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La Passion de Jésus, Révélation de l’Amour Fou de Dieu pour tout homme (D. Jacques Fournier)…

Les récits de la Passion sont toujours durs à entendre : tant de souffrances pour Jésus, cet innocent « qui a passé en faisant le bien » (Ac 10,18), en ne faisant que du bien, et tant d’injustice, de jalousie, de calomnies, de méchanceté, de cruauté et de violence de la part des hommes. Et pourtant, c’est en affrontant résolument ce côté sombre de l’humanité que Jésus nous révèle l’intensité de l’Amour de Dieu pour tous les hommes… C’est comme s’il nous disait : « Vous pouvez me faire tout cela, rien, absolument rien ne pourra m’empêcher de vous aimer… Bien plus, si vous, « créés à l’image et ressemblance de Dieu » (Gn 1,26-28), ce Dieu qui est Amour (1Jn 4,8.16), qui n’est qu’Amour, vous agissez ainsi, c’est que vous êtes des grands malades… Alors, je vais supporter et offrir toutes les souffrances que vous pourrez m’infliger pour votre guérison à tous »…

Pour voir à quel point cet Amour se manifeste dans toutes les circonstances de la Passion, vous pouvez cliquer sur le titre suivant. Vous accéderez alors à un travail réalisé sur la base du livre de Théophile PENNDU, « Jésus Sauveur » (Paris 1991)…

En vous souhaitant, dans les circonstances exceptionnelles que nous vivons, la plus belle semaine sainte possible,

D. Jacques Fournier

La Passion – Révélation du Dieu Amour

 




Comment lire la Bible, œuvre tout à la fois de Dieu et des hommes…

« Dieu est invisible », nous dit le Concile Vativan II, mais « il lui a plu, dans sa bonté et sa sagesse, de se révéler lui-même et de faire connaître le mystère de sa volonté » (Dei Verbum (DV) & 2)… Tel est le point de départ que nous ne devrons jamais oublier… « Dieu Est Esprit » (Jn 4,24), nous dit St Jean, et il est donc, par nature, « invisible » à nos seuls yeux de chair. Mais il prend l’initiative de « se révéler », une notion qui intervient 32 fois dans notre texte. C’est donc Lui, en premier, qui vient à nous et qui désire se faire connaître tel qu’Il Est… A nous maintenant d’accepter les moyens qu’il a choisis de mettre en œuvre pour « se révéler », et surtout d’accepter ce qu’il désire nous « révéler »… « A Dieu qui révèle, il faut apporter « l’obéissance de la foi » (Rm 16,26 ; 1,5 ; 2 Co 10, 5-6), par laquelle l’homme s’en remet tout entier librement à Dieu… Pour apporter cette foi, l’homme a besoin de la grâce de Dieu qui fait les premières avances et qui l’aide, et du secours intérieur de l’Esprit Saint pour toucher son cœur et le tourner vers Dieu, pour ouvrir les yeux de son âme, et donner à tous la joie profonde de consentir et de croire à la vérité » (DV & 5). C’est à cet Esprit Saint que nous nous confions tous aujourd’hui…

            Pour se révéler, Dieu a choisi un homme « Abraham », puis des hommes issus de sa lignée, « les fils d’Abraham », les Israélites, qui vont mettre par écrit ce qui leur a été donné de percevoir de son Mystère : « Pour la rédaction des Livres saints, Dieu a choisi des hommes ; il les a employés en leur laissant l’usage de leurs facultés et de toutes leurs ressources, pour que, lui-même agissant en eux et par eux, ils transmettent par écrit, en auteurs véritables, tout ce qu’il voulait, et cela seulement » (DV & 11). Ainsi, « Dieu parle dans la Sainte Ecriture par des intermédiaires humains, à la façon des hommes ». « Pour comprendre correctement ce que l’auteur sacré a voulu affirmer par écrit, il faut donc soigneusement prendre garde aux façons de sentir, de dire ou de raconter, qui étaient habituelles dans son milieu et à son époque » (DV & 12).

            Ainsi par exemple, les archéologues ont trouvé en Irak une tablette d’argile qui raconte l’histoire de Sargon Ier, dit l’ancien, un Sémite, fondateur de la puissante dynastie akkadienne, et qui vécut aux environs des années 2350 av. JC, donc plus de mille ans avant Moïse : « Ma mère m’enfanta en cachette, elle me plaça dans un panier de jonc et elle en ferma la porte avec du bitume. Elle m’abandonna au Fleuve, et il ne me submergea point. Le Fleuve m’apporta à Akki, le puiseur d’eau. Akki me prit dans la bienveillance de son cœur »… Or, en 1887, une mission archéologique découvrit en Egypte la capitale du Pharaon Aménophis IV (1370-1353; rappel: Ramsès II, 1290-1224), à Tell el Amarna, et dans une des salles de l’ancien palais, ils trouvèrent des tablettes d’argile… L’une d’entre elles raconte l’épopée du roi akkadien Sargon Ier. Ce type de récit légendaire faisait donc partie du folklore du Proche Orient. Les Israélites, en écoutant le récit de la naissance de Moïse savaient donc bien à quoi s’en tenir quant à sa valeur strictement historique. Quelle était donc l’information qu’ils en retenaient ? Avant tout que Moïse était un personnage exceptionnel quant à sa destinée, comparable aux plus grands des rois de la terre…

            Les textes bibliques portent aussi la trace des connaissances considérées comme acquises au moment où l’auteur écrivait… Les anciens, par exemple, pensaient que la terre était plate, reposant sur les colonnes de l’univers, et que le ciel était comme une demi sphère posée sur elle. Par dessous, les oiseaux du ciel volaient tout « contre » elle (Gn 1,20), et par dessus se trouvaient les eaux d’en haut (Gn 1,7) qui tombaient sur la terre lorsque Dieu ouvrait « les écluses du ciel » (Gn 7,11 ; 8,2)… Deuxième exemple : ils pensaient que la vie de l’homme est « dans son sang » (Lv 17,11 ; 17,14). Puisque la vie est sacrée, qu’elle est donnée par Dieu et qu’elle n’appartient qu’à lui seul, il était donc interdit de consommer ce sang (Dt 12,23)… Les progrès de la médecine nous donnent maintenant une autre compréhension de la vie humaine… Ces considérations sur le sang et les interdits liés à sa consommation sont donc « dépassés ». Mais il reste du texte biblique le respect incontournable qui doit être manifesté à toute vie humaine…

            Pour bien interpréter les textes bibliques, il faut aussi tenir compte du cheminement d’Israël, au fil des siècles, dans la découverte progressive du Mystère de Dieu. Dei Verbum parle ainsi des « cheminements de Dieu avec les hommes » (DV &14). Au départ, Dieu a, par exemple, été présenté comme ayant des réactions semblables à celles des hommes : il s’irrite des infidélités, se met en colère, tape, frappe et punit en tuant non seulement le pécheur mais encore tous ceux et celles qui l’entourent… Petit à petit cette vision sera corrigée : non, seul le pécheur mourra par suite de ses actes, diront les prophètes Jérémie (Jr 31,29-30) et Ezéchiel (Ez 18)… Mais avec le Christ, nous découvrons un Dieu qui prend sur lui les conséquences de nos péchés pour nous en libérer (Mt 8,17) : Lui qui n’a jamais péché va expérimenter notre mort et nos ténèbres, pour que nous vivions de sa Vie, dans sa Lumière…

            « Dieu est donc, l’inspirateur et l’auteur des livres des deux Testaments » (DV & 16) mais il le fait en respectant pleinement l’homme qu’il inspire, cet homme qui appartient à son époque et qui chemine, pas à pas, avec ses frères vers la vérité tout entière, guidé, éclairé et soutenu par l’Esprit Saint (Jn 16,13). L’auteur biblique est donc tout à la fois inspiré par Dieu et pleinement lui‑même, avec ses convictions, et les connaissances propres à son époque et au milieu où il vit, autant d’éléments qui ont peut-être besoin d’être corrigés … « Les livres de l’Ancien Testament présentent à tous, selon la situation du genre humain avant le salut apporté par le Christ, une connaissance de Dieu et de l’homme et des méthodes dont Dieu, qui est juste et miséricordieux, agit avec les hommes. Ces livres contiennent donc des choses imparfaites et provisoires » (DV & 15) et il faut bien sûr en être conscients lorsque nous les lisons… Mais c’est la pleine révélation apportée par le Christ qui nous permettra, petit à petit, avec l’aide de ce même Esprit qui les a inspirés, de tendre vers une interprétation de plus en plus juste de tous ces textes bibliques…

            Tout l’Ancien Testament n’avait donc d’autre but que de « préparer la venue du Christ Rédempteur de tous » en « l’annonçant prophétiquement » (DV & 15). A ce titre, il est tout entier « une prophétie » où « est caché le Mystère de notre salut ». « Dieu donc, inspirateur et auteur des livres des deux Testaments, s’y est pris si sagement que le Nouveau Testament était caché dans l’Ancien, et que l’Ancien devenait clair dans le Nouveau » (DV & 16).

            Et ce Nouveau Testament a été écrit avec les mêmes principes que l’Ancien :

              – L’Esprit Saint était là pour éclairer, guider, inspirer les Apôtres : « Après l’Ascension du Seigneur, les Apôtres ont transmis à leurs auditeurs ce que Jésus avait dit et fait, avec cette intelligence plus profonde dont ils jouissaient eux‑mêmes, instruits qu’ils étaient par les événements glorieux du Christ et enseignés par la lumière de l’Esprit de vérité » (DV & 19).

         – Mais ils étaient toujours pleinement eux-mêmes. Ils ont donc écrits en « vrais auteurs », chacun avec son tempérament, ses goûts, son éducation, dans le contexte historique et social de son époque, avec les connaissances, coutumes et conventions propres à cette époque. « Les auteurs sacrés ont composé les quatre Évangiles, en triant certains détails entre beaucoup de ceux que la parole ou déjà l’écriture avait transmis, en en faisant entrer quelques-uns en une synthèse, ou en les exposant en tenant compte de l’état des églises, en gardant enfin la forme d’une proclamation, afin de pouvoir ainsi toujours nous communiquer des choses vraies et authentiques sur Jésus » (DV & 19).

            Ainsi, « après avoir à maintes reprises, et sous diverses formes, parlé jadis par les Prophètes, Dieu, « en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par son Fils » (Hb 1,1‑2). Il a en effet envoyé son Fils, c’est-à-dire le Verbe éternel qui éclaire tous les hommes, pour habiter parmi les hommes et leur faire connaître les secrets de Dieu » (DV & 4). Et quels sont-ils ? « Il a plu à Dieu, dans sa bonté et sa sagesse, de se révéler lui-même et de faire connaître le mystère de sa volonté : par le Christ, Verbe fait chair, les hommes ont, dans le Saint-Esprit, accès auprès du Père, et deviennent participants de la nature divine » (DV & 2). « Cette révélation », apportée par le Christ, « provient de l’immensité de la charité » de Dieu, de sa miséricorde et de son infinie tendresse pour tous les hommes. En effet, « Jésus‑Christ, c’est Dieu avec nous, pour que nous soyons délivrés des ténèbres du péché et de la mort, et que nous soyons ressuscités pour la vie éternelle » (DV & 4). Avec Lui et par Lui, « Dieu s’adresse aux hommes comme à des amis, et converse avec eux pour les inviter à entrer en communion avec lui et les recevoir en cette communion » (DV & 2). « Quand il écoute religieusement et proclame hardiment la parole de Dieu, le saint Concile obéit donc aux paroles de saint Jean : « Nous vous annonçons la vie éternelle, qui était auprès du Père et qui nous est apparue : ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, afin que vous soyez vous aussi en communion avec nous, et que notre communion soit avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ » (1Jn 1, 2-3).

        St Jean a donc bien conscience d’avoir été introduit par sa foi au Christ dans un Mystère de Communion avec Lui, et ce Mystère est de l’ordre de la vie, la Vie de Dieu, la Vie éternelle… « Ainsi l’Eglise, dans sa doctrine, sa vie et son culte, perpétue et transmet à toutes les générations tout ce qu’elle est elle-même, tout ce qu’elle croit » (DV & 8). A ce titre, ce qu’ils écrivent, en vrais auteurs sous l’inspiration de l’Esprit Saint, est aussi un témoignage de ce qu’ils vivent, « des réalités spirituelles qu’ils expérimentent » eux-mêmes (DV & 8). Et ils ont conscience que ce trésor de Vie reçu du « Père des Miséricordes » (2Co 1,3) est offert à tout homme qui accueillera leur témoignage avec bonne volonté…

           Le premier but de la Parole de Dieu n’est donc pas de nous apporter une connaissance de type purement intellectuelle : elle nous est donnée pour qu’avec elle et par elle, nous entrions petit à petit dans un Mystère de Communion avec Dieu, Mystère de Communion et de Vie dont l’Esprit Saint est l’artisan. En effet, lorsque nous ouvrons notre cœur à cette Parole, l’Esprit Saint nous rejoint et nous communique « quelque chose » qui est de l’ordre de la Vie même de Dieu. « C’est l’Esprit qui vivifie », et c’est bien parce qu’il en est ainsi que « mes paroles sont Esprit et elles sont Vie » (Jn 6,63). Autrement dit, au moment où Jésus et les Apôtres nous parlent de cette Vie éternelle qui vient du Père, « l’Esprit Saint touche nos cœurs » (DV & 5) en leur communiquant une réalité qui est de l’ordre de la vie, la Vie même de Dieu… « Tu as les Paroles de la Vie éternelle », dit un jour St Pierre à Jésus… Il vivait en l’écoutant « quelque chose » qu’il n’avait jamais vécu auparavant…Les Ecritures « inspirées par Dieu et consignées une fois pour toutes par écrit, nous communiquent, de façon immuable, la parole de Dieu lui-même, et dans les paroles des Prophètes et des Apôtres font retentir à nos oreilles la voix du Saint-Esprit » (DV & 21), une voix qui est de l’ordre de la Vie, et que l’on entend en « vivant » ce qu’il nous est donné de vivre, gratuitement, par Amour, par Miséricorde… « L’Esprit Saint, par qui la voix vivante de l’Evangile retentit dans l’Eglise et par l’Eglise dans le monde, introduit ainsi les croyants dans tout ce qui est vérité » (DV & 8), une vérité qui est Vie, Mystère de Communion avec le Dieu Vivant et Source de Vie…

            Aussi est-il nécessaire que « les prêtres du Christ, les diacres, les catéchistes », bref, tous les fidèles, « s’attachent aux Ecritures par une lecture assidue et une étude soigneuseMais la prière — qu’on se le rappelle — doit accompagner la lecture de la Sainte Ecriture pour que s’établisse un dialogue entre Dieu et l’homme » (DV & 25), dialogue où « Dieu », « dans l’immensité de sa charité », « s’adresse aux hommes comme à des amis, et converse avec eux pour les inviter à entrer en communion avec lui et les recevoir en cette communion » (DV & 2). Nous avons tous été créés pour vivre de cette Vie de l’Esprit qui, seule, est capable de combler pleinement nos cœurs, et donc de nous communiquer ce à quoi nous aspirons tous : ce vrai Bonheur qui est Plénitude de Vie et de Paix… Tel est le trésor offert à toute lecture priante de la Parole de Dieu, « surtout du Nouveau Testament, et en tout premier lieu, des Evangiles » (DV & 25).

            « Ainsi donc, par la lecture et l’étude des Livres saints,  » que la Parole de Dieu accomplisse sa course et soit glorifiée  » (2 Th 3,1), et que le trésor de la révélation, confié à l’Eglise, remplisse de plus en plus les cœurs des hommes ». Ce trésor, c’est l’Esprit Saint, « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6,63) et qui remplissait les cœurs de Jésus (Lc 4,1), Jean‑Baptiste (Lc 1,15), Marie (Lc 1,28 avec Hb 10,29), Elisabeth (Lc 1,41), Zacharie (Lc 1,67), Etienne (Ac 7,55), Paul (Ac 9,17) et tous les Apôtres et disciples de Jésus (Ac 2,4). Nous avons tous été créés pour cela : être « un seul esprit avec le Seigneur » (1Co 6,17), dans « l’unité de l’Esprit » (Ep 4,4), « l’Esprit s’unissant à notre esprit » (Rm 8,16) pour nous introduire dans cette « communion du Saint Esprit » (2Co 13,13) qui est Mystère de Vie avec Dieu puisque « l’Esprit vivifie » (Jn 6,63). Et chaque fois que nous lisons la Parole de Dieu, qui est un témoignage de Jésus sur cette Vie de l’Esprit qu’il reçoit du Père avant tous les siècles (Jn 5,26), ou un témoignage des Apôtres sur cette même Vie de l’Esprit qu’ils ont reçu eux aussi par leur foi en Jésus (Ga 2,20), l’Esprit se joint à cette Parole pour nous donner de « vivre » ce qu’elle nous dit… « Celui que Dieu a envoyé prononce les Paroles de Dieu car il donne l’Esprit sans mesure » (Jn 3,34).

            C’est pourquoi il est « permis d’espérer une nouvelle impulsion de la vie spirituelle à partir d’un respect accru pour la Parole de Dieu, qui « demeure à jamais » (Is 40,8 ; cf. 1P 1,23-25) » par « l’Esprit qui est Seigneur et qui donne la Vie », la Vie éternelle…

  1. Jacques Fournier




Introduction à la Lectio Divina

« Je possède une Bible, et tous les jours j’en lis un passage, mais c’est curieux comme les mêmes lignes peuvent avoir une signification différente, comme on les sent différemment, suivant la grâce qui nous habite. Ce qui est un jour « torrent d’eau vive » n’est plus le lendemain qu’une phrase connue qui n’a plus grande valeur. Moi qui, il y a quelques mois, étais persuadé qu’on ne pouvait lire l’Evangile sans se convertir, je m’aperçois aujourd’hui que les vérités ardentes qu’il renferme ne le sont que si on les lit avec les yeux de la grâce. « Je te remercie, Père, de ce que tu as caché ces choses aux grands, et les as dévoilées aux petits » » (Jacques Fesch, condamné à mort et exécuté en 1957).

 

Rencontrer par sa Parole le Christ Ressuscité

La « lectio divina », « lecture divine » de la Parole de Dieu, requiert tout d’abord un contexte de foi en la réalisation concrète des Promesses du Christ. De sa propre initiative, il a en effet dit à ses disciples juste avant sa mort et sa résurrection : « Je ne vous laisserai pas orphelins, je viendrai vers vous. Encore un peu de temps, et le monde ne me verra plus », car bientôt il mourra sur une croix et sera mis au tombeau. Mais le troisième jour, le Père le ressuscitera d’entre les morts par la Puissance de l’Esprit Saint, et d’une manière invisible aux yeux de chair, il se rendra présent à la vie et au cœur de ses disciples. Il leur donnera d’avoir part à son propre Esprit, cet Esprit qui remplit son cœur en Plénitude, illumine de l’intérieur le regard et communique à celui qui le reçoit la Vie même de Dieu. Aussi, vous qui croyez en moi, vous qui me laissez faire en vos cœurs mon œuvre de Salut et de Révélation, « vous verrez que je vis, et vous aussi vous vivrez ». Et la Bible de Jérusalem explique en note : « Pour le monde, c’en sera fini de Jésus. Les disciples au contraire le verront vivant, ressuscité, d’une vision qui ne sera pas seulement sensible, mais spirituelle et intérieure, par la foi ». Seuls, en effet, les Apôtres et quelques disciples ont reçu la grâce de le voir ressuscité de leurs yeux de chair, de toucher son corps avec leurs doigts de chair. Mais Jésus promet ici à tous les disciples de tous les temps qu’il se fera reconnaître à leur vie, à leur cœur… Ils ne le verront pas avec leurs yeux de chair, ils ne le toucheront pas de leurs doigts de chair, mais le Christ se fera la Vie de leur vie (Gal 2,19b-20).… C’est ce mystère de communion, qui les saisira tout entier au plus profond de leur être, qu’ils sont invités à reconnaître avec les yeux de la foi : « Ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père et vous en moi et moi en vous. Celui qui a mes commandements et qui les garde, c’est celui-là qui m’aime ; or celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; et je l’aimerai et je me manifesterai à lui » (Jn 14,18-21)…

 

Mystère de gratuité, d’Amour et de Miséricorde

« Je me manifesterai à lui »… Grande promesse de Jésus, faite de nouveau de sa propre initiative à des hommes blessés par le péché, intérieurement et spirituellement malades… Mais, disait-il, « ce ne sont justement pas les bien-portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs » (Mt 9,10-13). Dieu m’a fait comprendre, disait Jacques Fesch, « que ce qui m’a été donné n’est pas dû à mes mérites, comme j’aurai eu tendance à le croire, mais n’est qu’un don gratuit qui procède de sa miséricorde ».

Cette promesse de Jésus, « je me manifesterai à lui », se réalisera donc non pas parce que telle ou telle personne serait meilleure que les autres, mais sur la seule base de cet Amour Gratuit et Miséricordieux qu’Il nous porte. C’est ainsi que St Paul reçut, au moment où il s’y attendait le moins, la visite du Christ ressuscité… Il était en chemin pour aller persécuter les chrétiens de Damas ! « Voici une parole sûre », écrira-t-il plus tard (il l’a vécue !), « elle mérite d’être accueillie sans réserve : le Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs ; et moi, le premier, je suis pécheur, mais si le Christ m’a fait miséricorde, c’est pour que je sois le premier en qui toute sa générosité se manifesterait ; je devais être le premier exemple de ceux qui croiraient en lui en vue de la vie éternelle » (1Tm 1,12-17).

La Lectio Divina se vivra donc à la Lumière de cet Amour du Christ qui continue jour après jour de chercher les brebis égarées que nous sommes, de frapper inlassablement à la porte de nos cœurs… Ouvrir sa Bible ou son missel, prendre un temps pour lui, c’est justement lui offrir la possibilité de nous rencontrer et d’agir en nous selon sa Parole : « Père, je leur ai fait connaître ton Nom et je le leur ferai encore connaître, pour que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux et moi en eux » (Jn 17,26)…

 

Lire la Parole avec l’Esprit Saint

La Lectio Divina s’appuie encore sur une autre promesse du Christ, qui rejoint en fait les précédentes : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements ; et je prierai le Père, et il vous donnera un autre Paraclet » (Défenseur, Avocat…) « pour qu’Il soit avec vous à jamais, l’Esprit de Vérité que le monde ne peut pas recevoir, parce qu’il ne le voit pas ni ne le reconnaît. Vous, vous le connaissez, parce qu’il demeure auprès de vous, et en vous il sera » (Jn 14,15-17).

Jésus était déjà un Guide, un Défenseur, un Avocat pour ses disciples : il veillait sur eux, il les encourageait, les exhortait, leur expliquait sa Parole… Mais il sait qu’il doit maintenant les quitter pour un autre mode d’existence : il va mourir puis ressusciter et monter vers le Père. Mais il ne les abandonnera pas pour autant. Non seulement il continuera de leur être mystérieusement tout proche, mais il leur sera uni de cœur par la communion d’un même Esprit, une grâce que leur donnera cet Autre Défenseur envoyé par le Père : l’Esprit Saint. Invisible lui aussi à leurs yeux de chair, mais bien présent et agissant avec eux et en eux, il poursuivra l’œuvre du Christ et les aidera à entrer toujours plus avant dans cette Révélation du Père que le Fils est venu nous proposer. « Le Paraclet, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, il vous rappellera tout ce que je vous ai dit, et vous introduira dans la vérité tout entière ». Son premier rôle sera de rendre témoignage à la Parole du Christ, et il le fera au cœur du disciple par une action toute intérieure, discrète, invisible mais souveraine qui, petit à petit, emporte l’adhésion de celui qui s’y prête. « L’Esprit Saint fera naître la certitude intime de ce que les Apôtres annoncent extérieurement » (Jn 14,25-26 ; 16,12-15)…

 

Pour vivre l’aventure de la Lectio Divina

« Le saint Concile exhorte avec force et de façon spéciale tous les chrétiens,… à acquérir par la lecture fréquente des divines Ecritures « une science éminente de Jésus-Christ » (Philippiens 3, 8), car « ignorer les Ecritures, c’est ignorer le Christ » (St Jérôme) »…

Et la prière doit accompagner la lecture de la Sainte Ecriture pour que s’établisse un dialogue entre Dieu et l’homme, car « c’est à lui que nous nous adressons quand nous prions ; c’est lui que nous écoutons, quand nous lisons les oracles divins » (St Ambroise) » (Concile Vatican II ; constitution Dei Verbum, & 25).

 

Demander le secours de l’Esprit Saint

La Lectio Divina – lecture de la Parole de Dieu dans un contexte de prière – est l’œuvre conjointe de deux acteurs : celui ou celle qui lit la Parole et l’Esprit Saint qui, invisiblement, l’accompagne et agit en son cœur.

Il s’agira donc tout d’abord d’être en forme, le plus pleinement soi-même, dans une atmosphère de calme et de recueillement qui favorisera l’attention.

Et puisque cette lecture croyante se fait à deux, le premier pas sera de prier et de demander de tout cœur la Présence et l’aide de l’Esprit Saint, le plus simplement possible, dans la confiance. « Si vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est dans les cieux donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent », disait Jésus. Et un jour, il déclara à une femme de Samarie : « Si tu savais quel est le don de Dieu et qui est celui qui te dit « Donne-moi à boire », c’est toi qui l’aurais prié et il t’aurait donné de l’Eau Vive », c’est-à-dire l’Esprit Saint (Lc 11,9-13 ; Jn 4,7-14 ; cf Jean 7,37-39 ; 14,15-17 ; 14,23-26 ; 16,12-15 ; 1Co 2,9-12 ; Ephésiens 1,15-22 ; 3,14-21 ; 1Th 4,8 ; Ac 2,37-41 ; 5,29-32)…

On peut marquer cette première étape par un petit geste corporel : se mettre à genoux pour la prière, allumer une bougie… Puis on se lance dans l’aventure en prenant ou bien les lectures proposées par l’Eglise pour l’Eucharistie du jour, ou bien un Evangile dans lequel on avancera pas à pas… Le premier travail consistera tout simplement à faire attention à cette Parole que nous lisons, une Parole qui est avant tout l’annonce d’une Bonne Nouvelle : « Je Suis la Lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la Lumière de la Vie… Je suis venu en effet pour qu’on ait la Vie, et qu’on l’ait surabondante » (Jean 8,12 ; 10,10 ; 12,46)…

 

Vivre la Parole avec l’Esprit Saint

L’œuvre de l’Esprit de Vérité est de rendre témoignage à la Vérité, et notamment aux Paroles de Celui qui s’est présenté à nous comme étant « le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14,6). Ce témoignage est Celui que Dieu rend à son Fils, et il est avant tout de l’ordre de la Vie. Lisons ensemble un extrait de la Première Lettre de St Jean, et remarquons le lien qui unit toutes les expressions en caractères gras. Au tout début, il insiste fortement sur la réalité de l’Incarnation du Fils Unique. Le Verbe s’est fait chair, une chair qu’il donnera pour la vie du monde. Et sur la croix, un soldat romain lui transpercera le cœur, d’où jaillira de l’eau et du sang …

« Jésus, le Fils de Dieu, c’est lui qui est venu par l’eau et par le sang :

non avec l’eau seulement mais avec l’eau et avec le sang.

Et c’est l’Esprit qui rend témoignage, parce que l’Esprit est la Vérité.

Il y en a ainsi trois à témoigner : l’Esprit, l’eau et le sang,

et ces trois tendent au même but.

Si nous recevons le témoignage des hommes,

le témoignage de Dieu est plus grand.

Car c’est le témoignage de Dieu,

le témoignage que Dieu a rendu à son Fils.

Celui qui croit au Fils de Dieu a ce témoignage en lui.

Celui qui ne croit pas en Dieu fait de lui un menteur,

puisqu’il ne croit pas au témoignage que Dieu a rendu à son Fils.

Et voici ce témoignage : c’est que Dieu nous a donné la vie éternelle

et que cette vie est dans son Fils.

Qui a le Fils a la vie ;

qui n’a pas le Fils n’a pas la vie.

Je vous ai écrit ces choses, à vous qui croyez au nom du Fils de Dieu,

pour que vous sachiez que vous avez la vie éternelle »

(1Jn 5,5-13).

Dieu rend donc témoignage à son Fils par l’action de l’Esprit Saint et ce témoignage est de l’ordre de la Vie. Ecouter les Paroles du Christ avec foi, c’est donc ouvrir son cœur à ce témoignage de Dieu et de l’Esprit qui est Vie… Et les Paroles du Christ deviennent « Esprit et Vie »… « Tu as les Paroles de la Vie éternelle », disait St Pierre à Jésus (Jn 6,68 et 6,63) …

 

 

Observer, méditer, contempler

Pour nous aider à pratiquer la Lectio Divina, le Cardinal Martini, archevêque de Milan, propose, après le temps de prière à l’Esprit Saint, les trois étapes suivantes :

1 – Observer (ou lire) : « La lecture consiste à lire et relire la page de l’Ecriture en mettant en relief les éléments importants ». On peut prendre une feuille de papier et recopier le passage choisi ; puis, avec des crayons ou des stylos de différentes couleurs, on peut « souligner les paroles qui frappent », ou encore « les verbes, les sujets, les sentiments exprimés, les mots clefs. Ce faisant, notre attention est stimulée ; l’intelligence, la fantaisie et la sensibilité se mettent en mouvement et un passage évangélique qui semblait trop connu devient comme neuf. Depuis tant d’années je lis l’Evangile et pourtant, chaque fois que j’en reprends la lecture, je découvre des aspects nouveaux. Ce premier travail peut occuper un certain temps si nous sommes ouverts à l’Esprit »…

2 – Méditer : « La méditation est la réflexion sur les valeurs que fait ressortir le texte. On pose la question : qu’est-ce que le texte me dit ? Quel message en référence à aujourd’hui est proposé dans ce passage comme parole du Dieu vivant ? Comment suis-je bousculé par la foi qui se trouve exprimée dans les actions, les paroles, les thèmes ? »

3 – Prier ou contempler : « La contemplation est difficilement exprimable et explicable. Il s’agit de demeurer avec amour dans le texte et de passer du texte et du message à la contemplation de Celui qui parle dans chaque page de la Bible : Jésus, Fils du Père qui nous donne l’Esprit. La contemplation est adoration, louange, silence devant celui qui est l’objet ultime de ma prière, le Christ Seigneur, vainqueur de la mort, qui fait connaître le Père, et qui nous donne la joie de l’Evangile. »

« En fait ces trois moments ne sont pas rigoureusement distincts, mais cette division est utile pour celui qui entre dans cette lecture familière de la Bible. Notre prière est ce qui relie les journées les unes aux autres. Et il peut arriver que face à un texte d’Ecriture, nous nous arrêtions un jour davantage sur la méditation et qu’un autre jour, en revanche, nous passions rapidement à la contemplation ».

Quoiqu’il en soit, écrit Marc Sevin, « quand on s’engage dans la Lectio Divina, il s’agit de tenir bon ». Elle peut en effet avoir à certains jours « un côté répétitif et parfois fastidieux. Mais avec un peu de persévérance, elle devient savoureuse » (Marc SEVIN, « LA LECTURE SAINTE ; Guide pour une lecture croyante de la Bible » ; supplément à « Prions en Eglise » aux Editions Bayard Presse, p. 98. Citations du Cardinal Martini p. 25-26.) . Et même si apparemment il ne s’est pas passé grand chose, il se passe néanmoins toujours quelque chose, car « Il » était là, c’est Lui qui l’a promis…

« La Lectio Divina a toujours été et restera toujours, de par son objet même, une tâche austère, un vrai sacrifice spirituel. Source de toute générosité, elle en appelle aussi beaucoup » (Dom Adalbert de Vogüe) ».

« Qui dont est capable de comprendre

toute la richesse d’une seule de tes paroles, Seigneur ?

Ce que nous en comprenons est bien moindre que ce que nous en laissons,

Comme des gens assoiffés qui boivent à une source.

Le Seigneur a coloré sa Parole de multiples beautés,

Pour que chacun de ceux qui scrutent puisse contempler ce qu’il aime.

Et, dans sa Parole, il a caché tous les trésors,

Pour que chacun de nous trouve une richesse dans ce qu’il médite.

La Parole de Dieu est un arbre de vie

qui, de tous côtés, te présente des fruits bénis.

Elle est comme ce rocher qui s’est ouvert dans le désert

Pour offrir à tous les hommes une boisson spirituelle.

Réjouis-toi parce que tu es rassasié,

Mais ne t’attriste pas de ce qui te dépasse.

Celui qui a soif se réjouit de boire,

Mais il ne s’attriste pas de ne pas épuiser la source.

Que la source apaise ta soif, sans que ta soif épuise la source.

Si ta soif est étanchée sans que la source soit tarie,

Tu pourras boire à nouveau, chaque fois que tu auras soif.

Si au contraire, en te rassasiant, tu épuisais la source,

Ta victoire deviendrait ton malheur.

Rends grâce pour ce que tu as reçu, et ne regrette pas ce qui demeure inutilisé.

Ce que tu as pris et emporté est ta part ; mais ce qui reste est aussi ton héritage.

Ce que tu n’as pas pu recevoir aussitôt, à cause de ta faiblesse,

Tu le recevras une autre fois, si tu persévères.

N’aie donc pas la mauvaise pensée de vouloir prendre d’un seul trait

Ce qui ne peut être pris en une fois ;

Et ne renonce pas par négligence,

A ce que tu es capable d’absorber peu à peu. »

Saint Ephrem (Diatessaron I,18.19).

CONSTITUTION DOGMATIQUE DEI VERBUM SUR LA RÉVÉLATION DIVINE

 CHAPITRE I : LA RÉVÉLATION ELLE-MÊME

Nature et objet de la révélation 

  1. Il a plu a Dieu, dans sa bonté et sa sagesse, de se révéler lui-même et de faire connaître le mystère de sa volonté (2): par le Christ, Verbe fait chair, les hommes ont, dans le Saint-Esprit, accès auprès du Père, et deviennent participants de la nature divine (3). Ainsi par cette révélation, provenant de l’immensité de sa charité, Dieu, qui est invisible (4), s’adresse aux hommes comme à des amis (5), et converse avec eux (6) pour les inviter à entrer en communion avec lui et les recevoir en cette communion. Cette économie de la révélation se fait par des actions et des paroles si étroitement liées entre elles, que les oeuvres accomplies par Dieu dans l’histoire du salut rendent évidentes et corroborent la doctrine et l’ensemble des choses signifiées par les paroles, et que les paroles proclament les oeuvres et font découvrir le mystère qui s’y trouve contenu. Mais la vérité profonde aussi bien sur Dieu que sur le salut de l’homme, c’est par cette révélation qu’elle resplendit à nos yeux dans le Christ, qui est à la fois le médiateur et la plénitude de la révélation tout entière (7).

  1. A Dieu qui révèle, il faut apporter  » l’obéissance de la foi  » (Rom. 16, 26; coll. Rom. 1, 5; 2 Cor. 10, 5-6), par laquelle l’homme s’en remet tout entier librement à Dieu en apportant  » au Dieu révélateur la soumission complète de son intelligence et de sa volonté  » (18) et en donnant de toute sa volonté son assentiment à la révélation qu’Il a faite. Pour apporter cette foi, l’homme a besoin de la grâce de Dieu qui fait les premières avances et qui l’aide, et du secours intérieur de l’Esprit-Saint pour toucher son coeur et le tourner vers Dieu, pour ouvrir les yeux de son âme, et donner  » à tous la joie profonde de consentir et de croire à la vérité  » (19). Mais pour que l’on pénètre toujours plus avant dans la connaissance de la Révélation, le même Esprit Saint ne cesse par ses dons de rendre la foi plus parfaite.

 

Respect de l’Eglise pour les Saintes Ecritures 

  1. L’Eglise a toujours témoigné son respect à l’égard des Ecritures, tout comme à l’égard du Corps du Seigneur lui-même, puisque, surtout dans la Sainte Liturgie, elle ne cesse, de la table de la Parole de Dieu comme de celle du Corps du Christ, de prendre le pain de vie et de le présenter aux fidèles. Elle les a toujours considérées, et les considère, en même temps que la Tradition, comme la règle suprême de sa foi, puisque, inspirées par Dieu et consignées une fois pour toutes par écrit, elles nous communiquent, de façon immuable, la parole de Dieu lui‑même, et dans les paroles des Prophètes et des Apôtres font retentir à nos oreilles la voix du Saint-Esprit. La prédication ecclésiastique tout entière, tout comme la religion chrétienne elle-même, il faut donc qu’elle soit nourrie et guidée par la Sainte Ecriture.

Car dans les Livres saints, le Père qui est aux cieux s’avance de façon très aimante à la rencontre de ses fils, engage conversation avec eux; une si grande force, une si grande puissance se trouve dans la Parole de Dieu, qu’elle se présente comme le soutien et la vigueur de l’Eglise, et, pour les fils de l’Eglise, comme la solidité de la foi, la nourriture de l’âme, la source pure et intarissable de la vie spirituelle. Aussi valent-elles de façon magnifique pour l’Ecriture Sainte, ces paroles:  » La parole de Dieu est vivante et efficace  » (Héb. 4, 12);  » elle a la puissance de construire l’édifice et de procurer aux fidèles l’héritage avec tous les sanctifiés  » (Act. 20, 32; cf. 1 Thess. 2, 13).

De même le saint Concile exhorte avec force et de façon spéciale tous les chrétiens, surtout les membres des instituts religieux, à acquérir par la lecture fréquente des divines Ecritures  » une science éminente de Jésus-Christ  » (Phil. 3, 8), car  » ignorer les Ecritures, c’est ignorer le Christ « .

Qu’ils approchent donc de tout leur coeur le texte sacré lui-même, soit par la sainte liturgie, qui est remplie des paroles divines, soit par une pieuse lecture, soit par des cours faits pour cela ou par d’autres méthodes qui, avec l’approbation et le soin qu’en prennent les Pasteurs de l’Eglise, se répandent de manière louable partout de notre temps. Mais la prière — qu’on se le rappelle — doit accompagner la lecture de la Sainte Ecriture pour que s’établisse un dialogue entre Dieu et l’homme, car  » c’est à lui que nous nous adressons quand nous prions; c’est lui que nous écoutons, quand nous lisons les oracles divins « .

 

La lectio divina, lecture « en présence » de Dieu…

« Quand on entreprend de lire la Bible, on est un peu comme ces deux hommes qui se trouvaient sur la route de Jérusalem à Emmaüs (Lc 24,13-35) : le Christ est là. Ils ne le savent pas. Il fait silence. Ils ne l’ont pas encore nommé, mais il est présent. Lui est là, saisi par leur lourde tristesse à tous deux.

Lorsque nous ouvrons la Bible, le texte commence par rester muet. Puis il nous interroge, comme Jésus Christ interrogeait ces deux hommes.

Et, tout à coup, les voilà tous les trois qui reprennent la parole biblique (la Bible). Et le texte évoqué, de lointain et de froid qu’il était, devient une parole chaleureuse. Des mots cessent de n’être que des mots. Nos oreilles, notre intelligence, notre vie, sont mises en alerte. Derrière ces mots, il y a QUELQU’UN ! Quelqu’un qui parle, qui nous parle: sa présence commence à être ressentie; les phrases se mettent à vivre et deviennent message, et cet absent ignoré devient proche.

Mais tout ne fait que commencer lorsque la Bible est ouverte, lorsqu’elle est devenue Parole vivante après le silence. Le récit d’Emmaüs nous conduit plus loin : il y a le geste de communion réalisée, les frères retrouvés, la confession commune de foi proclamée, et l’intelligence brûlante a enfin compris que Lui était là ».

« Grâce à la lecture de la Bible… Jésus Christ vient à nous, et nous pouvons aller à Lui, sans qu’on sache très bien qui s’approche de l’autre ».

« Ouvrir la Bible, c’est établir une relation possible avec le texte, avec Celui qui parle à travers le texte, avec ceux auxquels il nous conduit ».

« Ouvrir la Bible, c’est laisser le Christ ouvrir notre esprit et nous faire découvrir les vastes horizons de Dieu dans le monde des hommes »…

Maurice Carrez.

(BAGOT J.-P., Pour lire la Bible (Bar le Duc 1993) p. 3-4)

La Lectio Divina consiste à « nous exposer et à nous ouvrir à la Parole du Dieu vivant, réellement présent dans cette rencontre personnelle à laquelle il me convie »

Joseph-Marie Verlinde.

(VERLINDE J.-M., Initiation à la Lectio Divina p. 30)

La Lectio Divina, Présence de Dieu au cœur de nos lourdeurs humaines…

« L’Ecriture parle pour moi ; elle me parle de Dieu, mais aussi de moi : « Si l’Ecriture est pour nous miroir du Christ et, par lui, miroir de Dieu, elle est aussi le miroir de notre être en face de Dieu » » (Fr. François et Fr. Pierre Yves).

« Naître à la Parole, c’est découvrir au plus intime de soi-même ce qui parle en nous. Le petit Samuel entendait une voix l’appeler par son nom, mais il ne savait pas qui pouvait ainsi l’appeler. Etrange parole qui arrive à se frayer son chemin par-delà nos surdités et nos encombrements. Parole plus vive que le feu, capable de brûler sur son passage tout ce qui lui fait obstacle. Parole plus tranchante que le glaive, qui donne l’audace de couper toutes les hésitations et les attaches qui n’ont rien à voir avec l’essentiel… C’est à travers l’épaisseur de notre humanité, en effet, que la Parole créatrice et recréatrice nous rejoint, nous qui sommes des mal‑entendants » (P. Léo Scherer).

En ce sens, la Lectio Divina n’est pas une lecture au sens classique du terme : lorsque Dieu parle, il m’introduit dans mon propre monde, il ouvre devant moi un chemin d’espérance et de liberté, il me conduit sur ma propre terre. « Lorsqu’elle parle, précise Y. Cattin, la Parole institue son interlocuteur dans son irréductible singularité : Dieu parle à Abram et il devient Abraham. La Parole elle-même fonde son auditeur dans son être même : elle est rencontre de la singularité de celui qui lit avec le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, Dieu de Jésus-Christ, Dieu de tous ceux qui lisent les Ecritures dans la foi. La Parole dans son Ecriture ouvre le monde de mon humanité possible, qui, par la conversion et l’alliance proposée, doit devenir mon humanité réelle. L’Ecriture qui consigne une Parole qui est au-devant de moi, comme un appel à devenir moi-même dans le monde qu’elle écrit ».

L’Ecriture me parle de mon origine dans le plan de Dieu et de ma fin en lui ; elle me parle du chemin à parcourir, de l’exode à accomplir pour passer des ténèbres du mensonge à la lumière de la vérité. Elle dévoile les pensées secrètes de mon cœur et m’invite à la liberté (cf. Hb 4,12) » (VERLINDE J.-M., Initiation à la Lectio Divina p. 26-27).

La Lectio Divina, dans la foi et la Lumière de l’Esprit Saint

« Origène affirme que seule l’Eglise comprend l’Ecriture, parce que l’Eglise « se convertit au Seigneur » dans la foi ; dès lors c’est pour la communauté des croyants, et pour elle seule, que le voile tombe (2Co 3,16). Pour comprendre spirituellement l’Ecriture, le lecteur doit participer au mouvement de conversion de l’Eglise car il est impensable « qu’un incrédule voie la Parole de Dieu ».

« L’origine des Ecritures, précise Saint Bonaventure, ne se situe pas dans la recherche humaine, mais dans la divine Révélation qui provient du Père des Lumières, de qui toute paternité au ciel et sur terre tire son nom (Eph 3,14-15). De lui, par son Fils Jésus Christ, s’écoule en nous l’Esprit Saint. Par l’Esprit Saint, partageant et distribuant ses dons à chacun de nous selon sa volonté, la foi nous est donnée et, par la foi, le Christ habite en nos cœurs. Telle est la connaissance de Jésus-Christ de laquelle découle, comme de sa source, la fermeté et l’intelligence de toute la Sainte Ecriture (Ep 3,14-21).

Il est donc impossible d’entrer dans la connaissance de l’Ecriture sans posséder d’abord, insérée en soi, la foi du Christ, comme la lumière, la porte et le fondement de toute l’Ecriture. Car, aussi longtemps que nous vivons en exil loin du Seigneur, la foi est elle-même le fondement stable, la lumière directrice et la porte d’entrée dans toutes les illuminations surnaturelles. Selon la mesure de cette foi, doit être mesurée la sagesse qui nous est donnée par Dieu, afin de ne pas goûter plus qu’on ne doit, mais de goûter avec sobriété et selon la mesure de foi que Dieu départit à chacun.

Si nous voulons progresser par la route droite des Ecritures, il faut commencer par le commencement, c’est-à-dire accéder à une foi pure au Père des lumières en fléchissant les genoux de notre cœur, afin que par son Fils, dans son Esprit Saint, il nous donne la vraie connaissance de Jésus Christ et, avec sa connaissance, son amour.

Le connaissant et l’aimant, et comme consolidés dans la foi et enracinés dans la charité, il nous sera alors possible de connaître la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur de la Sainte Ecriture et, par cette connaissance, de parvenir à la connaissance entière et à l’amour immuable de la Bienheureuse Trinité. Là tendent les désirs des saints, là se trouve l’aboutissement et l’achèvement de toute vérité et de tout bien. »

Enfin, seul l’Esprit peut nous dévoiler le vrai sens des Ecritures, peut nous faire découvrir ce que la Lectio entend être : une rencontre avec le Verbe éternel venu jusqu’à nous pour nous partager son « bien », c’est-à-dire sa vie filiale.

« J’ai encore beaucoup à vous dire,

mais vous ne pouvez pas le porter à présent.

(13)    Mais quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité,

il vous guidera dans la vérité tout entière ;

car il ne parlera pas de lui-même,

mais ce qu’il entendra, il le dira

et il vous expliquera les choses à venir.

(14)    Lui me glorifiera, car c’est de mon bien qu’il recevra et il vous l’expliquera.

(15)    Tout ce qu’a le Père est à moi.

Voilà pourquoi j’ai dit que c’est de mon bien qu’il reçoit

et qu’il vous expliquera » (Jean 16,12-15).

L’Ecriture ne suffit pas à faire connaître son sens ; celui-ci est communiqué par l’Esprit Saint, dans une révélation dont le fruit en nous est la connaissance chrétienne :

« Pénétrer jusqu’au cœur et à la moelle les Paroles célestes, commente Jean Cassien, en contempler les mystères profonds et cachés avec le regard purifié du cœur, cela, ni la science humaine, ni la culture profane ne l’obtiendra, mais seulement la pureté de l’âme, par l’illumination du Saint Esprit. »

La Lectio doit donc être célébrée comme un sacrement : il n’y a pas de Lectio sans épiclèse (venue de l’Esprit). Car commente Saint Jérôme :

« Seul l’homme spirituel, qui juge de tout, et lui-même n’est jugé par personne (1Co 2,15), peut découvrir le Christ dans les livres divins. »

Ce que confirme Saint Grégoire, le grand docteur de l’intériorité chrétienne :

« Les Paroles de Dieu ne peuvent absolument pas être pénétrées sans la sagesse : car si quelqu’un n’a pas reçu l’Esprit de Dieu, il ne peut d’aucune manière comprendre les Paroles de Dieu ».

Guillaume de St Thierry abonde dans le même sens :

« Parmi les ténèbres et l’ignorance de cette vie, l’Esprit Saint est lui-même, pour les pauvres en esprit, la lumière qui éclaire, la charité qui attire, la douceur qui saisit. Il est l’accès de l’homme auprès de Dieu, l’amour de celui qui aime, la piété de celui qui se livre sans réserve. C’est lui qui, de conviction en conviction[1], révèle aux croyants la justice de Dieu ; il donne grâce pour grâce, et à la foi qui s’attache à l’écoute de la Parole, il donne en retour la foi illuminée ».

Jacques Guillet se fait l’écho de cette doctrine traditionnelle lorsqu’il écrit : « Pour pénétrer jusqu’à leur centre et y reconnaître la personne du Christ, ni la recherche historique, ni l’étude raisonnée du langage de la Bible, ni la magie de ses rythmes ou de ses images n’ouvrent les dernières voies d’accès. Car le Seigneur, c’est l’Esprit (2Co 3,17), et la présence de Jésus-Christ dans les Ecritures est celle de l’Esprit » »[2].

« Oui, pour arriver à une interprétation pleinement valable des paroles inspirées par l’Esprit Saint, il faut être soi-même guidé par l’Esprit Saint et, pour cela, il faut prier, prier beaucoup, demander dans la prière la lumière intérieure de l’Esprit et accueillir docilement cette lumière, demander l’amour, qui seul rend capable de comprendre le langage de Dieu, qui « est amour » (1 Jn 4, 8.16). Durant le travail même d’interprétation, il faut se maintenir le plus possible en présence de Dieu ».

Jean-Paul II

L’Interprétation de la Bible dans l’Eglise

Documentation Catholique n° 2085 – 2 Janvier 1994.

Jacques Fournier

 

[1] Note de la Bible de Jérusalem pour 1Jn 4,13 : « Ce don de l’Esprit annoncé pour les derniers temps, (Ac 2, 17-21, 33), a été répandu dans les cœurs, cf. (Rm 5, 5+) ; (1 Th 4, 8), et y fait naître la certitude intime de ce que les apôtres annoncent extérieurement, 5 6-7 ; cf. (Ac 5, 32). Ici il s’agit de l’état de fils de Dieu, (Rm 8, 15-16) ; (Ga 4, 6) ».

[2] VERLINDE J.-M., Initiation à la Lectio Divina p. 70-73.

 




« Dieu était là, et … » (Lc 24,13-35 ; 3° Dimanche de Pâques – Francis COUSIN)

L’évangile de ce jour est bien connu, et tout le monde a en tête des phrases entières de celui-ci. Mais souvent, on en reste à une histoire qui s’est passée il y a deux mille ans … il y a bien longtemps …

Alors, essayons de l’actualiser, en tenant compte de l’individualisme de la plupart des gens de notre époque, et mettons-nous à la place des deux personnes qui quittent Jérusalem pour rentrer chez eux à Emmaüs. En ce temps actuel, c’est-à-dire avec le problème du confinement et des règles barrières qui rendent les choses encore plus compliquées … en prenant les trois temps principaux de cet épisode.

  • Sur le chemin

Nous sommes donc en train de cheminer avec un ami, à un mètre de distance l’un de l’autre, tout en discutant, sans joie, ressassant les événements récents, et nous posant bien des questions au sujet de la mort de Jésus, et ce que nous allions devenir …

Et puis voilà qu’un inconnu nous rattrape, et au lieu de passer rapidement, à distance, en nous disant : « Bonjour ! ça va ? » auquel on aurait répondu « Bonjour ! ça va ! » même si cela n’allait pas du tout, voilà-t-il pas qu’il se permet de demander : « De quoi discutez-vous en marchant ?».

J’ai bien peur que notre réaction intérieure serait quelque chose du genre : « Mais de quoi se mêle-t-il celui-là ! Cela ne le regarde pas ! », et qu’on aurait répondu poliment « Oh, de choses et d’autres … » en espérant que cela s’arrête là !

Et on serait passé à côté de toute cette catéchèse que Jésus leur a donnée.

On n’aurait pas écouté Jésus.

« Dieu était là, et je ne l’ai pas écouté. »

  • Arrivés à Emmaüs

« Ah, nous voilà arrivés ! Il était temps, le soir tombe déjà ! »

« Jésus fit semblant d’aller plus loin. »

« Oh là là, je suis fatigué ! Allez, bonne soirée ! … On t’aurait bien invité, mais avec le Covid-19 … hein … », et nous serions rentrés chez nous bien tranquillement, nous installant devant la table déjà préparée …

Et on serait passé à côté du fait de voir Jésus renouveler pour la première fois depuis le jeudi saint le partage du pain !

On n’aurait pas vu Jésus.

« Dieu était là, et je ne l’ai pas vu. »

  • Une fois Jésus disparu

« Ho, dis donc ! T’as vu ? »

« Oui … c’était Jésus !? »

« Oui, je crois … Oh ben çà alors !»

« Ho … alors … il est ressuscité ?! »

« On dirait bien … de toute façon, il l’avait dit … »

« Ah oui, c’est vrai ! »

« Bon, il est temps d’aller dormir ! »

Peut-être certains auraient pensé à envoyer un texto aux apôtres … et encore ! Mais retourner à Jérusalem, deux heures de marche en allant vite … Non, faut pas rêver !

Et on serait passé à côté de la joie partagée avec les apôtres … et Jésus.

On n’aurait pas partagé la nouvelle de la résurrection de Jésus.

« Dieu n’était plus là, et je ne suis pas retourné vers lui … et les autres.»

 

Combien de fois passons-nous à côté de Jésus sans le voir… ?

Combien de fois les chrétiens, dont je suis, disent-ils du mal des autres … en oubliant que Dieu est en chacun d’eux ?

On remarquera qu’on retrouve les mêmes trois mots dont on avait parlé pour le dimanche de Pâques : écouter, voir, partager, qui, quand on les suit font de nous des témoins. Avec l’aide de l’Esprit Saint …

Sans doute oublions-nous souvent de demander cette aide à l’Esprit-Saint, ne comptant que sur nos propres forces, sur nos capacités, notre intelligence … et c’est pas toujours terrible !

« Vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. » (Ac 1,8).

La route est courte, ce s’rait dommage
de se croiser sans s’regarder
La route est courte, ce s’rait dommage
de se croiser sans s’rencontrer.

Je t’ai reconnu
Après un long temps de chemin
Au geste de tes mains
Quand tu as pris le pain.

La route est courte, ce s’rait dommage
de se croiser sans s’rencontrer.

                                      Jean Humenry

                                                          Francis Cousin

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Prière dim Pâques A 3°




« Naître de l’Esprit » (Pape François – 20 avril 2020).

Evangile selon St Jean chapitre 3 versets 1 à 8 (Jn 3,1-8):

Il y avait un homme, un pharisien nommé Nicodème ; c’était un notable parmi les Juifs.

 Il vint trouver Jésus pendant la nuit. Il lui dit : « Rabbi, nous le savons, c’est de la part de Dieu que tu es venu comme un maître qui enseigne, car personne ne peut accomplir les signes que toi, tu accomplis, si Dieu n’est pas avec lui. »

Jésus lui répondit : « Amen, amen, je te le dis : à moins de naître d’en haut, on ne peut voir le royaume de Dieu. »

 Nicodème lui répliqua : « Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il entrer une deuxième fois dans le sein de sa mère et renaître ? »

Jésus répondit : « Amen, amen, je te le dis : personne, à moins de naître de l’eau et de l’Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu.

Ce qui est né de la chair est chair ; ce qui est né de l’Esprit est esprit.

Ne sois pas étonné si je t’ai dit : il vous faut naître d’en haut.

Le vent souffle où il veut : tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Il en est ainsi pour qui est né du souffle de l’Esprit. »

Jésus et Nicodème par Crijn Hendricksz Volmarijn, peintre hollandais du XVIIème siècle

Cet homme, Nicodème, est un chef des juifs, un homme faisant autorité; il ressentit la nécessité d’aller auprès de Jésus. Il y alla la nuit, parce qu’il devait agir avec un peu de prudence, car ceux qui allaient parler avec Jésus n’étaient pas bien vus (cf. Jn 3, 2). C’est un pharisien juste, car tous les pharisiens ne sont pas méchants: non, non; il y avait aussi des pharisiens justes. Celui-ci est une pharisien juste. Il ressentit de l’inquiétude, parce que c’est un homme qui avait lu les prophètes et il savait que ce que Jésus faisait avait été annoncé par les prophètes. Il ressentit de l’inquiétude et alla parler avec Jésus. «Rabbi, nous le savons, tu es un Maître qui vient de la part de Dieu» (v. 2): c’est une confession, mais jusqu’à un certain point. «Personne ne peut accomplir les signes que tu accomplis, si Dieu n’est pas avec lui» (v. 2). Et il s’arrête. Il s’arrête devant le « donc »: Si je dis cela… donc! … Et Jésus a répondu. Il répondit mystérieusement, comme Nicodème ne s’y attendait pas. Il répondit en utilisant l’image de la naissance: «A moins de naître d’en-haut, nul ne peut voir le Royaume de Dieu» (v. 3). Et lui, Nicodème, éprouve de la confusion, il ne comprend pas et prend ad litteram cette réponse de Jésus: « Comment un homme peut-il naître, une fois qu’il est vieux? » (cf. v. 4)

Naître d’en-haut, naître de l’Esprit. C’est le pas que la confession de Nicodème doit accomplir et il ne sait pas comment le faire. Parce que l’Esprit est imprévisible. La définition de l’Esprit que donne ici Jésus est intéressante: «Le vent souffle où il veut ; tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit» (v. 8), c’est-à-dire libre. Une personne qui se laisse conduire d’un côté et de l’autre par l’Esprit Saint: voilà ce qu’est la liberté de l’Esprit. Et celui qui le fait est une personne docile et on parle ici de la docilité à l’Esprit.

Etre chrétien n’est pas seulement accomplir les commandements: il faut le faire, c’est vrai; mais si tu t’arrêtes là, tu n’es pas un bon chrétien. Etre chrétien, c’est laisser l’Esprit entrer en toi et te conduire, te conduire où il veut. Dans notre vie chrétienne, nous nous arrêtons bien souvent comme Nicodème, devant le « donc », nous ne savons pas quel pas accomplir, nous ne savons pas comment le faire ou bien nous n’avons pas confiance en Dieu pour accomplir ce pas et laisser entrer l’Esprit. Naître à nouveau, c’est laisser l’Esprit entrer en nous et que l’Esprit me guide et pas moi, et ici: libre, avec cette liberté de l’Esprit qui fait que tu ne sauras jamais où tu iras.

Quand l’Esprit vint, les apôtres, qui étaient au Cénacle, sortirent pour aller prêcher avec ce courage, cette franchise (cf. Ac 2, 1-13)… ils ne savaient pas ce qui allait se produire; et ils l’ont fait parce que l’Esprit les guidait. Le chrétien ne doit jamais s’arrêter à l’accomplissement des commandements: il faut les respecter, mais aller au-delà, vers cette naissance nouvelle qui est la naissance dans l’Esprit, qui te donne la liberté de l’Esprit.

C’est ce qui est arrivé à cette communauté chrétienne de la première Lecture, après que Jean et Pierre sont revenus de cet interrogatoire qu’ils ont eu avec les prêtres. Ils allèrent auprès de leurs frères, dans cette communauté, et rapportèrent ce que leur avaient dit les chefs des prêtres et les anciens. Et toute la communauté, quand elle entendit cela, eut un peu peur. (cf. Ac 4, 23) Et qu’est-ce qu’ils ont fait? Prier. Ils ne se sont pas arrêtés à des mesures de prudence, « non, maintenant nous faisons cela, soyons un peu plus tranquilles… »: non. Prier. Que ce soit l’Esprit qui leur dise ce qu’ils devaient faire. Ils élèvent leurs voix vers Dieu en disant: «Seigneur», (v. 24) et ils prient. Cette belle prière à un moment sombre, un moment où ils doivent prendre des décisions et où ils ne savent pas quoi faire. Ils veulent naître de l’Esprit et ils ouvrent leur cœur à l’Esprit: que ce soit Lui qui le dise…

Et ils demandent: « Car c’est une ligue en vérité, qu’Hérode et Ponce Pilate, avec les nations païennes et les peuples d’Israël ont formée contre ton Saint Esprit et Jésus » (cf. v. 27), ils racontent l’histoire et disent: « Seigneur fais quelque chose ». « Et à présent, Seigneur, tourne ton regard vers leurs menaces – celles du groupe des prêtres – et accorde à tes serviteurs de proclamer avec assurance ta parole » (v. 29) ils demandent l’assurance, le courage, de ne pas avoir peur : « Etends la main pour opérer des guérisons, des signes et prodiges au nom de Jésus». (v. 30) « Tandis qu’ils priaient, l’endroit où ils se trouvaient réunis trembla : tous alors furent remplis du Saint-Esprit et se mirent à annoncer la parole de Dieu avec assurance» (v. 31) Une deuxième Pentecôte a eu lieu ici.

Devant les difficultés, devant une porte fermée, qui fait qu’ils ne savent pas comment aller de l’avant, ils vont auprès du Seigneur, ils ouvrent leur cœur et l’Esprit vient et leur donne ce dont ils ont besoin ; ensuite, ils sortent pour prêcher, avec courage, et vont de l’avant. Voilà ce qu’est naître de l’Esprit, ne pas s’arrêter au « donc » après les commandements, au « donc » après les habitudes religieuses: non! C’est naître à nouveau. Et comment se prépare-t-on à naître à nouveau? Par la prière. La prière est ce qui nous ouvre la porte à l’Esprit et nous donne cette liberté, cette franchise, ce courage de l’Esprit Saint. Ne sachant jamais où il te conduira. Mais c’est l’Esprit.

Que le Seigneur nous aide à être toujours ouverts à l’Esprit, car ce sera Lui qui nous mènera de l’avant dans notre vie de service au Seigneur.

Prière pour la communion spirituelle

A Tes pieds, ô mon Jésus, je me prosterne et je T’offre le repentir de mon cœur contrit qui demeure dans son néant et en Ta sainte présence. Je t’adore dans le Sacrement de Ton amour, l’ineffable Eucharistie. Je désire te recevoir dans la pauvre demeure que mon cœur t’offre. Dans l’attente du bonheur de la communion sacramentelle, je veux te posséder en esprit. Viens à moi, ô mon Jésus, que je vienne à Toi. Que Ton amour enflamme tout mon être, pour la vie et pour la mort. Je crois en toi, j’espère en toi, je t’aime. Ainsi soit-il.

                                                                                  Pape François




Dernier message de St Jean Paul II pour la fête de la Miséricorde divine.

Le Pape Jean Paul II est entré dans la Vie le samedi 2 avril 2005 à 21h 37… Or, depuis la fin de l’après midi, avec la Prière des Vêpres, l’Eglise était entrée dans la célébration de la Fête de la Miséricorde divine qu’il avait instituée le 30 avril 2000, jour où il avait canonisé Sr Faustine Kowalska. Le Christ lui était apparu le 22 février 1931, et il lui avait dit qu’il désirait que le premier dimanche après Pâques soit la Fête de la Miséricorde… St Jean Paul II exauça ce désir…

Et peu avant de mourir, il fait laissé des indications sur une déclaration à faire en ce dimanche 3 avril 2005… Ces mots résonnent maintenant comme son Testament spirituel.

Le Pape Jean-Paul II en effet avait indiqué le thème de la méditation pour la prière du « Regina Caeli » du IIe Dimanche de Pâques, Dimanche de la Divine Miséricorde. En conclusion de la concélébration eucharistique présidée sur la Place Saint-Pierre par le Cardinal Angelo Sodano, S.Exc. Mgr Leonardo Sandri a prononcé les paroles suivantes, avant de donner lecture du texte du Saint-Père : « J’ai été chargé de vous lire le texte préparé, sur ses indications explicites, par le Saint-Père Jean-Paul II. Je le fais en ressentant profondément cet honneur, mais également avec une grande nostalgie ».


Très chers frères et sœurs !

1. Le joyeux Alleluia de la Pâque retentit également en ce jour. La page de l’Évangile de Jean d’aujourd’hui souligne que le Ressuscité, le soir de ce jour, apparut aux Apôtres et « leur montra ses mains et son côté » (Jn 20, 20), c’est-à-dire les signes de la passion douloureuse imprimés de façon indélébile sur son corps, également après la résurrection. Ces plaies glorieuses, qu’il fit toucher huit jours plus tard à Thomas, incrédule, révèlent la miséricorde de Dieu, qui « a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » (Jn 3, 16).

Ce mystère d’amour se trouve au centre de la liturgie d’aujourd’hui du Dimanche in Albis, dédié au culte de la Divine Miséricorde.

2. Le Seigneur ressuscité offre en don à l’humanité, qui semble parfois égarée et dominée par le pouvoir du mal, par l’égoïsme et par la peur, son amour qui pardonne, qui réconcilie et ouvre à nouveau l’âme à l’espérance. C’est l’amour qui convertit les cœurs et qui donne la paix. Combien le monde a besoin de compréhension et d’accueillir la Divine Miséricorde !

Jean Paul II offre son pardon à Mehmet Ali Ağca qui a tenté de l’assassiner le 13 mai 1981

Seigneur, Toi qui par ta mort et ta résurrection révèles l’amour du Père, nous croyons en Toi et nous te répétons aujourd’hui avec confiance : Jésus, j’ai confiance en Toi, aies pitié de nous et du monde entier.

3. La solennité liturgique de l’Annonciation, que nous célébrerons demain, nous pousse à contempler avec les yeux de Marie l’immense mystère de cet amour miséricordieux qui naît du cœur du Christ. Aidés par Elle, nous pouvons comprendre le sens véritable de la joie pascale, qui se fonde sur cette certitude : Celui que la Vierge a porté dans son sein, qui a souffert et qui est mort pour nous, est véritablement ressuscité. Alleluia !  




Recevoir le Don du Ressuscité (Jn 20,19-31 ; 2° Dimanche de Pâques – D. Jacques FOURNIER).

C’était après la mort de Jésus. Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! »
Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur.
Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. »
Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint.
À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. »
Or, l’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu.
Les autres disciples lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais il leur déclara : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »
Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient verrouillées, et il était là au milieu d’eux. Il dit : « La paix soit avec vous ! »
Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »
Alors Thomas lui dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »
Jésus lui dit : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »
Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre.
Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

 

Nous sommes le premier jour de la semaine, le lendemain du sabbat (samedi), ce qui correspond à notre Dimanche. Jésus est mort deux jours avant, dans un déchainement de haine et de violence. Ses disciples ont peur qu’il ne leur arrive la même chose. Ils se sont donnés rendez-vous quelque part à Jérusalem, et ils ont bien verrouillé les portes…

Et l’impensable se produit : « Jésus vint et se tint au milieu »… C’est Lui qui prend l’initiative de venir vers eux. Au tout début de l’Evangile, il était entré en scène exactement de la même manière : « Jean Baptiste voit Jésus venir vers lui » (Jn 1,29). Dieu désire rencontrer l’homme, et c’est toujours Lui qui fait les premiers pas… Mais comme il ne veut pas s’imposer, si nous y consentons, il nous invite à lui dire : « Viens, Seigneur Jésus »… C’est la toute dernière prière de la Bible (Ap 22,20)…

« Jésus vint et se tint au milieu et il leur dit : « Paix à vous ! » » Cette paix est le grand cadeau qu’il est venu apporter aux hommes, à tous les hommes : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas comme le monde la donne » (Jn 14,27), avec des mots si souvent contredits par les actes. Avec lui, cette paix est d’abord un acte, un don, qui nous rejoint au plus profond du cœur, sans parole, en silence… Dans la langue de Jésus, l’araméen, le mot est synonyme de Plénitude : Dieu veut que notre cœur soit rempli comme le sien ! Il veut nous donner d’avoir part à sa Plénitude, d’être nous aussi « Plénitude » tout comme Lui est Plénitude de toute éternité… C’est toute sa mission : « En lui habite corporellement toute la Plénitude de la Divinité et vous vous trouvez en lui associés à sa Plénitude » (Col 2,9). Un seul mot suffit à résumer cette Plénitude : Esprit… En effet, « Dieu est Esprit », nous dit Jésus (Jn 4,24). Dieu nous associera ainsi à sa Plénitude en nous la donnant, tout simplement : « Il vous a fait le don de son Esprit Saint » (1Th 4,8). Voilà ce qui se cache derrière ce « Paix à vous ! » car « le fruit de l’Esprit est amour, joie, paix » (Ga 5,22)… Au moment où il leur dit « Paix à vous ! », il leur donne l’Esprit Saint…

« Les disciples furent remplis de joie à la vue du Seigneur »… Il ne peut en être autrement, puisque, nous venons de le dire avec St Paul, « le fruit de l’Esprit est joie »… « Quant aux disciples, ils étaient remplis de joie et de l’Esprit Saint », écrit St Luc dans les Actes des Apôtres (Ac 13,52).

De plus, si « Dieu est Esprit », St Jean écrit aussi : « Dieu est Lumière » (1Jn 1,5). Et le Psaume déclare : « En toi, Seigneur, est la source de vie, par ta lumière nous voyons la lumière » (Ps 35(35),10). Ainsi, tout comme nos yeux de chair ont besoin de la lumière du soleil, d’un feu ou d’une lampe pour voir, notre cœur a aussi besoin d’une Lumière venue d’en haut pour « voir » les réalités spirituelles invisibles à nos seuls yeux de chair. Cette Lumière est donnée avec le Don de l’Esprit, puisque cet Esprit est Lumière : « Daigne le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père de la gloire, vous donner un Esprit de sagesse et de révélation, qui vous le fasse vraiment connaître ! Puisse-t-il illuminer les yeux de votre cœur pour vous faire voir quelle espérance vous ouvre son appel, quels trésors de gloire renferme son héritage parmi les saints, et quelle extraordinaire grandeur sa puissance revêt pour nous, les croyants, selon la vigueur de sa force, qu’il a déployée en la personne du Christ, le ressuscitant d’entre les morts et le faisant siéger à sa droite, dans les cieux » (Ep 1,15-20). C’est donc grâce à la Lumière de l’Esprit Saint qui règne dans leurs cœurs que les disciples peuvent « voir » le Ressuscité, « le Seigneur de la Gloire » (1Co 2,8), le Seigneur dans sa Gloire…

Autrement dit, quand Jésus leur dit plus loin « Recevez l’Esprit Saint », ils l’ont déjà depuis le tout début de leur rencontre ! Cette Parole ne leur est donnée que pour qu’ils puissent prendre conscience, avec elle et grâce à elle, de cette réalité spirituelle qui les habite déjà, et qui leur est donnée, gratuitement, en surabondance, par ce « Père des Miséricordes » (2Co 1,3), et par cet « Astre d’en Haut », Jésus, le Fils, « qui nous a visités dans les entrailles de miséricorde de notre Dieu » (Lc 1,76-79)…

Et avec ce Don de l’Esprit, notre vocation s’accomplit… Dieu nous a en effet tous créés « en soufflant en nous » (Gn 2,4b-7) : « Yahvé Dieu modela l’homme avec la glaise du sol, il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint un être vivant ». Or le Souffle de Dieu est une image qui, dans la Bible, renvoie à l’Esprit Saint : « Ainsi parle Dieu, Yahvé, qui a créé les cieux et les a déployés, qui a affermi la terre et ce qu’elle produit, qui a donné le souffle au peuple qui l’habite, et l’Esprit à ceux qui la parcourent » (Is 42,5). Dieu nous a donc tous créés par un Don de l’Esprit qui nous a donnés d’être « esprit », « corps, âme et esprit » (1Th 5,23). Et notre vocation s’accomplira lorsque, ouverts de tout cœur à Dieu, dans l’Amour, notre esprit sera « rempli » par le Don de Dieu, le Don de l’Esprit Saint… C’est ce que le Christ suggère dans notre Evangile, en reprenant le geste créateur de Dieu dans le Livre de la Genèse, juste avant de dire une Parole, qui, à travers les disciples, s’adresse à l’humanité tout entière, à chacun d’entre nous : « Il souffla et leur dit : Recevez l’Esprit Saint »… « Hâte-toi », donc, « de devenir participant de l’Esprit Saint » (Grégoire de Naziance, 4° s)… car il est le Don gratuit de l’Amour, de ce Dieu qui « est Amour » (1Jn 4,8.16), un Amour qui face à notre misère ne cesse pas de prendre le visage d’une Miséricorde infinie… « Ne jamais désespérer de la Miséricorde de Dieu », disait St Benoît… Alors, « béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous console dans toute notre tribulation, afin que, par la consolation que nous-mêmes recevons de Dieu, nous puissions consoler les autres en quelque tribulation que ce soit » (2Co 1,3-4)…

                                                                                               D. Jacques Fournier




2° Dimanche de Pâques, Fête de la Miséricorde (Homélie du P. S. Vaast)

Il est un personnage, dans l’Evangile, envers qui nous pouvons avoir beaucoup de reconnaissance, un personnage qui nous réconforte dans nos incertitudes : Il s’agit de l’apôtre Thomas. S’il n’avait pas été là, il manquerait quelque chose à cette merveilleuse histoire de résurrection, tellement belle que les hommes ont du mal à y croire. Que manquerait-il ? Il y manquerait quelqu’un, quelqu’un qui nous représenterait. Quelqu’un en qui nous pourrions nous reconnaître. Quelqu’un de « normal » : quelqu’un qui n’arrive pas à y croire. In moune i pran pas toute sak i brille pou de l’or.Quelqu’un à qui « on ne la fait pas », et qui n’a pas peur de mettre les pieds dans le plat. Quelqu’un qui n’a pas peur de mettre le doigt dans la plaie. Quelqu’un qui n’a pas peur d’appuyer là où ça fait mal…

Parce que, reconnaissons-le, en effet, cette histoire de résurrection de Jésus, ça nous dérange quelque part. C’est tellement invraisemblable ! N’aurait-il pas été plus simple en effet, si Jésus s’était contenté d’un petit bonjour à ses disciples, en passant, en vitesse, juste avant de remonter vers son Père… On aurait dit : « Ils ont eu une apparition, une vision… Après tout, une vision, ce n’est pas très important. Beaucoup de saints ont eu des visions, de saintes visions, des visions qui font du bien. Mais on ne va pas en faire toute une histoire ! On ne va pas en faire l’objet d’un credo ! Une vision, on ne va pas en faire une question de foi ! Mais non voyons, ce qui compte, c’est ce que Jésus a dit, ce qu’il a fait, ce qu’il a été durant sa vie terrestre, avant de mourir : ce signe d’amour extraordinaire qu’il a été, cette sagesse inouïe dans ses paroles, cette générosité unique qui a été jusqu’à donner sa vie pour nous ! Il est mort mais son esprit continue, son esprit est vivant. Cela suffisait largement pour fonder le christianisme ! » C’est bien ce que suggèrent, un certain nombre de livres ou de films.

Eh bien non, mes frères et sœurs, cela ne suffisait pas. Il fallait que Jésus ait réellement traversé la mort ; qu’il fût réellement entré dans la mort et réellement sorti de la mort, pour nous montrer que la vie est plus forte que la mort, que l’amour est plus fort que la haine, que le pardon est plus fort que la violence.

Et Thomas veut s’assurer que la vision du ressuscité n’est pas une hallucination ou une compensation imaginaire qui aurait pu monter dans l’esprit des disciples déçus, déprimés et probablement assez honteux de ce qui s’est passé. Thomas veut être sûr qu’il rencontre, bien vivant, celui-là même qui revient de la mort. Le même, vraiment le même qui a été crucifié et que tous les disciples ont abandonné.

Et cette certitude que c’est bien lui, Jésus, comment l’obtiendra-t-il ? Il ne l’obtiendra pas sur la couleur de ses yeux ou sa coupe de cheveux, mais par la trace de ce qu’ils ont vécu ensemble de plus intime : la marque de la crucifixion, la blessure des clous dans les mains, et le trou de la lance au côté.

Alors, merci Thomas d’avoir été là, pour être le témoin qui doute jusqu’à vouloir toucher. Merci d’avoir posé la question qui fâche. Merci d’avoir été le trouble-fête au milieu des disciples tellement stupéfaits qu’ils n’osent pas poser de questions. Grâce à toi et au cas où nous ne l’aurions pas compris plus tôt, le Christ ressuscité ne peut pas être pour nous une simple hallucination, une vision ou un esprit. Il est vraiment ressuscité !

Alors si nous avons imité Thomas dans ses doutes, puissions-nous aussi l’imiter dans sa foi. Soyons donc des Thomas jusqu’au bout. Car Thomas est un jumeau nous précise l’évangéliste. Mais un jumeau de qui ? Peut-être de chacun d’entre nous. Nous sommes tous invités à lui ressembler de manière à pouvoir, nous aussi, nous adresser au Christ ressuscité, et lui dire à la suite de Thomas « Mon Seigneur et mon Dieu ». Car quel écart entre cette acclamation émerveillée et la vérification que demandait Thomas avant la rencontre ! Oui, il a douté, mais sa foi est si grande maintenant qu’il donne à Jésus le titre le plus beau et le plus fort de tous les évangiles : « Mon Seigneur et mon Dieu ! ».L’expérience de foi lui a fait franchir cet écart et l’a amené devant Dieu lui-même. La foi n’est jamais à la hauteur des preuves et des assurances que nous recherchons. La foi nous toujours fait aller au-delà, et bien plus loin que ce que nous demandons. La foi nous amène en présence du Dieu vivant. La foi nous ouvre à la joie. C’est pourquoi Jésus dit : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu ». Non pas heureux les crédules à qui l’on fait croire ce que l’on veut. Mais heureux ceux chez qui la confiance et le consentement ont creusé profond, ont travaillé le cœur et l’intelligence et ont traversé tout leur être pour jaillir dans la profession de foi : « Mon Seigneur et mon Dieu. »

Ainsi donc frères et sœurs, ne cherchons pas à expliquer la résurrection, mais acceptons de faire l’expérience du Christ ressuscité dans le quotidien nos vies. Demandons au Seigneur la grâce de fortifier notre foi en sa résurrection. Ainsi, tous nos doutes étant traversés, nous pourrons, nous aussi, proclamer devant le Christ du matin de Pâques : « Mon Seigneur et mon Dieu, Mon Jésus mon BonDié. »

 

                                              P. Sébastien Vaast (SJ)




« Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous … » (Jn 20,19-31 ; 2° Dimanche de Pâques – Francis COUSIN)

Evangile selon St Jean (20,19-31)

Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! »

Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur.

Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. »

Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. »

Or, l’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu.

Les autres disciples lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais il leur déclara : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »

Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient verrouillées, et il était là au milieu d’eux. Il dit : « La paix soit avec vous ! »

Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »

Alors Thomas lui dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »

Jésus lui dit : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »

Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

Commentaire

Quand les apôtres racontèrent à Thomas qu’ils avaient vu le Seigneur, lui qui avait quitté le groupe après la mort de Jésus et n’était pas présent le soir de la résurrection, il n’en croyait pas ses oreilles … mais comme tout homme ’’de bon sens’’ ( ? ), il demande ’’à voir’’ …

Si un jour votre conjoint vous dit : « Houai ! on a gagné cent millions au loto ! », la première réaction est de dire : « Fais voir ! », à la fois les résultats sur le journal et le ticket du loto.

Il en est de même pour Thomas. Quand Jésus était mort, pour lui, c’était la fin … de la vie de Jésus, … de ses espoirs d’une vie meilleure avec lui …

Alors quand on lui dit que Jésus est ressuscité, il a du mal à le croire. Pourtant, peu de temps avant, il était avec Jésus quand celui-ci a rendu la vie à Lazare, il l’avait entendu dire à son Père : « Je le savais bien, moi, que tu m’exauces toujours ; mais je le dis à cause de la foule qui m’entoure, afin qu’ils croient que c’est toi qui m’as envoyé. » (Jn 11,42 » … Mais Jésus n’est plus là pour demander le miracle à son Père !

On a souvent montré Thomas comme celui qui doute… de la résurrection de Jésus, … mais surtout du témoignage des autres apôtres !

Et pourtant, il n’est pas le seul !

– « [Marie-Madeleine] partit annoncer la nouvelle à ceux qui, ayant vécu avec lui, s’affligeaient et pleuraient. Quand ils entendirent que Jésus était vivant et qu’elle l’avait vu, ils refusèrent de croire. Après cela, il se manifesta sous un autre aspect à deux d’entre eux qui étaient en chemin pour aller à la campagne. Ceux-ci revinrent l’annoncer aux autres, qui ne les crurent pas non plus. Enfin, il se manifesta aux Onze eux-mêmes pendant qu’ils étaient à table : il leur reprocha leur manque de foi et la dureté de leurs cœurs parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient contemplé ressuscité» (Mc 16,10-14)

– « Marie Madeleine, Jeanne, et Marie mère de Jacques ; les autres femmes qui les accompagnaient disaient la même chose aux Apôtres. Mais ces propos leur semblèrent délirants, et ils ne les croyaient pas. » (Lc 24,10-11).

– « Les onze disciples s’en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre. Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais certains eurent des doutes. » (Mt 28,16-17)

Ainsi donc, les quatre évangélistes ont tous montré, de différentes manières, que l’acceptation de la résurrection de Jésus n’est pas une chose évidente.

Même ceux qui l’ont vu vivant ne l’ont pas reconnu tout de suite. Car « leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. » (Lc 24,16), et il fallut à chaque fois une intervention de Jésus pour qu’il soit reconnu : « Voyez mes mains et mes pieds : c’est bien moi ! »(Lc 24,39), « Avez-vous quelque chose à manger » (Lc 24,41), « Ayant pris le pain, il prononça la bénédiction et, l’ayant rompu, il le leur donna. » (Lc 24,30), « Marie ! » (Jn 20,16).

Mais ce n’est pas tellement le fait de ne pas le reconnaître que leur reproche Jésus, mais comme il le dit dans l’évangile de Marc, c’est « qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient contemplé ressuscité », ceux qui avaient témoigné de sa résurrection. Or, c’est ça qui est le plus important, croire les témoins oculaires et ceux qui ont mis par écrit ces témoignages.

Alors quand Jésus rejoint les apôtres, Thomas étant présent, et qu’il lui dit : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse de te montrer incroyant, mais croyant. », devançant la demande de Thomas, celui-ci voit, et il croit, et sans rien faire d’autre, il s’écrit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! », reconnaissant en celui qui lui apparaît non seulement son Maître et Seigneur, mais aussi qu’il est Dieu : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. » (Jn 1,1) « Le Père et moi, nous sommes UN » (Jn 10,30).

Et nous, si nous connaissons Jésus et son enseignement, si nous croyons en lui, c’est parce que depuis deux mille ans des personnes ont cru et rapporté les témoignages de ceux qui les ont précédés, et qui nous ont convaincus que leur « témoignage est véridique » (Jn 19,35). À commencer par nos parents et grands-parents, nos catéchistes, les prêtres que nous avons rencontrés, et tant d’autres personnes … qui ont fait tout ce qu’ils ont pu pour nous faire aimerJésus, nous faire aimer Dieu et son Saint-Esprit … et ainsi répondre à l’amour de Dieu pour nous.

Est-ce à dire que nous ne douterons jamais de Dieu ? de son existence ? de … ?

Certainement pas ! et nous en savons tous, je pense, quelque chose !

Et quand quelqu’un me dit qu’il n’a aucun doute … je doute …

Douter nous permet de réfléchir à notre foi, de faire le point sur notre amour de Dieu et des hommes… Souvent, et peut-être même tout le temps, c’est une intervention du Malin … et cela ne date pas d’hier (voir Gn 3,5).

Le doute n’est pas grave, c’est une tentation … L’essentiel est de ne pas y rester, comme l’a fait Jésus : « Maintenant mon âme est bouleversée. Que vais-je dire ? “Père, sauve-moi de cette heure” ? – Mais non ! C’est pour cela que je suis parvenu à cette heure-ci ! Père, glorifie ton nom !» (Jn 12,27-28), ou comme l’a fait Thomas …

Seigneur Jésus,

Tu sais tout de nous, de nos pensées,

et tu sais que parfois nous doutons,

comme saint Thomas.

Mais à chaque fois,

ton amour pour nous se fait plus fort

pour que nous reconnaissions ton amour

et que nous t’aimions davantage.

Merci d’être présent avec nous

chaque fois que nous doutons.

 

Francis Cousin

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Prière dim Pâques A 2°




Messe de Pâques : homélie de Mgr Gilbert Aubry (12/04/2020)

Mot d’ouverture :

Bonjour à vous tous qui êtes devant votre télévision pour participer à cette eucharistie grâce à Réunion la 1èreet devant votre poste de radio grâce à Arc-en-ciel. Je salue aussi nos frères et sœurs de l’île Maurice et des autres Départements d’Outre-mer.

Dans cette messe de Pâques, nous prions pour toutes les familles de La Réunion. Nous avons une pensée spéciale pour les malades du Covid-19, pour leurs familles. Nous disons aussi notre reconnaissance et notre soutien à tout le personnel soignant du CHU, des autres hôpitaux, des cliniques et autres structures médicales. Vous êtes un peu les anges gardiens de notre population avec les forces de l’ordre et les pompiers. Que Dieu bénisse aussi ceux qui déploient une activité essentielle, une recherche, une inventivité pour que la vie soit possible pour tous avec la coordination de l’Etat et de nos deux grandes collectivités de la Région, du Conseil Départemental, des autres collectivités. Gardons-nous bien d’oublier ceux qui sont au chômage ou les sans-domicile-fixe. Il y a aussi les prisonniers et les personnels des établissements pénitentiaires. Nous demandons au Seigneur de vous bénir déjà maintenant. Nous lui demandons aussi de nous pardonner nos faiblesses, nos fautes et nos péchés et que nous soyons plus actifs et solidaires pour être davantage des frères et sœurs en humanité sous le regard de Dieu.

Proclamation de l’Evangile par le Diacre Expédit Albaret.

Homélie

PAQUES de LUMIERE ET d’ESPERANCE (Jn 20,1-9) !

Chers frères et sœurs en Jésus-Christ,

Chers frères et sœurs en humanité,

Debout au pied de la croix se tenaient Marie, la maman de Jésus, femme forte de 48 ans au cœur déchiré uni au cœur transpercé de son Fils. Saint Jean est tout près d’elle. Il y a aussi Marie femme de Cléophas et Marie-Madeleine. Marie-Madeleine dont nous parle saint Jean aujourd’hui dans son Evangile.

Marie-Madeleine. Qui est Marie Madeleine ? Une femme pécheresse, provocatrice et tourmentée qui avait été délivrée des chaînes des démons de sa luxure par Jésus. Saint Jean et Marie-Madeleine sont vraiment attachés à la personne de Jésus. L’un rayonne l’innocence et la fraîcheur d’un jeune homme encore pur dans sa grâce d’aimer. L’autre, c’est la femme transfigurée, choisie par Dieu pour être la messagère de la résurrection, une flamme d’amour capable de déchirer les ténèbres des soi-disant bonnes consciences et des a priori.

Marie-Madeleine est secouée par le tourbillon d’événements qui gravitent autour de la mort de Jésus : la souffrance du Maître et de Marie, la trahison des disciples, les ténèbres qui écrasent la ville de Jérusalem, le tremblement de terre, le bouleversement de la nature. Son cœur est polarisé vers le cœur de Jésus. Elle veut prier à son tombeau. Elle y va. Seule.

Stupeur ! Le tombeau a été ouvert, la pierre a été roulée. Le tombeau est vide. Il n’y a personne dedans. Choc. Scandale. Elle va trouver Pierre et Jean : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau et nous ne savons pas où on l’a déposé ». Pas possible. Sur le champ, les deux disciples courent haletants au tombeau. Et finalement, qu’est-ce qu’ils voient ? « Les linges posés à plat ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place ».

Qu’est-ce que cela veut dire ? On n’a pas pu voler le corps de Jésus comme le pensait Marie-Madeleine. Les voleurs seraient partis avec la dépouille telle qu’elle était, avec les linges, les bandelettes et le suaire. D’ailleurs, il y avait des scellés sur la porte du tombeau et les soldats montaient la garde. Ce que Pierre et Jean vivent en ce moment unique, ce qu’ils voient c’est la signature de Jésus lui-même : le tombeau vide et le linceul. D’ailleurs, Jésus avait dit « Je suis la résurrection et la vie… » (Jn 11,25)… en ressuscitant lui-même Lazare.

Pierre et Jean rentrent chez eux. Ils viennent de comprendre les paroles de l’Ecriture selon lesquelles Jésus devait se relever d’entre les morts. Marie-Madeleine de son côté sera consolée par Jésus « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Marie-Madeleine ne reconnaît Jésus que lorsqu’il l’appelle par son prénom. Miracle de la re-connaissance. Une mission est alors confiée à cette femme, premier témoin de la résurrection : « Va trouver mes frères et dis leur que je monte vers mon Père qui est votre Père, vers mon Dieu qui est votre Dieu ».

Ensuite, Jésus va multiplier ses apparitions : apparition aux disciples d’Emmaüs qui vont le reconnaître à la fraction du pain, les cœurs brûlants. La rencontre avec les dix disciples puis avec les onze, Thomas étant alors présent. Et voilà que le mystère de Pâques, avec l’Ascension et la Pentecôte, lance toute l’Eglise dans la mission : Allez ! « Allez proclamer la Bonne Nouvelle… Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps » (cf. Mth 28, 19-20).

Alors, aujourd’hui, recherchons à tout resituer dans l’amour de Dieu avec le Christ. Si nous vivons par Lui, avec Lui en en Lui Jésus-Christ ressuscité, nous accueillons l’Esprit-Saint qui nous arrache aux ténèbres. Nous pouvons lutter contre le Mal. Le chemin de l’Espérance s’ouvre au cœur même de nos difficultés. Une porte s’ouvre qui nous fait sortir de nos tombeaux. La Lumière de Pâques rejaillit sur toute la vie. Elle nous donne la force d’aimer comme Jésus nous aime. Jusqu’au bout de l’amour. Nous sommes capables de faire attention les uns aux autres, de devenir solidaires, de nous soutenir les uns les autres, surtout en cette période de Covid-19. Appliquer les gestes barrière, vivre le confinement de manière stricte, c’est protéger la vie, c’est faire réussir la vie. Nous devenons les uns avec les autres la signature de Jésus dans l’Esprit de communion. Jésus est vraiment le Vivant de toute vie.

Dieu remet notre île entre nos mains. Et nous mettons nos mains dans les mains du Christ Ressuscité. Nous sommes sûrs que Dieu ne nous lâchera pas. Avec Lui, nous remporterons la victoire. Oui, le Christ est vraiment ressuscité. Je vous souhaite Pâques de Lumière et d’Espérance à vous et à tous ceux qui vous sont chers. Amen.

                                                                                                      Monseigneur Gilbert AUBRY