La parole qui nous a été donnée aujourd’hui dans l’évangile est une parole de miséricorde et de pardon. C’est cette parabole d’un serviteur qui devait à son maître une grande somme. Le maître lui en fait remise, mais ensuite, lorsque ce serviteur a rencontré un de ses débiteurs sur le chemin, alors même qu’il venait d’être acquitté de sa dette, il va jusqu’à faire enfermer ce débiteur qui lui devait beaucoup moins. Par ce geste, il a encouru la colère et le châtiment de celui qui lui avait auparavant remis sa dette. Les termes de la parabole sont clairs. Le premier, le Maître qui pardonne à son serviteur, c’est Dieu. Le serviteur à qui est remise la dette si importante, c’est chacun de nous. Le troisième personnage, c’est le prochain à qui nous devons pardonner et faire miséricorde parce que le Seigneur Dieu nous a Lui-même fait miséricorde. Seulement, il s’agit de bien entendre ce que signifie le pardon.
A partir de ce moment-là, la miséricorde et le pardon de Dieu sont une source sans cesse jaillissante qui empêche, jour après jour, que le monde ne s’écroule sous la pression de la haine, de la violence et du péché. Ainsi cette miséricorde de Dieu, à laquelle nous l’avons contraint, c’est le monde nouveau dans lequel nous prenons vie. Dieu est miséricorde et pardon parce que nous l’y avons contraint. Mais c’est l’imagination extraordinaire de Dieu, que, voulant nous sauver, Il ait voulu retourner en nous l’image et la restaurer pleinement. Il l’a restaurée non seulement en nous donnant d’aimer, mais Il l’a restaurée en nous donnant d’aimer comme Lui nous aime. Parce qu’Il est devenu un amour miséricordieux et qui pardonne, voici que nous-mêmes nous sommes « contraints » à devenir miséricorde, à devenir un amour qui pardonne. Et désormais, nous aussi, nous sommes pris au jeu. Dieu nous contraint à la miséricorde si nous voulons vraiment vivre à son image et à sa ressemblance. Le pardon et la miséricorde ne sont donc pas quelque chose de facultatif, une prouesse qu’on arriverait à faire de temps en temps, mais ils constituent la véritable et unique manière dont nous devons nous situer toujours les uns par rapport aux autres. Si nous voulons vraiment, intimement, refléter la gloire de Dieu et l’amour de Dieu qui pardonne, nous ne pouvons être que miséricorde. Et c’est ainsi que nous devons être, les uns avec les autres, devenant source de grâce et d’espérance les uns pour les autres.