup en peine de plaire à Dieu, ni d’expier, par la pénitence, les péchés qu’il a commis contre sa divine Majesté ». Voilà pourquoi dans une communauté, et particulièrement dans une communauté chrétienne, des règles sont là pour que le « vivre ensemble » se passe au mieux. Mais parce que l’homme est souvent encore attaché aux choses du monde et pas assez à Dieu, les règles du « vivre ensemble » de la communauté peuvent ne pas être respectées. C’est alors le trouble au sein même de l’Eglise. En cas de conflit, une procédure est à observer. La première démarche consiste à rencontrer en tête à tête la personne conflictuelle et qui pose problème au sein du groupe. Le but est de se comprendre. Dans tous les cas, il faut être diplomate et y aller avec douceur.

Premier cas : Si la personne pêche directement contre Dieu et que l’on soit au courant, il faut essayer d’accompagner, seul à seul, le pécheur avec suffisamment de tact et d’intelligence pour qu’il prenne conscience de son péché et puisse s’en sortir. Des textes tirés de la Bible ou des exemples pris dans la vie courante peuvent fortement contribuer à faire prendre conscience de la gravité du péché. Là encore, la formation biblique peut aider le pécheur à progresser dans son union au Christ et par conséquent dans son attitude à avoir dans la communauté ou dans un groupe.

Deuxième cas, si la personne pêche contre nous, c’est-à-dire nous fait du tort. Là aussi, de manière diplomate, on sera amené à faire comprendre, seul à seul, avec douceur, à la personne le tort qu’il nous a fait personnellement ou au groupe de manière. Si cette première démarche se montre infructueuse, on aura alors recours à la communauté ou au groupe pour corriger fraternellement le fautif. Si, même dans ce cas, ce dernier ne se corrige pas, alors cela peut aller jusqu’à la coupure de certains liens d’ordre social pour que le groupe puisse continuer sereinement sa mission, ou, à un autre niveau si les cas est extrêmement grave, aller jusqu’à l’excommunication par la hiérarchie. C’est ce qui s’est passé il y a quelques années lorsque l’évêque de la Réunion a fait afficher dans chaque église un communiqué pour dire qu’à la Réunion une personne a été excommuniée de l’Église. Dans tous les cas, comme tout péché, c’est toujours une affaire en rapport avec les commandements de Dieu : aimer Dieu et aimer son prochain, mais aussi d’obéissance de la foi. Parce que nous avons foi en Dieu, cette foi nous amène à l’obéissance des commandements de Dieu. Et tout péché est une désobéissance. Ne pas aimer son prochain c’est une manière aussi de dire qu’on ne pense pas aux autres et qu’on pense surtout à soi-même. Comme dit le créole : « A moins même mon maître ». Or, tout l’enseignement du Christ est de nous dire qu’il faut aimer Dieu et son prochain. Il ne nous demande pas d’être amoureux de tout le monde mais d’aimer tout le monde. Et aimer, cela commence souvent par « des petits riens » qui peuvent faire plaisir aux autres : un regard, un bonjour, un petit signe de la main, ne pas se mettre en colère alors même qu’il y aurait toutes les raisons de l’être, éviter la critique, ne rien dire à ceux qui vous regardent de travers, etc…Dans tous les cas, le chrétien peut toujours se conduire en chrétien, et il le pourra à la seule condition d’avoir le regard fixé sur le Christ. Mi 6,8 : « On t’a fait savoir, ô homme, ce qui est bien, ce que Yahvé réclame de toi : rien d’autre que d’accomplir la justice, d’aimer la bonté et de t’appliquer à marcher avec ton Dieu ». Accomplir la justice, c’est se comporter de manière à rester en accord avec les commandements de Dieu tout en vivant dans le monde, dans une communauté ou dans un groupe de chrétiens. Ce qui signifie que Celui qui est à la suite du Christ doit être capable de garder son sang-froid, son calme, avec une paix intérieure qui ne le quitte pas parce son regard intérieur est fixé sur le Seigneur alors même, qu’il subit toutes sortes de vexations ou de critiques et être capable de reconnaître qu’il a tort dans certains cas.  « Le Seigneur ne demande rien d’extraordinaire à l’homme, mais seulement d’agir de manière droite en évitant le péché (c’est le sens de l’expression « pratiquer le droit »), aimer et pratiquer la miséricorde (hesed), et enfin vivre humblement avec Dieu. Voilà la conduite de l’homme qui plait à Dieu. On n’a pas besoin de tout retenir de la Bible, mais une seule expression : « Celui qui aime autrui a de ce fait accompli la Loi », ce qui signifie que tant que vous aimez le prochain, quel qu’il soit, vous ne péchez pas et tout ce qui est dit dans la Bible vous êtes en train de l’accomplir parce que vous avez de l’amour pour les autres. L’amour ou la charité c’est la même chose, et « la charité est la Loi dans sa plénitude ». Saint Augustin nous dit : « aime et fais ce que tu veux ».

Autrement dit, en aimant le prochain, vous accomplissez toutes les lois qui se trouvent dans la Bible et donc les dix commandements dont certains ont été repris par le deuxième texte d’aujourd’hui : « Tu ne commettras pas d’adultère, tu ne tueras pas, tu ne voleras pas, tu ne convoiteras pas, et tous les autres se résument en cette formule : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. 10 La charité ne fait point de tort au prochain. La charité est donc la Loi dans sa plénitude ». Et la correction fraternelle dont parle l’Evangile, contrairement à ce qu’on pourrait penser, est une manière d’exercer la charité, l’amour, pour aider le pécheur à rectifier sa conduite de manière à plaire à Dieu. Le 1er texte d’aujourd’hui s’adresse au prophète qui doit avoir un rôle de guetteur. Le prophète n’est pas quelqu’un qui prédit l’avenir, son rôle est de dire la parole de Dieu. Tout chrétien, d’une certaine manière, est capable de dire la parole de Dieu, et donc d’être prophète à son niveau. Dieu donne donc la parole aux prophètes que sont les chrétiens pour faire passer ses lois, ses messages d’amour et de paix. Au prophète Jérémie (Jr 1,9) voici ce que Dieu lui dit : 9 … Voici que j’ai placé mes paroles en ta bouche ». Cet homme que Dieu inspire a le devoir de dire la parole de Dieu lorsque c’est nécessaire. Ézékiel nous dit: « Si je dis au méchant :  Méchant, tu vas mourir, et que tu ne parles pas pour avertir le méchant d’abandonner sa conduite, lui, le méchant, mourra de sa faute, mais c’est à toi que je demanderai compte de son sang. 9 Si au contraire tu as averti le méchant d’abandonner sa conduite pour se convertir et qu’il ne s’est pas converti, il mourra, lui, à cause de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie ». L’Évangile d’aujourd’hui dit la même chose : 15 « Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprends-le, seul à seul. S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère ». S’il n’écoute pas, cela retombera sur lui-même, il mourra de sa faute mais le chrétien qui l’aura conseillé sera quitte devant Dieu parce qu’il aura fait un geste d’amour envers le fautif pour essayer de le ramener à Dieu. C’est ce qu’on appelle la « correction fraternelle ». Et la correction fraternelle » est un devoir pour tout chrétien. Jc 5,20 : « celui qui ramène un pécheur de son égarement sauvera son âme de la mort et couvrira une multitude de péchés ». 1P4,8 : « conservez entre vous une grande charité, car la charité couvre une multitude de péchés ». Que Marie nous aide à répandre autour de nous l’amour de Dieu.




23ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 18, 15-20) – Francis COUSIN)

 « Si ton frère a commis un péché contre toi … »

 

Dans l’évangile de ce jour, Jésus nous montre, non seulement l’importance du pardon, de la réconciliation, mais aussi une manière de faire pour obtenir cette réconciliation, en trois étapes :

– D’abord seul à seul, discrètement, sans grand bruit. Et si cela fonctionne, « Tu as gagné ton frère ».

– Ensuite, avec « un ou deux témoins » qui pourront certifier que la réconciliation est faite.

– Enfin, devant toute « l’assemblée de l’Église », afin que chacun soit témoin du tort effectué et de la réparation éventuelle. (La plupart des traductions actuelles parle de l’Église, ce qui un peu anachronique, et il semble préférable de traduire par communauté ou assemblée)

Et si aucun accord ne se fait, il faut considérer que la personne s’exclut de la communauté et doit être mise au rang des païens.

L’intérêt de ce passage est de montrer la dimension collective de la faute, qui est pourtant individuelle, et ce de deux manières. Dans la faute, il y a celui qui fait la faute, le pécheur, et celui qui subit la faute, la victime.

La faute établie une injustice entre deux membres de la communauté, ce qui fait que les liens entre tous les membres ne sont plus les mêmes : il y a un dés-accord qui joue sur l’harmonie de la communauté toute entière.

Pour ré-accorder l’harmonie entre les membres, il y a donc nécessité que chacun participe, au final, à la mise en œuvre de la réconciliation à l’intérieur de la communauté.

Pécheurs, nous le sommes tous. C’est pourquoi au début de nos célébrations nous nous reconnaissons pécheurs, en pensée, en paroles, par action et par omission, chacun pour soi, mais nous demandons aussi à la communion des saints et à tous nos frères présents de prier pour [nous] le Seigneur notre Dieu. C’est la dimension collective de la réparation des fautes.

Mais cette dimension collective n’exclut pas la dimension individuelle de prier pour les pécheurs, ainsi que le demandait Notre-Dame à Bernadette, à Lourdes : « Priez pour la conversion des pécheurs ».

Et ce que Dieu dit à Ézéchiel dans la première lecture peut aussi s’appliquer à chacun de nous : « Si tu ne lui dis pas d’abandonner sa conduite mauvaise, lui, le méchant, mourra de son péché, mais à toi, je demanderai compte de son sangAu contraire, si tu avertis le méchant d’abandonner sa conduite, et qu’il ne s’en détourne pas, lui mourra de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie. »

Pourtant, cette manière de penser n’est pas vraiment entrée dans les mœurs.

Quand on parle d’un pécheur, la première réaction est bien souvent de l’exclure … et de dire du mal de lui. Et peut-être d’en rajouter … surtout si on n’est pas concerné par la faute …

C’est ce qu’on appelle ici des ladi-lafé, ailleurs des commérages, des cancanages …

Ce à quoi le pape François disait : « Nous sommes habitués aux commérages, aux ragots, et souvent nous transformons nos communautés et même notre famille en un « enfer » où se manifeste cette forme de criminalité qui conduit à « tuer son frère et sa sœur avec sa langue » (Sainte Marthe, 2/9/2013), en s’appuyant sur le texte de saint Jean : « Quiconque a de la haine contre son frère est un meurtrier, et vous savez que pas un meurtrier n’a la vie éternelle demeurant en lui. » (1 Jn 3,15).

Peut-être que nous devrions nous poser la question : Est-ce que, dans nos communautés, paroissiales ou de mouvements, nous laissons courir les ragots, voire même nous les alimentons en en rajoutant une couche ? Ou est-ce que nous faisons, avec les autres, tout notre possible pour atténuer au maximum les différents qui peuvent se faire jour parmi nous en essayant de réconcilier les personnes concernées ?

Jésus a dit, en parlant de nos communautés : « Tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13,35). Mais on pourrait dire aussi : « Tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous êtes capables de vous pardonner les uns les autres ».

Car c’est dans ces conditions-là, le pardon de tous dans la communauté, que l’amour se fera montrer.

En effet, on pourrait dire :

Le pardon est la condition de la réalisation de l’amour, et

L’amour est la condition de la réalisation du pardon.

Les deux sont indissolublement liés.

Seigneur Jésus,

tu nous invites à aller vers les autres

pour proposer le pardon,

mais tu insistes aussi

sur la responsabilité collective de la communauté

pour que le pardon soit effectif entre tous,

et qu’ainsi l’amour règne entre tous.

Mais on l’oublie souvent.

 

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 23°




23ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER

Travailler, ensemble, à « gagner nos frères »

(Mt 18, 15-20)

  En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
« Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère.
S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins.
S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain.
Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel.
Et pareillement, amen, je vous le dis, si deux d’entre vous sur la terre se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, ils l’obtiendront de mon Père qui est aux cieux.
En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. »

                    

             « Libre à l’égard de tous », écrivait St Paul, « je me suis fait l’esclave de tous, afin de gagner le plus grand nombre… Je me suis fait faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin d’en sauver à tout prix quelques-uns » (1Co 9,19‑22), car « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (1Tm 2,4-6)…

            Alors, « si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul », pour lui éviter d’être humilié devant les autres, « et montre lui sa faute » sans jamais oublier que nous sommes tous pécheurs, d’une manière ou d’une autre. Et « s’il t’écoute » avec simplicité et humilité, « tu auras gagné ton frère », et alors quelle joie ! Et un jour peut-être, c’est lui qui, à son tour, viendra te « gagner »…

            Aussi, « frères, même dans le cas où quelqu’un serait pris en faute, rétablissez-le en esprit de douceur, te surveillant toi-même, car tu pourrais bien toi aussi être tenté. Portez les fardeaux les uns des autres et accomplissez ainsi la Loi du Christ. Car si quelqu’un estime être quelque chose alors qu’il n’est rien, il se fait illusion » (Ga 6,1-3)…

            Et « s’il ne t’écoute pas, prends encore avec toi une ou deux personnes » en espérant que le poids « plus lourd » de votre charité commune pourra percer l’écorce de son cœur… S’il refuse encore, que « toute l’Eglise » unisse ses forces et sa prière, car, « nous tous qui avons été abreuvés d’un même Esprit, nous ne formons qu’un seul Corps » (1Co 12,13). C’est pourquoi, si un membre est malade, c’est le Corps tout entier qui souffre (1Co 12,26). Et si un membre manque à l’appel, il manque à tous, car nous avons tous besoin les uns des autres pour que l’Eglise soit pleinement elle-même…

            En effet, cette Eglise, du point de vue de Dieu, a en fait la dimension de l’humanité tout entière, cette famille incroyablement nombreuse de ses enfants « créés à son Image et Ressemblance » (Gn 1,26-28). Qu’un seul manque à l’appel, et Dieu « s’en ira après celui qui est perdu jusqu’à ce qu’il le retrouve » (Lc 15,4-7). Puisque l’Eglise est « le Corps du Christ », il est impossible qu’elle n’adopte pas la même attitude envers tous, et surtout envers les plus petits… C’est pourquoi Jésus a repris cette parabole de la brebis perdue pour l’appliquer, juste avant notre passage, à l’Eglise car «  on ne veut pas, chez votre Père qui est aux cieux, qu’un seul de ces petits se perde » (Mt 18,14). Quiconque prie le « Notre Père » en disant « que ta volonté soit faite », ne peut donc que travailler, d’une manière ou d’une autre, au salut de tous, sans aucune exception… DJF




Audience Générale du Mercredi 26 Août 2020

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 26 Août 2020


Chers frères et sœurs, bonjour !

Face à la pandémie et à ses conséquences sociales, de nombreuses personnes risquent de perdre l’espérance. En ce temps d’incertitude et d’angoisse, j’invite chacun à accueillir le don de l’espérance qui vient du Christ. C’est Lui qui nous aide à naviguer dans les eaux tumultueuses de la maladie, de la mort et de l’injustice, qui n’ont pas le dernier mot sur notre destination finale.

La pandémie a souligné et aggravé les problèmes sociaux, en particulier l’inégalité. Certains peuvent travailler à la maison, tandis que pour de nombreux autres, cela est impossible. Certains enfants, en dépit des difficultés, peuvent continuer à recevoir une éducation scolaire, tandis que pour de très nombreux autres, celle-ci s’est brusquement interrompue. Certains pays puissants peuvent émettre de la monnaie pour affronter l’urgence, tandis que pour d’autres, cela signifierait hypothéquer leur avenir.

Ces symptômes d’inégalité révèlent une maladie sociale ; c’est un virus qui vient d’une économie malade. Nous devons le dire simplement : l’économie est malade. Elle est tombée malade. C’est le fruit d’une croissance économique inique – voilà la maladie : le fruit d’une croissance économique inique – qui ne tient pas compte des valeurs humaines fondamentales. Dans le monde d’aujourd’hui, quelques  personnes très riches possèdent plus que tout le reste de l’humanité. Je répète cela parce que cela nous fera réfléchir : quelques personnes très riches, un petit groupe, possèdent plus que tout le reste de l’humanité. C’est une pure statistique. C’est une injustice qui crie au ciel ! Dans le même temps, ce modèle économique est indifférent aux dommages infligés à la maison commune. On ne prend pas soin de la maison commune. Nous allons bientôt dépasser un grand nombre des limites de notre merveilleuse planète, avec des conséquences graves et irréversibles : de la perte de biodiversité et du changement climatique à l’élévation du niveau des mers et à la destruction des forêts tropicales. L’inégalité sociale et la dégradation de l’environnement vont de pair et ont la même racine (cf. Enc. Laudato si’, n. 101) : celle du péché de vouloir posséder, de vouloir dominer ses frères et sœurs, de vouloir posséder et dominer la nature et Dieu même. Mais cela n’est pas le dessein de la création.

« Au commencement, Dieu a confié la terre et ses ressources à la gérance commune de l’humanité » ( Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 2402). Dieu nous a demandé de dominer la terre en son nom (cf. Gn 1, 28), en la cultivant et en en prenant soin comme un jardin, le jardin de tous (cf. Gn 2, 15). « Alors que “cultiver” signifie labourer, […] ou travailler, “garder” signifie protéger, [et] sauvegarder » ( LS, n. 67).  Mais attention à ne pas interpréter cela comme une carte blanche pour faire de la terre ce que l’on veut. Non. Il existe « une relation de réciprocité responsable » ( ibid.) entre nous et la nature.  Une relation de réciprocité responsable entre nous et la nature. Nous recevons de la création et nous donnons à notre tour. « Chaque communauté peut prélever de la bonté de la terre ce qui lui est nécessaire pour survivre, mais elle a aussi le devoir de la sauvegarder » ( ibid.). Les deux choses.

En effet, la terre « nous précède et nous a été donnée » (ibid.), elle a été donnée par Dieu « à tout le genre humain » (CEC, n. 2402). Il est donc de notre devoir de faire en sorte que ses fruits arrivent à tous, et pas seulement à quelques-uns. Et cela est un élément-clé de notre relation  avec les biens terrestres. Comme le rappelaient les pères du Concile Vatican II, « l’homme, dans l’usage qu’il en fait, ne doit jamais tenir les choses qu’il possède légitimement comme n’appartenant qu’à lui, mais les regarder aussi comme communes : en ce sens qu’elles puissent profiter non seulement à lui, mais aussi aux autres » (Const. past. Gaudium et spes, n. 69). En effet, « la propriété d’un bien fait de son détenteur un administrateur de la Providence pour le faire fructifier et en communiquer les bienfaits à autrui » (CEC, n. 2404). Nous sommes administrateurs des biens, pas les propriétaires. Administrateurs. « Oui, mais ce bien est à moi ». C’est vrai, il est à toi, mais pour l’administrer, par pour le garder de façon égoïste pour toi.

Pour assurer que ce que nous possédons apporte de la valeur à la communauté, « l’autorité politique a le droit et le devoir de régler, en fonction du bien commun, l’exercice légitime du droit de propriété » (ibid., n. 2406)  (Cf. GS, 71; Saint Jean-Paul II, Lett. enc. Sollicitudo rei socialis, n. 42; Lett. enc. Centesimus annus, nn. 40.48). La « subordination de la propriété privée à la destination universelle des biens […] est une “règle d’or” du comportement social, et le premier principe de tout l’ordre éthico-social » (LS, n. 93) (Cf. S. Jean-Paul II, Lett. enc. Laborem exercens, n. 19).

Les propriétés, l’argent sont des instruments qui peuvent servir à la mission. Mais nous les transformons facilement en fins, individuelles ou collectives. Et lorsque cela a lieu, on porte atteinte aux valeurs humaines essentielles. L’homo sapiens se déforme et devient une espèce d’homo œconomicus – dans le mauvais sens du terme – individualiste, calculateur et dominateur. Nous oublions que, étant créés à l’image et ressemblance de Dieu, nous sommes des êtres sociaux, créatifs et solidaires, avec une immense capacité à aimer. Nous oublions souvent cela. De fait, nous sommes les êtres les plus coopératifs parmi toutes les espèces, et nous nous épanouissons en communauté, comme on le voit bien dans l’expérience des saints (« Florecemos en racimo, como los santos »: une expression commune en espagnol). Il y a un dicton espagnol qui m’a inspiré cette phrase, et qui dit :  Florecemos en racimo, como los santo. Nous nous épanouissons en communauté, comme on le voit dans l’expérience des saints.

Quand l’obsession de posséder et de dominer exclut des millions de personnes des biens primaires ; quand l’inégalité économique et technologique est telle qu’elle déchire le tissu social ; et quand la dépendance vis-à-vis d’un progrès matériel illimité menace la maison commune, alors nous ne pouvons pas rester impassibles. Non, cela est désolant. Nous ne pouvons pas rester impassibles ! Avec le regard fixé sur Jésus (cf. He 12, 2) et la certitude que son amour œuvre à travers la communauté de ses disciples, nous devons agir tous ensemble, dans l’espérance de donner naissance à quelque chose de différent et de meilleur. L’espérance chrétienne, enracinée en Dieu, est notre ancre. Elle soutient la volonté de partager, en renforçant notre mission en tant que disciples du Christ, qui a tout partagé avec nous.

Et cela, les premières communautés chrétiennes, qui comme nous, vécurent des temps difficiles, l’ont compris. Conscientes de former un seul cœur et une seule âme, elles mettaient tous leurs biens en commun, en témoignant de la grâce abondante du Christ sur elles (cf. Ac 4, 32-35). Nous vivons actuellement une crise. La pandémie nous a tous plongés dans une crise. Mais rappelez-vous : on ne peut pas sortir pareils d’une crise, ou bien l’on sort meilleurs, ou bien l’on sort pires. C’est l’option qui se présente à nous. Après la crise, est-ce que nous continuerons avec ce système économique d’injustice sociale et de mépris pour la sauvegarde de l’environnement, de la création, de la maison commune ? Réfléchissons-y.  Puissent les communautés chrétiennes du vingt-et-unième siècle retrouver cette réalité – la sauvegarde de la création et la justice sociale : elles vont de pair –  en témoignant ainsi de la Résurrection du Seigneur. Si nous prenons soin des biens que le Créateur nous donne, si nous mettons en commun ce que nous possédons de façon à ce que personne ne manque de rien, alors nous pourrons véritablement inspirer l’espérance pour faire renaître un monde plus sain et plus équitable.

Et pour finir, pensons aux enfants. Lisez les statistiques : combien d’enfants, aujourd’hui, meurent de faim à cause d’une mauvaise distribution des richesses, d’un système économique que j’ai évoqué auparavant ; et combien d’enfants, aujourd’hui, n’ont pas droit à l’école, pour la même raison. Que cette image, des enfants dans le besoin à cause de la faim et du manque d’éducation, nous aide à comprendre que nous devrons sortir meilleurs de cette crise. Merci

 




Le père Marie-Joseph Lagrange et le père Pedro Arrupe, deux prophètes en voie de béatification (Fr. Manuel Rivero O.P.)

Père Pedro Aruppe (S. J. – Jésuite)…

                                      … avec Mère Teresa…

   … et avec le Pape Jean Paul II.

P. Marie Joseph Lagrange (O. P. – Dominicain)

 

Pour accéder à l’article de Fr. Manuel Rivero, cliquer sur le lien suivant :

P. Pedro Aruppe et P. Marie Joseph Lagrange, deux prophètes en voie de béatification.

 

 

 




50 ième anniversaire de l’ordination sacerdotale de Mgr Aubry (23 août 1970 – 2020)

Ce dimanche 23 août une messe d’action de grâce fut célébrée en l’Eglise du Chaudron pour le cinquantième anniversaire de l’ordination sacerdotale de Mgr Gilbert Aubry, le 23 août 1970. Puis il fut nommé Evêque du diocèse de la Réunion par le Pape Paul VI le 20 novembre 1975 et ordonné le 2 mai 1976…

Le diaporama, avec « un zeste d’humour », qui fut projeté en début de célébration est accessible aux pages suivantes :

http://www.jevismafoi.com/50ansaubry/

https://fr-fr.facebook.com/Sedifop/

 




22ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 16, 21-27) – Francis COUSIN)

On oublie toujours quelque chose …

 

L’annonce par Jésus de son passion et de sa mort voulues par les « anciens, les grands prêtres et les scribes », et de sa résurrection le troisième jour a été pour les apôtres comme un coup de massue.

Il venait juste d’être reconnu comme le Messie, « le Christ, le Fils du Dieu vivant » !

Sans doute abasourdis, les apôtres se taisent …

Alors Pierre entraîne Jésus à part et lui souffle à l’oreille : « Cela ne t’arrivera pas ! ».

Il pensait réconforter Jésus … mais c’est une réponse virulente de la part de Jésus qui arrive : « Passe derrière moi, Satan ! Tu es pour moi une occasion de chute ».

Pourquoi ce reproche ?

Parce que Jésus doit aller jusqu’au bout de sa mission sur la terre, et l’aide humaine de Pierre et des autres apôtres ne s’inscrit pas dans la vision divine.

Mais aussi parce que, comme nous aussi le faisons souvent, Pierre n’a pas attendu et donc entendu la fin de la phrase de Jésus pour se faire son opinion : « … et le troisième jour ressusciter. »

Il en est resté aux souffrances infligées à Jésus … à ce qui est mal, et qui fait mal …

Peut-être aussi parce que la résurrection, certains juifs en parlaient, mais cela restait mystérieux, on ne savait pas trop ce que c’était, comment cela se passait … (encore maintenant …). Ce n’était pas un sujet qui passionnait les gens simples comme l’étaient les apôtres …

Ils n’avaient aucune expérience de ce que c’était. Même pour la fille de Jaïre, Jésus s’était défendu de la ressusciter ; il avait seulement dit : « Ne pleurez pas ; elle n’est pas morte : elle dort. » (Lc 8,52).

Ils ne comprendront vraiment ce que cela voulait dire que le jour de la résurrection de Jésus, même s’il en avait parlé plusieurs fois.

Nous aussi, nous sommes comme Pierre ou les apôtres : nous ne retenons souvent qu’une partie de la phrase que nous entendons, et nous occultons le reste.

Cela arrive souvent avec la Parole de Jésus dans les évangiles : nous acceptons ce que nous comprenons, ce qui nous semble ‘correct’, normal, à nos pensées humaines … mais nous oublions les autres.

Comme dans le passage de l’évangile de ce jour : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. » …

On veut bien suivre Jésus, on est prêt à le faire … et souvent on en reste à « prendre sa croix » … et cela nous fait peur … parce qu’on ne sait pas quelle est cette croix, qui est individuelle, spécifique pour chacun …

Et quand arrive une situation difficile pour nous, on se dit : « Cela doit être ma croix ! », mais on n’en est jamais sûr … et on essaye de vivre avec en se disant : « Si je veux aller au ciel, il faut que je l’accepte » … mais en fait, on ne l’accepte pas, on la subit, et notre seul désir est qu’elle disparaisse …

Et il arrive que nous en voulions à Jésus de nous imposer cette croix … (« Qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu pour … »)

Pourtant, il y a une autre phrase de Jésus qu’on oublie : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos (…) Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger. » (Mt 11,28.30)

Peut-être parce que c’est une phrase qu’on a du mal à comprendre … parce que nos « pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. », et que, bien que nous le désirions, nous avons du mal à sortir de notre condition humaine pour nous élever vers Dieu.

Et aussi parce qu’il y a une partie de la première phrase que nous avons occultée, celle qui est mise en premier : « qu’il renonce à lui-même ».

Et on l’occulte d’autant plus facilement qu’elle va à l’encontre de tout ce qui est véhiculé dans notre société actuelle où on met en avant l’individualisme, avec tout ce que cela comporte, à tous les niveaux : familial, social, travail, économique, politique, éthique …

C’est toujours « moi d’abord », avec dans les messages publicitaires : « Soyez le meilleur … », « Avec … soyez différents », « Distinguez-vous des autres … ».

On comprend qu’on oublie cette partie de la phrase, parce que renoncer à soi-même, d’une certaine manière, c’est renoncer à ce qu’on est intrinsèquement, renoncer à son « soi », … et cela n’est pas humainement naturel …

Parce que renoncer à soi-même, c’est accepter de mettre en premier quelqu’un d’autre, et pour nous, c’est Jésus, c’est Dieu … C’est mettre en avant la Parole de Dieu, ne vivre que pour elle, comme le fit saint Paul : « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. » (Ga 2,20).

C’est accepter que cette Parole de Dieu « attire sur [nous] l’insulte et la moquerie. » (Première lecture), et cela arrive quand on défend la position des chrétiens, notamment dans les débats concernant la nouvelle loi de Bioéthique, entre autres …

Que cette Parole de Dieu soit pour nous, comme elle le fut pour Jérémie, « un feu brûlant dans [notre] cœur » qu’on n’arrive pas à « maîtriser » (Première lecture) … avec l’aide de Jésus qui est toujours là près de nous, pour nous aider à porter notre joug, à porter notre croix.

Seigneur Jésus,

on croit bien connaître ton évangile,

mais il y a toujours des passages qu’on oublie …

et ce sont souvent les plus importants,

ceux qu’on a du mal à suivre,

ceux qui nous coûtent,

parce qu’ils nous demandent beaucoup d’humilité …

et nous sommes trop fiers …

Pardonne-nous !

 

Francis Cousin

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Prière dim ordinaire A 22°




21ième Dimanche du Temps Ordinaire (Matth 16, 13-21) – Francis COUSIN)

« Ce n’est pas la chair et le sang

qui t’ont révélé cela,

mais mon Père qui est aux cieux. »

 

Pierre aurait pu être fier. Il était le premier disciple à dire que Jésus est le Messie, « le Christ, le Fils du Dieu vivant ! ».

Mais Jésus le remet aussitôt à sa place : « Tout ce que tu as dit, ça ne vient pas de toi, mais de mon Père : bienheureux es-tu ! ».

Coup dur pour Pierre. Il aurait sans doute aimé, comme nous tous dans cette situation, être félicité pour sa clairvoyance … Mais non ! Jésus remet les choses dans l’ordre (et c’est vrai aussi pour nous, quand nous pensons avoir une idée géniale …) : Tout ce qui est bon nous est ‘soufflé’ par Dieu.

Tout vient de toi, ô Père très bon.

Apprentissage de l’humilité !

Sans doute Pierre devait l’avoir un peu mauvaise, alors quand aussitôt après Jésus annonce aux disciples sa passion et sa résurrection, essayant peut-être de se rattraper, il dit : « Cela ne t’arrivera pas », Jésus le reprend encore : « Passe derrière moi, Satan ! … Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. » (Mt 16,22-23).

C’est la douche froide, une deuxième volée de bois vert !

Et celui qui a suggéré la phrase est clairement identifié : Satan.

Un coup, la pensée vient de Dieu ; le deuxième coup, elle vient de Satan !

Et il en est de même pour nous. Nos pensées viennent de Dieu ou de Satan. Peut-être quelque fois de nous … mais c’est pas sûr …

Tout vient de toi, ô Père très bon.

Mais seulement ce qui est bon ! Pas le reste ! Apprentissage de la clairvoyance !

Alors pour nous, qui est Jésus ? ou qui est Dieu ? La réflexion est la même qui revient à se poser la question : Quelle est notre relation à Dieu ?

Dans toute relation humaine, il y a deux axes. Avec Dieu, c’est pareil : de nous vers Dieu, et de Dieu vers nous.

Dans la relation de Dieu vers nous, c’est facile : Dieu est amour, vérité, justice et paix, et il nous donne tout de qui est bon et beau : le foi, l’espérance, l’amour, l’intelligence et tous les autres dons de l’Esprit Saint … mais il ne nous les impose pas. Il nous laisse libre de les accepter ou non.

Tout vient de toi, ô Père très bon.

Dans la relation de nous vers Dieu, c’est plus compliqué … à cause de notre nature humaine. Et chacun est différent des autres !

Mais on peut quand même se poser quelques questions.

Sommes-nous attentifs à Dieu ? Est-ce que nous avons des relations faciles et régulières ? Est-ce que nous ne faisons que de lui demander des choses pour notre satisfaction personnelle … et est-ce que nous le remercions quand il le faut ? Est-ce que nous l’entendons quand il nous parle par différents canaux : méditations, personnes, événements, livres … et surtout est-ce que nous mettons en pratique ce qu’il nous dit ?

Parce que c’est là que va intervenir Satan pour nous faire dévier du ’droit chemin’, le chemin qui nous est indiqué par Jésus, le chemin qui mène au ciel !

Et c’est là aussi que va intervenir l’Esprit Saint pour nous aider dans nos choix, pour nous apprendre la clairvoyance !

Et ces obstacles déposés sur le ’droit chemin’ sont nombreux. On en trouve plusieurs dans l’évangile : … je ne peux pas, je me marie … j’ai acheté des bœufs … je dois enterrer mon père … l’argent … le pouvoir … l’injustice … l’autosatisfaction : je ne suis pas comme …

Nous trouvons toujours des excuses pour ne pas écouter Dieu.

Tout comme Pierre, nous devons lutter contre le Démon qui veut nous écarter de Dieu. Et c’est possible. Car Pierre, malgré son reniement, aimait Jésus. Et c’est sur cette question-là que Jésus va lui confier l’Église à venir : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ?  … Seigneur, toi, tu sais tout : tu sais bien que je t’aime … Sois le berger de mes brebis. » (Jn 21,17).

Et il y en a d’autres qui, comme Pierre, ont montré beaucoup d’amour dans une dimension de foi. Ce sont ceux qu’on appelle les saints … et ils sont nombreux …

Il y a ceux qui sont sur le calendrier. On connaît leur nom, ce qu’ils ont fait …

Mais il y en a encore bien plus dont on ne sait rien, comme le dit le chant : « Ils sont nombreux les bienheureux qui n’ont jamais fait parler d’eux et qui n’ont pas laissé d’image… Tous ceux qui ont, depuis des âges, aimé sans cesse et de leur mieux autant leurs frères que leur Dieu… » (W 72)

Ce sont tous ceux que le pape François appelle « Les saints de la porte d’à côté » (GE 7), ceux qu’il nous donne comme modèle pour que nous devenions comme eux …

Et nous pouvons le faire !

Mais pour cela, il nous faut beaucoup d’humilité pour devenir instruments entre les mains de Dieu, comme le dit le père Pierre Leplay : « Entre tes mains, Seigneur, comme mon stylo entre mes mains ».

Seigneur Jésus,

quelle leçon tu donnes à Saint Pierre !

Il donne une très bonne réponse à ta question,

mais tu ne veux pas

qu’il se croit supérieur aux autres,

tu veux lui apprendre l’humilité.

Et ce n’est pas toujours facile à accepter.

nous en savons quelque chose

nous qui voulons toujours paraître.

Apprends-nous à devenir humble

comme toi-même l’a toujours été !

 

Francis Cousin

 

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Prière dim ordinaire A 21°