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Audience Générale du Mercredi 28 Février 2024

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 28 février 2024


Catéchèse – Les vices et les vertus – 9. L’envie et la vaine gloire

Chers frères et sœurs, bonjour !

Aujourd’hui nous examinons deux vices capitaux que nous trouvons dans les grands inventaires que la tradition spirituelle nous a laissés : l’envie et la vaine gloire.

Commençons par l’envie. Si nous lisons les Saintes Écritures (cf. Gn 4), elle nous apparaît comme l’un des vices les plus anciens : la haine de Caïn envers Abel se déchaîne lorsqu’il se rend compte que les sacrifices de son frère plaisent à Dieu. Caïn était le fils aîné d’Adam et Eve, il avait pris la plus grande part de l’héritage de son père ; pourtant, il suffit qu’Abel, son jeune frère, réussisse un petit exploit pour que Caïn se mette en colère. La tête de l’envieux est toujours triste : son regard est baissé, il semble continuellement sonder le sol, mais en réalité il ne voit rien, car son esprit est enveloppé de pensées pleines de méchanceté. L’envie, si elle n’est pas maîtrisée, conduit à la haine de l’autre. Abel sera tué par Caïn, qui n’a pas supporté le bonheur de son frère.

L’envie est un mal qui n’a pas seulement été étudié en contexte chrétien : elle a attiré l’attention de philosophes et d’érudits de toutes cultures. À la base, il y a une relation de haine et d’amour : l’un veut le mal de l’autre, mais secrètement, il souhaite lui ressembler. L’autre est l’épiphanie de ce que nous voudrions être, et qu’en réalité nous ne sommes pas. Sa bonne fortune nous semble une injustice : nous aurions sûrement – pensons-nous – mérité bien davantage ses succès ou sa bonne fortune !

À la base de ce vice, il y a une fausse idée de Dieu : on n’accepte pas que Dieu ait ses propres « mathématiques », différentes des nôtres. Par exemple, dans la parabole de Jésus sur les ouvriers appelés par le maître à aller à la vigne à différents moments de la journée, ceux de la première heure croient avoir droit à un salaire plus élevé que ceux qui sont arrivés en dernier ; mais le maître leur donne à tous le même salaire, et dit : « N’ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mes biens ? Ou alors es-tu envieux parce que moi je suis bon ? » (Mt 20,15). Nous voudrions imposer à Dieu notre logique égoïste, mais la logique de Dieu est l’amour. Les biens qu’il nous donne sont faits pour être partagés. C’est pourquoi saint Paul exhorte les chrétiens : « Soyez unis les uns aux autres par l’affection fraternelle, rivalisez de respect les uns pour les autres » (Rm 12,10). Voilà le remède à l’envie !

Et nous arrivons au deuxième vice que nous examinons aujourd’hui : la vaine gloire. Elle va de pair avec le démon de l’envie et, ensemble, ces deux vices sont caractéristiques d’une personne qui aspire à être le centre du monde, libre d’exploiter tout et tout le monde, objet de toutes les louanges et de tous les amours. La vaine gloire est une estime de soi exagérée et sans fondement. Le vantard possède un « moi » encombrant : il n’a aucune empathie et ne se rend pas compte qu’il existe d’autres personnes que lui dans le monde. Ses relations sont toujours instrumentales, marquées par la prévarication de l’autre. Sa personne, ses réalisations, ses succès doivent être montrés à tous : c’est un perpétuel mendiant d’attention. Et si des fois ses qualités ne sont pas reconnues, il se met dans une colère féroce. Les autres sont injustes, ils ne comprennent pas, ils ne sont pas à la hauteur. Dans ses écrits, Évagre le Pontique décrit l’amère histoire de certains moines frappés par la vanité. Il arrive qu’après ses premiers succès dans la vie spirituelle, il se sente déjà arrivé et se précipite dans le monde pour en recevoir les louanges. Mais il ne réalise pas qu’il n’est qu’au début du voyage spirituel et qu’une tentation le guette, qui le fera bientôt tomber.

Pour guérir le vantard, les maîtres spirituels ne proposent pas beaucoup de remèdes. Car au fond, le mal de la vanité a son remède en lui-même : les louanges que l’orgueilleux espérait récolter du monde se retourneront bientôt contre lui. Et combien de personnes, trompées par une fausse image d’elles-mêmes, sont ensuite tombées dans des péchés dont elles auraient bientôt eu honte !

Le meilleur enseignement pour vaincre la vanité se trouve dans le témoignage de Saint Paul. L’apôtre s’est toujours heurté à un défaut qu’il n’a jamais pu surmonter. À trois reprises, il demanda au Seigneur de le délivrer de ce tourment, mais finalement Jésus lui répondit : « Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse ». Depuis ce jour, Paul a été libéré. Et sa conclusion devrait aussi devenir la nôtre : « C’est donc très volontiers que je mettrai plutôt ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure » (2 Co 12,9).

* * *

Je salue cordialement les pèlerins de langue française, en particulier une délégation du Conseil National de Monaco, ainsi que les paroisses et les jeunes venus de France.

En ce temps de Carême efforçons nous de ne pas nous mettre toujours au centre, mais cherchons plutôt à nous effacer pour laisser la place aux autres, les promouvoir et nous réjouir de leurs qualités et de leurs succès.

Que Dieu vous bénisse.





3ième Dimanche de Carême (Jn 2, 23-24) par D. Alexandre ROGALA (M.E.P.)

« Pendant qu’il était à Jérusalem pour la fête de la Pâque, beaucoup crurent en son nom, à la vue des signes qu’il accomplissait. Jésus, lui, ne se fiait pas à eux parce qu’il les connaissait tous » (Jn 2, 23-24)

Les lectures de ce dimanche nous interrogent sur notre rapport aux signes venant de Dieu. Même s’ils ont leur place dans la foi, nous devons reconnaitre que notre attachement aux signes est parfois désordonné.

Quand j’habitais à Lyon, j’avais une amie qui, à un moment de sa vie, s’était intéressé à la foi chrétienne. Elle est allée dans une Église, s’est assise sur un banc pendant un certain temps, et a demandé à Dieu un signe. Comme elle n’en a pas reçu, elle en a déduit que le Dieu des chrétiens n’existait pas.

Il m’est arrivé aussi de rencontrer des personnes qui, elles, avaient reçu un signe. Elles avaient fait une expérience spirituelle intense, et s’étaient mise en route à la suite du Christ en commençant un parcours de catéchuménat. Mais après leur baptême, au bout d’un certain temps, ces personnes aussi se sont éloignées de l’Église.

La foi qui ne repose que sur l’expérience du miraculeux est fragile, et les textes d’aujourd’hui nous le rappellent.

Le texte d’évangile de ce dimanche (Jn 2, 13-25) se passe dans le contexte de la fête de la Pâque qui, est une fête dans laquelle le peuple juif fait mémoire de la sortie d’Égypte. Ce n’est donc pas par hasard que la liturgie nous ait fait entendre le code de l’alliance du Livre de l’Exode, plus connu sous l’appellation « les dix commandements ».

La toute première Parole que Dieu donne au Peuple est un rappel que c’est Lui qui l’a fait sortir d’Égypte : « Je suis le Seigneur ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison d’esclavage » (Ex 2, 20).

Le premier commandement, celui qui est le plus important vise le péché d’idolâtrie, qui consiste à prendre ce qui n’est pas Dieu pour Dieu : « Tu n’auras pas d’autres dieux en face de moi. Tu ne feras aucune idole, aucune image de ce qui est là-haut dans les cieux, ou en bas sur la terre, ou dans les eaux par-dessous la terre. Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux, pour leur rendre un culte. Car moi, le Seigneur ton Dieu, je suis un Dieu jaloux » (Ex 20, 3-5)

Dans l’évangile, Jésus agit à la manière des prophètes qui posaient parfois des signes pour parler. Parmi les signes les plus célèbres, il y a ceux du prophète Jérémie : quand il a brisé une cruche pour signifier le jugement de Dieu sur le peuple (Jr 19), ou quand il s’est baladé dans Jérusalem en portant des liens et des jougs pour avertir le Peuple de l’Exil à Babylone (Jr 27).

En voyant Jésus chasser les marchands, les juifs qui assistent à la scène ne se trompent pas. Ils comprennent que Jésus accomplit un « signe prophétique », donc au lieu de l’arrêter, ils l’interrogent : « Quel signe peux-tu nous donner pour agir ainsi ? » (2, 18).

Mais dans un premier temps, Jésus ne répond pas à la demande de signe, et il répond par une énigme, qui en réalité, annonce le signe par excellence, c’est à dire la Résurrection. « Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. ». Les interlocuteurs de Jésus ne comprennent pas et pensent qu’il parle du Temple.

Peut-être que nous n’aurions pas compris non plus si l’évangéliste Jean qui écrit après la mort et la résurrection de Jésus, ne nous avait pas donné la solution, à savoir que Jésus parlait du sanctuaire de son corps. En fait, le « sanctuaire » n’est pas le « Temple ». Dans l’Ancien Testament grec, le mot « ναός » que nous traduisons par « sanctuaire » ,ne désigne que la partie dans laquelle se trouve le Saint et le Saint des Saints. Le  sanctuaire est donc le « lieu précis » du  Temple où Dieu est présent. Nous comprenons que Jésus se présente comme la véritable demeure de Dieu rendant le Temple et son sanctuaire caduc.

Revenons aux signes. Et si à la demande des juifs, Jésus avait réalisé un signe spectaculaire pour justifier l’expulsion des marchands, que ce serait-il passé ?

En fait, cela aurait tout au plus entrainé un engouement temporaire sur le moment comme nous le montre la fin du texte : « beaucoup crurent en son nom, à la vue des signes qu’il accomplissait. Jésus, lui, ne se fiait pas à eux parce qu’il les connaissait tous » (Jn 2, 23-24). De fait, à la fin de l’évangile, ce sont ces mêmes autorités religieuses qui feront mettre Jésus à mort.

Les miracles ne peuvent pas transformer la nature humaine, c’est la raison pour laquelle Jésus ne se fie pas à l’engouement d’un instant. Jésus ne cherche jamais le merveilleux et le spectaculaire parce qu’une « foi » qui repose sur les miracles expose à l’idolâtrie ; celui-là même qui est visé en premier par le Code de l’alliance. Les disciples que recherche Jésus sont ceux dont la foi repose, non pas sur des miracles, mais sur un véritable engagement à sa suite, ce qui implique la fidélité à sa Parole et une véritable vie de disciple.

Cette quête de signes est aussi dénoncée par saint Paul dans le Deuxième Lecture quand il parle des juifs : « Alors que les Juifs réclament des signes miraculeux, et que les Grecs recherchent une sagesse, nous, nous proclamons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes. Mais pour ceux que Dieu appelle, qu’ils soient juifs ou grecs, ce Messie, ce Christ, est puissance de Dieu et sagesse de Dieu » (1 Co 1, 22-24).

En essayant de comprendre le monde « par le moyen de la sagesse », les grecs ont réduit Dieu à un « être » prenant place dans un système philosophique. Les Juifs quant à eux, au cours de leur histoire religieuse, ont pris l’habitude de demander des signes avant de faire confiance à Dieu. Le tort des Juifs comme des Grecs est d’avoir cru identifier Dieu et mettre la main sur Lui.

La solution que nous donne saint Paul pour que nous ne tombions pas dans le piège de la quête de signes venant du Ciel, est tout simplement de se souvenir de la Croix du Christ. Dieu s’est révélé de manière définitive là où personne ne l’attendait : sur une Croix.

Et si par hasard, nous ne sommes pas encore convaincus que la quête de signes miraculeux est un danger, souvenons-nous de l’épisode des « tentations de Jésus » au désert. Le premier personnage à demander à Jésus de réaliser des miracles, n’est autre que le Diable. Ne faisons pas comme lui, mais gardons les yeux fixés sur le Crucifié.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




3ième Dimanche de Carême (Jn 2, 13-25) – par Francis COUSIN

  « Détruisez ce sanctuaire,

et en trois jours je le relèverai. »

 

Contrairement aux autres évangélistes qui montrent Jésus chassant les ’’marchands’’ du Temple au cours de la dernière semaine de sa vie terrestre, Jean, lui, la situe tout au début de son évangile, juste après son baptême par Jean-Baptiste et le miracle de Cana où Jésus changea de l’eau en vin, son premier miracle … et bien avant son dernier ’’miracle’’, si on peut le dire ainsi, quand il institua l’Eucharistie où le pain et le vin sont devenus son corps et son sang, et en disant « Faites ceci en mémoire de moi ! ».

Une manière pour nous faire comprendre que tout son évangile doit être vu à la lumière de la dernière cène et de la résurrection.

Quand Jésus arrive à Jérusalem, il voit tous ces animaux à l’intérieur du temple, promis à la vente en vue d’être offert en sacrifice à Dieu, … et pour la pâque juive, il y en avait à profusion, par dizaines ou centaines, selon la taille, avec le personnel qui va avec … Et puis aussi des changeurs, car il n’était pas possible de mettre dans le trésor du Temple des pièces de monnaie avec des effigies d’empereur ou autre personne …

Jésus est choqué !

Sans doute se rappelle-t-il cette parole de Jérémie : « Est-elle à vos yeux une caverne de bandits, cette Maison sur laquelle mon nom est invoqué ? Pour moi, c’est ainsi que je la vois – oracle du Seigneur. » (Jr 7,11).

Alors, Jésus fait le ménage … par le vide … « Enlevez cela d’ici. Cessez de faire de la maison de mon Père une maison de commerce. »

Bien sûr, ces personnes étaient utiles … On voit mal un juif venant d’Égypte ou d’Asie Mineure arriver à Jérusalem avec son bœuf ou son mouton …

Il est sûr que l’action de Jésus n’est pas passée inaperçue… et les réactions ont été vives : « Quel signe peux-tu nous donner pour agir ainsi ? » …

Parce que dire que le temple de Jérusalem est la maison de son Père, donc aussi la sienne … c’était osé !

Ce à quoi Jésus répondit : « Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. ».

Phrase incompréhensible pour tous à ce moment-là. Jean ajoute donc pour ses lecteurs : « Mais lui parlait du sanctuaire de son corps. » … et après sa résurrection, « ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela. ».

On est parfois surpris par la réaction de Jésus qui s’arme d’un fouet pour chasser les animaux hors du temple, et qui renverse les tables des changeurs …

Ce n’est pas dans son habitude … car il est comme son Père, « doux et humble de cœur ». (Mt,11,28).

Mais il ne pouvait supporter ce brouhaha qui ne permettait pas la prière …

Au-delà du texte de l’évangile lui-même, en quoi cela nous concerne-t-il actuellement ?

Bien sûr, le temple de Jérusalem n’existe plus ! …mais nous avons toujours des églises, maisons de Dieu, et dans chacune d’elles, il y a un tabernacle dans lequel se trouve la présence réelle de Jésus sous la forme d’hosties consacrées, qui, même si on ne les voit pas, sont bien là ! Et donc Dieu est là en la présence de Jésus dans le Tabernacle …

À chaque fois que nous allons à la messe, et que nous communions, Dieu deviens présent en nous, et nous devenons tabernacle de Dieu …

Pour combien de temps ? Sans doute peu de temps … le temps que nous fassions un péché sans doute …

 

Seigneur Jésus, tu nous aimes tous,

quel que soit notre attitude à ton égard !

Et tu viens en nous à chaque communion. 

Mais nous n’avons pas toujours

conscience de ta présence.

Ouvre nos cœurs à ta présence,

en nous … et dans les autres.

                                                                               

Francis Cousin

 

  

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Rencontre autour de l’Évangile – 3ième Dimanche de Carême (Jn 2, 13-25)

« Détruisez ce Temple, et en trois jours

 je le relèverai »

  

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons (Jn 2, 13-25)

Nous sommes au début de l’évangile selon saint Jean. C’est la première montée de Jésus à Jérusalem ; et la Pâque des juifs est proche.

Le sens des mots

Les marchands et changeurs installés dans le Temple : Pourquoi sont-ils là avec leurs bêtes et bureaux de change ?

Jésus fit un fouet avec  des cordes et les chassa…  : Comment réagissons-nous devant la réaction de Jésus ? Est-ce que ce geste de Jésus nous rappelle certaines manières de faire des prophètes de l’Ancien Testament ?

La maison de mon Père : Dans cette parole qu’est-ce que Jésus nous révèle de sa relation à Dieu.

Détruisez ce Temple : Quel était le rôle du Temple pour le peuple d’Israël ?

En trois jours je le relèverai : Qu’est-ce que Jésus annonce de manière voilée par ces paroles ?

Le Temple dont il parlait, c’était son corps : Quel sera le rôle du « corps » de Jésus pour le Peuple des chrétiens ?

Quand il ressuscita d’entre les morts… : Pourquoi est-ce à ce moment-là seulement que les disciples de Jésus crurent à a parole de Jésus ?

 

 

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

Seigneur Jésus ressuscité, en toi nous rencontrons le vrai Dieu, ton Père et notre Père. En toi nous formons un seul Corps, ton Corps, l’Église. Fais grandir en nous l’amour de ton Église. Elle est la demeure de Dieu parmi les hommes. Donne-nous la grâce de l’embellir par la sainteté de notre vie ; Donne-nous de savoir la purifier de tout ce qui peut la souiller.

  

Pour l’animateur  

Les marchands étaient installés, directement à l’intérieur du Temple, sur le parvis où se tenaient habituellement les étrangers qui venaient en pèlerinage. C’est là, qu’ils pouvaient acheter un animal pour l’offrir en sacrifice. Mais pour l’acheter, il fallait qu’ils changent leur monnaie romaine considérée comme impure pour faire leurs achats avec la monnaie du Temple. La présence des changeurs était donc indispensable.

Jésus considère que tout ce trafic souille le Temple lui-même, qu’il appelle la « maison de son Père ».

Jésus fait un geste prophétique, comme les prophètes de l’Ancien Testament : pour mieux communiquer leur message, il y a un geste et des paroles pour interpréter. Devant la profanation du Temple, Jésus proteste comme Jérémie (7, 13-14) ou comme Isaïe (56,7).

La parole de Jésus est double : d’abord il demande de mettre fin à une pratique indigne de Dieu. Jésus se comporte en défenseur des droits de Dieu son Père. Il révèle en même temps sa relation filiale avec son Père. Il est chez lui dans le Temple. Ensuite il répond à la demande de signe, en parlant du Temple de son corps. Exactement Jésus pense au sanctuaire, c’est-à-dire le Saint des Saints, le lieu le plus sacré du Temple, qui était le lieu de la rencontre entre le Peuple d’Israël et son Dieu. Désormais, c’est le Christ ressuscité qui est le seul chemin vers Dieu,  le seul Temple véritable où les hommes peuvent rencontrer Dieu. Et ce nouveau Temple est universel, il n’est la propriété d’aucun peuple, d’aucune civilisation.

Quand Jésus dit « en trois jours je le relèverai », il parle de sa résurrection.

L’évangéliste saint Jean fait lui-même le commentaire du geste de Jésus en le rapprochant du psaume 69, 9-10 : « l’amour de ta maison fera mon tourment » et ce zèle de Jésus pour la maison de Dieu le conduira à la mort, et Jean explique que c’est à la lumière de la résurrection de Jésus qu’on peut bien comprendre Jésus quand il parle du temple de son corps.

Jean écrit son évangile après la destruction du Temple de Jérusalem par les armées romaines de Titus en l’an 70. Sans doute, il s’agit dans cet évangile de souligner le caractère caduc des sacrifices du Temple. Désormais, seul reste valable pour réconcilier l’homme avec Dieu le sacrifice de l’unique Sauveur, l’homme-Dieu Jésus. En son Corps ressuscité, tous les hommes sont appelés à se rassembler comme dans l’unique Temple nouveau.

 

TA PAROLE DANS NOS MAINS :

La Parole aujourd’hui dans notre vie  

Est-ce que le Christ ressuscité est bien au cœur de notre relation avec Dieu, de notre prière. (Attention aux chaînes de prière qui nous tombent entre les mains avec des consignes pour les reproduire et les diffuser. Les arrêter sans hésiter.)

Jésus ressuscité, le nouveau Temple, est pour tous. Est-ce que notre communauté chrétienne, nos groupes, sont ouverts, accueillants à tous ? (Parfois nous sommes satisfaits de nous retrouver entre nous, avec les mêmes idées, les mêmes pensées…et nous risquons de n’être plus, dans le Christ, un chemin vers Dieu pour d’autres, surtout s’ils ne pensent pas tout à fait comme nous…).

Ensemble prions  

Chant : Peuple choisi  (Carnet paroissial p.239  c.1,2,3)

Confions-nous aux promesses du Christ et prions pour l’Église :

Temple fondé sur le Christ, la pierre angulaire, Peuple qui met en lui sa foi.

Voici  la demeure de Dieu  chez  les hommes !

Voici la maison de paix où l’homme reçoit le don de Dieu

Voici le temple ouvert où l’homme qui adore devient témoin de Dieu.

 

 

Pour lire ou imprimer le document en PDF cliquer ici : 3ième Dimanche de Carême

 

 

 

 




3ième Dimanche de Carême (Jn 2, 13-25) – par le Diacre Jacques FOURNIER

 » Jésus, au coeur de l’Alliance Nouvelle « 

(Jean 2, 13-25)…

Comme la Pâque juive était proche, Jésus monta à Jérusalem.
Dans le Temple, il trouva installés les marchands de bœufs, de brebis et de colombes, et les changeurs.
Il fit un fouet avec des cordes, et les chassa tous du Temple, ainsi que les brebis et les bœufs ; il jeta par terre la monnaie des changeurs, renversa leurs comptoirs,
et dit aux marchands de colombes : « Enlevez cela d’ici. Cessez de faire de la maison de mon Père une maison de commerce. »
Ses disciples se rappelèrent qu’il est écrit : ‘L’amour de ta maison fera mon tourment.’
Des Juifs l’interpellèrent : « Quel signe peux-tu nous donner pour agir ainsi ? »
Jésus leur répondit : « Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. »
Les Juifs lui répliquèrent : « Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce sanctuaire, et toi, en trois jours tu le relèverais ! »
Mais lui parlait du sanctuaire de son corps.
Aussi, quand il se réveilla d’entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela ; ils crurent à l’Écriture et à la parole que Jésus avait dite.
Pendant qu’il était à Jérusalem pour la fête de la Pâque, beaucoup crurent en son nom, à la vue des signes qu’il accomplissait.
Jésus, lui, ne se fiait pas à eux, parce qu’il les connaissait tous
et n’avait besoin d’aucun témoignage sur l’homme ; lui-même, en effet, connaissait ce qu’il y a dans l’homme.

 

         

               Dans le cadre de l’ancienne Alliance, la Loi de Moïse exigeait de tout pécheur qu’il « amène au Seigneur à titre de sacrifice de réparation pour le péché commis » un bœuf, une tête de petit bétail ou deux colombes. Tout dépendait de la gravité de sa faute et de ses moyens financiers (Lv 5). Et à l’époque de Jésus, les Grands Prêtres avaient décidé de n’utiliser dans le Temple que la monnaie de la ville de Tyr, en signe de résistance à l’envahisseur romain. Avant d’acheter un animal pour l’offrir en sacrifice, il fallait donc commencer par changer sa monnaie romaine. Et toutes ces transactions étaient autant d’occasions pour s’enrichir ; les Grands Prêtres eux-mêmes percevaient un pourcentage auprès des changeurs et des vendeurs d’animaux…

            Or, « vous ne pouvez servir Dieu et l’argent » (Lc 16,13), car « là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur » (Mt 6,21). Pour que la maison de Dieu soit réellement une « maison de prière pour tous les peuples » (Is 56,7), Jésus, sans violence pour les hommes, chasse tous les animaux du Temple et renverse les tables des changeurs… « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de commerce »…

            Il accomplit ici un acte prophétique fort et ses interlocuteurs le comprennent bien ainsi : « Quel signe peux-tu nous donner pour justifier ce que tu fais là », si tu es vraiment un envoyé de Dieu ? Mais cette question trahit leur aveuglement. Jésus est, en effet, est le plus beau signe que Dieu peut nous offrir, car avec le Fils « fait chair » (Jn 1,14), Dieu lui-même, en Personne, s’offre dans la chair au regard des hommes. Mais seul un cœur ouvert, vrai, sincère, renonçant à mettre l’idole de l’argent à la première place, saura le reconnaître…

            Et son geste va plus loin encore… « La Pâque des Juifs approchait » ? Bientôt, lors d’une fête de Pâque, il mourra sur une Croix au moment où des milliers d’agneaux étaient égorgés au Temple en vue du repas pascal. « Il est l’Agneau de Dieu » offert une fois pour toutes pour les péchés de tous les hommes, de tous les temps… Désormais, les sacrifices d’animaux sont inutiles… De plus « le Père est en Lui » (Jn 14,10-11), et il est « l’unique médiateur entre Dieu et les hommes » (1Tm 2,5), le « Chemin » vers la Maison du Père et « la Porte » qui en ouvre l’accès (Jn 14,6 ; 10,9). Le Temple n’est donc plus le seul lieu de la rencontre avec Dieu. Avec le Fils et par le Fils, c’est en tout lieu que Dieu s’offre désormais à notre foi, « en Esprit et en Vérité » (Jn 4,19-24)…

                                                                                                                                  DJF

 




3ième Dimanche de Carême (Jn 2, 13-25)- Homélie du Père Louis DATTIN

Vendeurs du temple

Jn 2, 13-25

L’affaire des « marchands du temple » est un des épisodes les plus connus de la vie de Jésus. Il a été raconté par les quatre évangélistes. Il a été illustré par de nombreux peintres et graveurs. Quelle scène extraordinaire ! Quelle belle colère ! Il n’est pas étonnant que Jésus soit arrêté et condamné, après une telle performance !

Si quelqu’un s’avisait d’en faire autant à St-Pierre de Rome, à Lourdes ou à Lisieux : on ne donnerait pas cher de sa peau ! Puisse-t-il ne pas avoir trop d’imitateurs car nous aurions de jolies pagailles. Jésus, lui, le prédicateur de l’amour, voici qu’il prend un fouet, pénètre dans le parvis du temple, chasse les marchands de colombes, de bœufs et de brebis, jette à terre les tables des changeurs et renverse les comptoirs et c’est le même qui, au bord du lac, a proclamé les Béatitudes :

« Heureux les doux ! »

Alors ce Jésus ? Est-il un violent ou un non-violent ? Essayons de comprendre ce qu’il veut nous montrer car cet épisode se prête à bien de contre-sens.

Tout d’abord, le Christ ne s’en prend pas aux commerçants comme tels. Il ne les accuse pas d’être  » malhonnêtes » et c’était commode pour les fidèles d’acheter sur place, ce qui était nécessaire au sacrifice, de changer de la monnaie pour avoir celle qui était acceptée à l’intérieur. Il faut se rendre compte de ce qu’était alors le Temple des Juifs.

Ce n’était pas qu’un Temple parmi d’autres… c’était le Temple ! Le seul lieu réservé à l’adoration du Seigneur, un lieu vers lequel, chaque juif de Palestine devait aller chaque année pour y faire des sacrifices au Seigneur et payer l’impôt religieux.

C’est seulement à cause de la dispersion du peuple juif que se sont élevées un peu partout des synagogues de plus en plus nombreuses.

Le Temple était vraiment le cœur de la vie des Juifs et justement, c’est ici qu’apparaît le sens profond de ce récit, au-delà du temps et de l’espace. Vous avez remarqué le mot, l’expression que Jésus a employé pour parler du Temple : il a dit « la maison de mon Père ». Par là même, il déclare qu’il est « le Fils » et les prêtres, pas contents du tout, l’interpellent : « Quel signe peux-tu nous donner pour justifier ce que tu as fait là ? »

« Détruisez ce Temple et, en trois jours, je le rebâtirai, je le relèverai ». Mais de quel temple s’agit-il ? Non plus le Temple de Jérusalem qui va être définitivement détruit quelques années plus tard, mais le Temple de son corps. Bientôt les disciples comprendront que la reconstruction en trois jours, c’était, en fait, l’annonce de la Résurrection !

Ce que Jésus veut nous révéler aujourd’hui, c’est que nous n’avons plus besoin d’un lieu pour le culte « en esprit et en vérité« . Rappelez-vous ce que lui demandait la Samaritaine. « Nos pères ont adoré sur cette montagne (le mont Garizim) et vous, vous affirmez que c’est à Jérusalem que se trouve le lieu où il faut adorer ».

Jésus lui dit : « “Crois-moi, femme, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne, ni à Jérusalem que vous adorerez le Père” ». « Dieu est « Esprit » et c’est pourquoi ceux qui veulent l’adorer, doivent le faire « en esprit et en vérité ».

Enfermer Dieu dans un édifice, dans des rites, dans un code, c’est la tentation de toutes les religions. Certes, des lieux de rassemblement sont nécessaires mais gardons-nous de nous en servir pour édifier des murs qui seraient autant d’obstacles à la rencontre de Dieu. Le signe authentique de la présence de Dieu, c’est désormais, ni le Temple, ni la Loi, c’est Jésus lui-même, le Verbe de Dieu. Le Temple de Dieu, c’est Jésus : nous aussi, comme les marchands, il faut nous laisser bousculer, renoncer à nos calculs mesquins, dépasser les barrières autour de nos églises, pour nous centrer, pendant ce Carême, nous recentrer autour de la personne de Jésus : seul véritable Temple de Dieu.

Il n’est pas mauvais, certes, de participer aux cérémonies de l’église, de faire notre examen de conscience pour aller nous réconcilier d’une façon vraie avec le Seigneur… mais en vue de l’essentiel : qui est la « conversion de notre cœur ».

L’urgent, est de nous réorienter vers celui qui nous donne accès au Père : Jésus, le Christ, mort sur la Croix par amour. Le vrai Temple de Dieu, c’est le Corps du Christ et le Corps du Christ aujourd’hui, c’est le peuple qui met sa foi en lui. Jésus opère une révolution subversive pour l’architecture religieuse : non seulement, il laisse entendre que les temples sont devenus inutiles mais, en plus, il désigne le nouveau Temple : son Corps mort et ressuscité. Le nouveau Temple, c’est lui, en qui se transmet et se noue l’amour de Dieu et des hommes dans une seule communion.

Jésus le ressuscité est toujours avec nous. Dieu habite au milieu des hommes. C’est Jésus le vrai Temple de Dieu. L’humanité de Jésus constitue donc « le grand signe de Dieu » glorifié dans son humanité.

Il est le Temple nouveau. Comme celle des juifs, notre foi doit être purifiée. Quel est le signe de notre Dieu ? Celui d’un potentat enfermé dans son palais d’où il gouverne à coups d’interdits et d’obligations tatillonnes ? Celui du gendarme avec qui on pourrait marchander quelque adoucissement de peine ? Le Christ est la vraie révélation du vrai visage de Dieu.

Pour vivre avec nous une authentique relation d’amour, il nous entraine sur les chemins radicalement nouveaux du Royaume qui vient.

Pour progresser vers Pâques, laissons-nous être bousculés comme les marchands et renonçons aux mesquines sécurités de nos petits calculs, dépassons les barrières sociales édifiées autour de nos églises, laissons-nous emporter par la folie de l’amour qui culmine au Calvaire.

En fait, où est Dieu ?

1- Qui l’a placé à l’extérieur de la vie, dans l’enclos des lieux de cultes, l’enfermant dans le rôle de celui à qui on doit des rites ? C’est l’homme.

2- Qui a délimité la frontière entre 2 terres : le « profane » et le « sacré » ?

3- Qui a séparé Dieu de son peuple au milieu duquel il voyageait ? Toujours l’homme.

Les marchands du temple sont le signe de cette relation faussée entre l’homme et Dieu. Ils perçoivent indûment une sorte de péage entre le pays des hommes et le Royaume de Dieu. C’est ce signe que Jésus chasse à coups de fouet : Jésus veut vivre avec nous, être avec nous, demeurer en nous.

« Demeurer en nous » ? Mais alors ne serions-nous pas nous-mêmes, des « temples de Dieu » ? Incroyable mutation qui va jusqu’à faire dire à St-Pierre que le Temple qui a Jésus pour « pierre angulaire », est fait de « pierres vivantes » que sont les chrétiens. Temple sacré, non de pierres ni de briques, mais de personnes appelées à s’aimer pour que circule l’amour infini de Jésus. La maison de Dieu est sacrée.

Comment pourrait-on donner asile à Dieu et, en même temps se dégrader à l’intérieur ? Etre en contradiction avec lui dans ses relations humaines ? Construire des institutions du monde à l’envers de l’Esprit de Dieu ? St-Paul dit aux chrétiens de Corinthe : « Vous êtes le temple de l’Esprit de Dieu ».

Nous sommes devenus les « pierres vivantes » de la maison de Dieu parmi les hommes. Alors ? Parce que Jésus est le seul Temple de Dieu, parce que nous-mêmes, nous sommes « la demeure » de son Esprit : « Ce temple est sacré et ce temple c’est vous ». Balayez-moi tout ça ! Balancez-moi tout ça ! Place à Dieu ! Rien qu’à Dieu ! C’est sacré et tout homme est sacré ! Comme Dieu !

Profitons de ce Carême pour chasser de nous tout ce qui est impur. Notre cœur est un lieu de rencontre avec Dieu. Il doit être un Temple sans reproche, une « maison de prière« . AMEN




Vendredi 23 février, 1ère semaine de Carême (Mc 5, 20-26) – Homélie du Père Rodolphe EMARD

Nous pouvons retirer au moins deux leçons de Jésus dans l’Évangile de ce jour :

  • Jésus nous rappelle l’interdit du meurtre. Certains aiment dire : « Mi tue pas, mi vole pas, moin lé pas plus mauvais qu’un autre… »

Dans l’interdit du meurtre, nous entendons bien sûr l’interdiction d’ôter la vie physique à quelqu’un. Mais Jésus nous rappelle aussi d’autres manières de tuer : Nous pouvons détruire la vie des autres si nous nourrissons une colère excessive dans nos cœurs envers eux ou si nous les insultons (cf. Mt 5,22). La colère et l’insulte amènent donc à la mort d’autrui.

Nous pouvons aussi tuer la réputation de l’autre, nous pouvons mépriser notre prochain, l’ignorer ou le voir comme un marginal. Nous pouvons encore garder rancune contre notre prochain. Ces exemples sont des manières de tuer, non pas physiquement mais moralement et spirituellement.

Le temps du Carême nous invite clairement à faire la lumière sur ces points dans nos vies…

  • Jésus nous enseigne également sur le devoir de se réconcilier avec son frère : « va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande »...

Le temps du Carême est un temps de conversion, le temps de la réconciliation avec Dieu, avec notre prochain, avec nous-même. Le Seigneur nous interpelle davantage sur la réconciliation avec son prochain dans l’évangile du jour. Le temps du Carême nous invite également à faire également la lumière sur ce point dans nos vies…

Je termine avec deux citations :

▌Saint Jean Chrysostome : « Rien ne nous rapproche plus de Dieu que d’être toujours prêts à pardonner ».

▌Pape Benoît XVI : « Nous ne pouvons pas communiquer avec le Seigneur, si nous ne communiquons pas entre nous. (…) C’est pourquoi il faut apprendre la grande leçon du pardon : ne pas laisser notre âme être rongée par le ressentiment, mais ouvrir notre cœur à (…) l’écoute de l’autre, ouvrir notre cœur à la compréhension à son égard, à l’éventuelle acceptation de ses excuses, au don généreux des nôtres »[1].

 

[1] Benoît XVI, extrait de l’homélie pour la clôture du 24ème Congrès eucharistique italien, le 29 mai 2005.

 




2ième Dimanche de Carême (Mc 9, 2-10) – par Francis COUSIN

      « Il fût transfiguré devant eux,

ses vêtements devinrent resplendissants. »

Remettons un peu les choses dans l’ordre.

« Il (Jésus) commença à leur enseigner qu’il fallait que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, trois jours après, il ressuscite. » (Mc 8,31).

Perspective que Pierre n’accepta pas, et il le fit savoir à Jésus qui le rabroua. D’abord parce que le concept de résurrection était flou pour les apôtres, et en plus, ce n’était pas comme cela qu’ils voyaient la fin de l’aventure avec Jésus.

La transfiguration est comme une catéchèse pour les apôtres, ou du moins pour trois d’entre eux ,pour qu’ils voient, en partie, ce qui arrivera après.

En effet, seuls trois apôtres sont choisis par Jésus : Pierre, celui qui sera choisi pour conduire l’Église, Jacques et Jean, les deux ’’fils du tonnerre’’.

C’est un peu réjouissant que ce soient eux qui soient choisis, car ils ne furent pas à l’abri de reproches de Jésus, ce qui montre que Jésus voit plus loin que nos petites incartades ; il voit ce que nous avons dans le cœur.

Ensuite il y a la montée sur la montagne, comme l’ont avant eux Moïse sur le mont SinaÏ, et Elie sur le mont Horeb, les deux seuls à avoir été invités à ‘’voir’’ la présence de Dieu sur la montagne par le buisson ardent ou par le bruissement d’une brise légère.

Et puis il y a la transfiguration : Jésus devient autre aux yeux des trois apôtres. Il devint ce qu’il était depuis toujours ans le ciel : Dieu, fils de Dieu, lumière, né de la lumière ; même ses vêtements devinrent lumière …

Puis apparurent Elie, qui représente l’ensemble des prophètes, ainsi que Moïse à qui fit données les dix Paroles de Dieu.

Un petit cercle fermé parmi les personnages les plus importants de la religion juive …Et ils s’entretenaient avec Jésus.

Stupeur, Éblouissement des trois apôtres qui ne savent que Dire. Sans doute un bonheur très fort, et un questionnement : qu’est-ce que cela signifie ?

Alors Pierre s’écrit : « Rabbi, il est bon que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. ». Mais il disait n’importe quoi, tellement sa frayeur était grande …

« Survint une nuée qui les couvrit de son ombre, et de la nuée une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le ! »

Une nuée, signe de la présence de Dieu, comme lors de la traversée de la mer Rouge … comme lors du baptême de Jésus …

Et la voix de Dieu qui en sort, avec une confirmation d’une information : Jésus est bien le fils de Dieu, le fils bien-aimé …

Et un conseil : « Écoutez-le ! »

Qui ici a le même sens que « obéissez-lui ! », (Les deux mots ont la même origine latine).

Donc « Écoutez sa Parole et mettez-la en pratique. » ( cf Lc 8,21).

            Mais l’annonce du Royaume n’attend pas … Il faut redescendre de la montagne … mais avec ce conseil de Jésus : « Ne racontez à personne ce que vous avez vu, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. ». Parce que, de toute façon, ils n’auraient pas été crus.  …

Moi aussi, Seigneur,

la suite de Pierre, Jacques et Jean,

tu m’invites à gravir avec toi la montagne.

Moi aussi je puis accéder à la vision de ta gloire,

si je me laisse suffisamment habiter

par les paroles de la Bible,

celles de Moïse, celles d’Elie et des apôtres,

et si le me laisse façonner par ton Esprit Saint.

Moi aussi je peux vivre dans ta lumière,

 

                                  Christian Delorme

 

Francis Cousin

 

  

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2ième dimanche de Carême (Mc 9, 2-10) par le Diacre Jacques FOURNIER

« Que ton Règne vienne, sur la terre comme au ciel » (Mc 9,2-10)…

En ce temps-là, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux.
Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille.
Élie leur apparut avec Moïse, et tous deux s’entretenaient avec Jésus.
Pierre alors prend la parole et dit à Jésus : « Rabbi, il est bon que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. »
De fait, Pierre ne savait que dire, tant leur frayeur était grande.
Survint une nuée qui les couvrit de son ombre, et de la nuée une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le ! »
Soudain, regardant tout autour, ils ne virent plus que Jésus seul avec eux.
Ils descendirent de la montagne, et Jésus leur ordonna de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts.
Et ils restèrent fermement attachés à cette parole, tout en se demandant entre eux ce que voulait dire : « ressusciter d’entre les morts ».

2ième dimanche de carême

         « Le Fils ne peut rien faire de Lui-même » (Jn 5,19)… Dieu le Père a donc toujours l’initiative dans sa vie… Et il l’invite ici à monter « à l’écart sur une haute montagne » avec trois de ses disciples, « Pierre, Jacques et Jean ». Et là le Père va glorifier son Fils (Jn 12,28) en leur donnant de pouvoir découvrir « quelque chose » de son Mystère. Et que vont-ils percevoir ? Des « vêtements » qui deviennent « resplendissants » d’une « blancheur » sans « pareille »… Et au même moment, ils vont expérimenter un bonheur immense : « Maître, il est heureux que nous soyons ici »… Mais «  » sont-ils ? Tout à la fois sur la terre, « à l’écart, sur une haute montagne », et au ciel dans « la Maison du Père ». Et d’ailleurs, la voix du Père se fait entendre : « Celui-ci est mon Fils Bien‑Aimé. Ecoutez-le. »

            Et c’est bien ce qu’ils ont déjà fait, car c’est Jésus qui les a invités à venir en ce lieu. Ils l’ont écouté, ils lui ont obéi, et voilà que dans les circonstances si simples de leur vie quotidienne, une marche en montagne, ils découvrent la Présence du Père et entendent sa voix… « Le Royaume des Cieux est tout proche », ne cessera de leur répéter Jésus… Et quel est-il ? Un Mystère de Communion dans l’Esprit Saint… Pour le découvrir, il suffit de lui faire confiance, de le suivre, et d’être attentif… Alors le ciel, discrètement, imperceptiblement, se révèlera au cœur des réalités les plus simples, les plus humbles : « ses vêtements devinrent resplendissants », « son visage devint autre », écrit St Luc… Des vêtements, un visage, et voilà que le ciel apparaît… Une incroyable aventure, à laquelle le Christ nous invite tous, dès aujourd’hui, dans la foi… En effet, après sa mort et sa résurrection, « à nouveau je viendrai », nous promet-il, et dans le secret des cœurs, par le Don de l’Esprit Saint, « je vous prendrai près de moi, afin que là où je suis », « dans la Maison de mon Père », uni au Père dans la communion d’un même Esprit, « vous aussi vous soyezJe suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père que par moi » (Jn 14,1-6)Oui, « quand je serai parti, je vous enverrai l’Esprit de Vérité qui vient du Père » (Jn 14,26), l’Esprit de Lumière (Jn 4,24 ; 1Jn 1,5) et de Vie (Jn 6,63). Alors, sans voir, vous vivrez et c’est parce que vous vivrez que vous « verrez » que vous avez « libre accès auprès du Père en un seul Esprit » (Jn 14,18-20 ; Ep 2,18)… Et c’est de « cela » que je vous invite à être « les témoins »…   DJF




2ième Dimanche de Carême (Mc 9, 2-10) – Homélie du Père Louis DATTIN

Transfiguration

Mc 9, 2-10

En relisant cet épisode de la Transfiguration, je pensais à l’anecdote que me rapportait, un jour, une jeune maman : emmenant son petit garçon de 5 ou 6 ans à l’église, pour faire une prière, elle lui expliquait que Jésus était présent dans le tabernacle, jusqu’au jour où l’enfant, un peu las sans doute, lui répliqua : « Mais enfin, maman, pourquoi Jésus il fait toujours « coucou » et jamais « le voilà ».

Les enfants ont l’art, n’est-ce-pas, de poser naïvement les questions les plus radicales ! Au moment de la Transfiguration, les trois apôtres ont eu brusquement le sentiment que, cette fois-ci, c’était « le voilà« . Oui, « le voilà« , le Christ, le Fils du Père, s’entretenant avec Moïse et Elie c’est-à-dire avec les partenaires de l’Alliance de la Bible :

« le voilà » avec des vêtements resplendissants, nimbé d’une lumière telle qu’elle parait irréelle,

« le voilà« , le vrai visage de Jésus : c’est le visage même de Dieu,

« le voilà« , aussi, la nuée qui est le signe de l’Alliance,

« le voilà« , aussi cette voix : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le », cette même voix qui répète ce qu’elle a déjà dit le jour du Baptême de Jésus, au Jourdain.

Ah ! C’est autre chose que la physionomie de cet homme grave qui parle de sa Passion prochaine, qui raconte qu’il va être mis à mort et que, pour cela, il doit monter à Jérusalem ! Ce n’est plus cet homme sévère qui vient de dire à Pierre : « Va- t- en loin de moi, Satan » parce qu’il avait osé dire que la Passion pouvait être évitée.

Oui, le voilà sous son vrai visage, un visage de lumière, bienveillant, souriant. Oui, c’est cela : c’est cela le sourire de Dieu, Dieu dans sa tendresse.

Or, savez-vous comment on dit « le sourire de Dieu » en hébreu ? ISAAC …et nous voici reportés à la première lecture, où, là encore, Dieu nous parait bien sévère, bien cruel, disons le mot : bien sadique.

« Prends ton fils, ton unique fils, celui que tu aimes, Isaac ; va au pays de Moriah et là, tu l’offriras en sacrifice sur la montagne que je t’indiquerai ». Un Dieu-amour, celui-là ! Un Dieu sourire, celui-là ! Un Dieu de tendresse ! Allons donc ! Pour celui qui ne connaît pas Dieu, ce texte est scandaleux. Comment un père peut-il admettre qu’un Dieu lui demande de tuer son enfant !

L’attitude d’Abraham nous paraitra moins extraordinaire si nous savons que les sacrifices d’enfants étaient pratiqués chez les peuples voisins d’Israël. Mais, ici, au contraire, Dieu veut sauver cet enfant pour montrer aux Israélites, par un exemple tiré de la vie de leur grand ancêtre, qu’il condamne de telles pratiques.

Oui, trop souvent, nous nous faisons des « images de Dieu » qui sont fausses, qui sont même païennes. Combien de chrétiens ont vécu avec, en eux-mêmes, l’image d’un Dieu justicier, d’un Dieu vengeur : « Dieu » est un Dieu tout autre que nous l’imaginons ! Abraham va découvrir un visage de Dieu qu’il ne connaissait encore : Dieu qui ne veut pas la mort de l’homme, mais l’offrande du cœur de l’homme, le visage d’un Dieu qui donne à nouveau son fils à Abraham, celui qui avait accepté de tout perdre.

Dieu est un Dieu de vie et non de mort. Dieu est un Dieu d’espérance. Dieu désire la construction de l’homme, d’un homme nouveau, enfin libéré de tout ce qui l’entrave pour en faire, enfin, un homme libre ! Nous avons à modifier nos images de Dieu.

Mais attention ! Ne nous y trompons pas, si déjà, à la Transfiguration, nous avons un avant-goût de la joie de Dieu : avoir sauvé l’homme, avant-goût de la Résurrection, avant-goût du triomphe définitif de Dieu sur le péché et sur le mal, lueur prématurée et prémonitoire de Pâques, nous savons aussi qu’il y a, pour y arriver, d’autres étapes à franchir et que, si Abraham, dans sa foi héroïque a pu entendre la Nouvelle Alliance de Dieu avec lui et avec sa descendance, ce fut au prix d’une épreuve sans nom, d’une souffrance indicible : il en fut de même pour Dieu. Et quand nous pensons à Abraham, voyant son fils Isaac gravissant la montagne, avec, sur son dos, le bois de l’holocauste, nous ne pouvons ne pas penser à Dieu, voyant son fils, son unique, celui qu’il aime, son autre lui-même, lui aussi, monter le Calvaire, portant sur son dos le bois de la Croix. Isaac s’étendra sur l’autel comme Jésus se couchera sur la Croix. Et ce n’est plus Abraham qui abandonne son fils, c’est Dieu lui-même qui livre la chair de sa chair ! Abraham, lui, entendit : « Ne porte pas la main sur l’enfant, ne lui fais aucun mal », « Tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique ».

A la Passion, il en va autrement : la main des bourreaux n’est pas arrêtée, les clous se sont enfoncés, le sang humain et divin a coulé, on a entendu le Fils dire : « Père, pardonne-leur », puis la parole stupéfiante : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ».

Oui, ce que Dieu a refusé à Abraham : la mort de son fils, Dieu l’a fait lui, par amour. Pour son propre Fils… il a été jusque-là ! «“Père, je remets mon âme entre tes mains » : c’est « l’Alliance, la Nouvelle Alliance ».

Une Alliance qui ne sera pas une évasion dans une contemplation devenue rêve : elle s’incarnera dans un visage, visage à la fois douloureux et pacifié, visage de Dieu que le centurion romain saura bien identifier : « Vraiment, celui-là était le fils de Dieu ».

Voilà jusqu’où va l’amour de Dieu ! La main d’Abraham a été arrêtée, immobilisée : « Ne porte pas la main sur l’enfant ».

La main de Dieu, elle, n’a pas été stoppée : ce que Dieu n’a pas réclamé à Abraham, il l’a fait lui-même, pour lui, pour nous « Il nous a livré son propre Fils » nous rappelle St-Paul, dans la seconde lecture, et accepté qu’il soit mis à mort pour nos péchés. Alors, dans ces conditions, comment pourrait-il, avec son Fils, ne pas nous donner tout ?

Qui accusera ? Qui pourra condamner puisque Jésus-Christ est mort et que, ressuscité, il intercède pour nous ? Devant ce visage du Christ, donné pour nous, livré pour nous, nous mesurons l’importance de l’Alliance de Dieu, un Dieu qui s’engage, pas seulement à protéger l’homme, à l’aider ou à le guider, mais un Dieu qui nous aime à ce point que c’est lui-même qui se livre et qui met en jeu sa propre vie pour le salut de son allié.

L’Alliance, dans la Bible, était toujours conclue par le sang : celui d’un agneau. C’est ce même sang qui avait protégé les Hébreux, la fameuse nuit de leur libération d’Egypte, sang sur le bois du linteau de la porte de la maison. Ce sang de l’agneau sur le bois, c’est maintenant celui de Dieu sur la Croix.

Mesurons, en dévisageant ce visage du Christ transfiguré,

la tendresse infinie de Dieu, jusqu’où va son amour pour nous ! AMEN