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« Donnez-leur vous-mêmes à manger. »
Ne nous arrive-t-il souvent, dans nos prières ou dans nos conversations, de dire à Dieu : « Dieu, tu devrais faire ceci ! » ou bien « Si Dieu existait, il aurait fait cela et tout le monde aurait été content ! » ou encore : « Tu vois notre situation avec le Covid-19, que ce soit sanitaire ou économique. Et c’est toujours les petits qui trinquent ! fais quelque chose pour nous ! ».
C’est une situation courante : dès qu’on a un problème qui nous semble insoluble, on demande à Dieu de nous venir en aide.
C’est ce qui est arrivé aux apôtres, devant la foule qui était assemblée autour de Jésus pour l’écouter ou pour attendre une guérison, et voyant la fin du jour arriver, ils se tournent vers Jésus pour lui dire : « L’endroit est désert et l’heure est déjà avancée. Renvoie donc la foule : qu’ils aillent dans les villages s’acheter de la nourriture ! ».
La réponse de Jésus peut sembler surprenante : « Donnez-leur vous-mêmes à manger. », ce qui pourrait vouloir dire « Débrouiller-vous ! ». Mais ce n’est pas du tout le cas.
En effet, comment Jésus aurait-il pu laisser tous ces gens sans se préoccuper d’eux ?
C’est ce qu’il faisait déjà depuis qu’il avait débarqué en les voyant tous, arrivés là sans rien prévoir, partis sur un coup de tête, ou plutôt un coup de cœur, avec femmes et enfants, pour écouter ’’le maître’’ : « Il fut saisi de compassion envers eux et guérit leurs malades. ».
À l’amour débordant de Jésus envers tous ces gens répond l’attente de ceux-ci pour son enseignement : l’écouter parler de la miséricorde de Dieu qui doit se traduire en une miséricorde entre tous les hommes, le voir guérir les plus petits, ceux que l’on néglige, les malheureux, les malades, les impotents … et louer Dieu pour ses bienfaits.
« Donnez-leur vous-mêmes à manger. »
« Oui ! Mais comment ? On n’a rien, ou presque : juste « cinq pains et deux poissons ! », c’est complétement dérisoire pour une foule comme celle-ci ! Même pour nous, cela n’est pas suffisant ! ».
C’est peu, c’est sûr, mais il y a déjà une démarche des apôtres qui va dans le bon sens : comme le disait La Fontaine dans le chartier embourbé : « Aide-toi, le Ciel t’aidera ! ».
Car c’est à partir de ce petit peu que Jésus va pouvoir accomplir le miracle de nourrir tout le monde … et de récupérer douze paniers de restes. Il se tourne vers son Père, prononce la bénédiction, rompt les pains, les donne aux apôtres pour qu’ils les distribuent à la foule. Il fera de même lors de la dernière cène …
Jésus prend soin de la foule, il la nourrit gratuitement … de la nourriture terrestre … mais aussi et surtout de la nourriture spirituelle … comme il le fait encore maintenant à chaque messe.
C’est là qu’on peut comprendre le discours d’Isaïe : « Vous tous qui avez soif, venez, voici de l’eau ! Même si vous n’avez pas d’argent, venez acheter et consommer, venez acheter du vin et du lait sans argent, sans rien payer. Pourquoi dépenser votre argent pour ce qui ne nourrit pas, vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas ? Écoutez-moi bien, et vous mangerez de bonnes choses, vous vous régalerez de viandes savoureuses ! Prêtez l’oreille ! Venez à moi ! Écoutez, et vous vivrez. » (Is 55,1-3).
Écouter l’enseignement de Jésus, comme le fit la foule. Écouter l’enseignement de Jésus, comme nous devons le faire, pas distraitement, mais avec attention … et le mettre en pratique …
Écoutons la Parole de Dieu, communions au pain de vie, laissons-nous envahir par l’amour de Dieu, toutes choses qu’il nous donne gratuitement … pour que nous allions vivre de l’amour de Dieu et devenions des témoins de son amour pour tous les hommes.
« Donnez-leur vous-mêmes à manger. »
C’est ce que Dieu continue de dire à chacun de nous : donnez à ceux qui ont faim … du pain, de l’amour, de la reconnaissance, de l’espoir, de l’attention …
On ne s’en sent pas capable ? Il suffit de peu … ne serait-ce que la volonté de le faire ! Le reste, c’est l’affaire de Dieu …avec nous …
Seigneur Jésus,
puissions-nous être comme cette foule
qui quitte toutes ses occupations
et marche longtemps
pour aller t’écouter !
Tu l’as nourrie de ta Parole
et lui as donné à manger,
gratuitement !
Et que nous puissions rassasier
toutes les faims des hommes …
avec ton aide !
Francis Cousin
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Je voudrais insister sur un point capital à mes yeux : le surnaturel passe dans nos vies par le naturel. Il n’y a pas un espace et un temps pour Dieu d’un côté et nos vies de l’autre. Il y a une connexion entre les deux. D’ailleurs, avec l’Incarnation, Dieu a assumé toutes nos vies. Il nous rejoint par des intermédiaires les plus anodins, et par des personnes humaines ! (…)
Je me sens vraiment conduit. C’est ça la vie charismatique, et ce n’est pas réservé à une communauté ou à un courant d’Eglise dit « charismatique ». La vie charismatique consiste à se laisser faire et guider par l’Esprit Saint dans la vie de tous les jours, en toutes circonstances. C’est comme si on était un bateau : on va beaucoup plus vite si on hisse les voiles pour que le vent de l’Esprit y souffle. Sinon, on rame, et on passe à côté des personnes qu’il place sur notre route, des signes qu’il nous adresse. Chaque chrétien est appelé à vivre ainsi avec l’Esprit Saint dans sa vie de famille ou de travail, dans sa vie sociale, et pas seulement en le priant lors de moments dévolus à la vie spirituelle. La vie spirituelle ne fait qu’un avec la vie naturelle, même si les temps consacrés à l’oraison ou à d’autres formes de prières sont vitaux…
Jean-Marie Elie SETBON (extrait de son livre “De la Kippa à la Croix ; conversion d’un Juif au Catholicisme, aux éditions Salvator).
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« Dans sa joie,
il va vendre tout ce qu’il possède … »
Nous terminons aujourd’hui ce chapitre de Matthieu sur les paraboles concernant le Royaume des Cieux avec trois paraboles : une qui nous rappelle celle de dimanche dernier avec le bon grain et l’ivraie, la troisième, et deux autres au début, très courtes et qui se ressemblent.
Dans les deux cas, une personne découvre de manière impromptue quelque chose à laquelle il ne s’attendait pas, qui a pour lui une grande valeur. Dans le premier cas, un trésor enfoui dans un champ, dans le second une perle de grande valeur. Et la réaction de chacun est la même : « vendre tout ce qu’il possède » et acheter le champ ou la perle.
Notre première réaction risque certainement d’être : « Il est fou ! Vendre tout … pour un trésor ou une perle de grande valeur, d’accord … si on récupère largement ce qu’on a vendu ! Mais pour le Royaume de Cieux … C’est risqué ! C’est énorme ! On risque d’obérer toute sa vie sur un coup de tête … sans compter la famille, les enfants … ce qu’en pensent les voisins … ».
Oui, mais il s’agit du Royaume des Cieux ! Et ce trésor qui est caché, il est à la portée de tout le monde. Mais on ne le voit pas … avec nos yeux humains !
Il faut que ce soit Dieu qui nous ouvre les yeux pour que nous le découvrions. Et nous pouvons tous le découvrir, parce que, même découvert, il est toujours là. Ce n’est pas comme le trésor de La Buse (s’il existe) !
Alors on peut se poser la question : ai-je découvert ce trésor ?
Une manière de le savoir nous est donnée par le texte de l’évangile : « Dans sa joie … »
Est-ce que la Parole de Dieu, la Parole de Jésus, me met dans la joie ? Est-ce que je suis heureux de suivre l’évangile, comme le dit le psaume : « Mon partage, Seigneur, je l’ai dit, c’est d’observer tes paroles. Mon bonheur, c’est la loi de ta bouche, plus qu’un monceau d’or ou d’argent. » ?
Ou encore : « Déchiffrer ta parole illumine, et les simples comprennent. » : La Parole de Dieu, déchiffrée avec l’aide de l’Esprit Saint, illumine ; elle met dans la joie. Et les gens simples comprennent, comme le disait l’évangile au début du mois : « ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. » (Mt 11,25).
La Joie, Jésus nous y invite : « Entre dans la joie de ton Seigneur. » (Mt 25,23) juste avant la parabole du jugement dernier, car il y a une condition pour y entrer : faire fructifier les talents que Dieu nous a donnés, comme pour ici : vendre tout ce qu’on possède, se dénuder devant Dieu pour accepter ce qu’il nous donne, comme le fit saint François d’Assise devant son père et son évêque.
Pour beaucoup de personnes, Dieu, Jésus et ses enseignements, ses Paroles, sont considérés comme des ’’rabat-joie’’.
Pourquoi cela ?
Est-ce vraiment la Parole de Jésus qui les ennuie ? … ou n’est-ce pas plutôt le manque de Joie, d’enthousiasme, de la part des chrétiens qu’ils rencontrent ?
Car la joie peut être un attrait, comme le rappelle l’exemple suivant : « Une jeune femme venait pour un stage d’éducatrice spécialisée au Home Jacques-Sevin, une maison pour garçons en difficulté fondée par les religieuses et accolée au prieuré. ’’Je suis rentrée dans la congrégation, car les sœurs rayonnaient de joie, elles savaient rire et jouer’’ ».
Saint Paul n’est pas en reste : « Soyez toujours dans la joie, priez sans relâche » (1Th 5,16), et il insiste : « Soyez toujours dans la joie du Seigneur ; je le redis : soyez dans la joie … Et la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu’on peut concevoir, gardera vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus. » (Ph 4,4.7).
La paix de Dieu, avec lui, auprès de lui, c’est notre espérance à tous quand nous serons dans le Royaume des Cieux.
Seigneur Jésus,
nous espérons tous nous retrouver
avec toi
dans le Royaume des cieux,
et cela devrait nous réjouir.
Mais pourquoi ne le montrons-nous pas ?
Pourquoi cacher notre joie ?
Aide-nous à être des témoins joyeux !
Francis Cousin
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Jeudi dernier, le 14 mai, le pape François en relation avec d’autres représentants des différentes religions a exhorté les catholiques et les hommes de bonne volonté à prier pour la délivrance de la pandémie du covid-19[1].
Pourquoi favoriser le dialogue interreligieux ? Sur quoi repose-t-il ?
Le cardinal Jean-Louis Tauran (+2018), ancien président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, faisait remarquer que ce dialogue commence par l’affirmation de sa propre foi.
Il ne s’agit pas de mettre sa foi dans sa poche. Les chrétiens qui s’engagent dans le dialogue interreligieux n’ont pas à mettre Jésus ressuscité de côté. C’est à cause de Jésus-Christ et en son nom, que les baptisés vivent « la sortie de soi » pour aller à la rencontre des frères et des sœurs d’autres religions.
Quel est le fondement théologique de ce dialogue ? L’amour de Dieu pour l’humanité : « Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné son Fils unique » (Jn 3, 16). Par ailleurs, le Concile Vatican II enseigne que « par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme » (Gaudium et spes, n°22).
Avant de dire de quelqu’un qu’il est musulman ou bouddhiste ou athée, il convient de le regarder à la lumière de l’Évangile comme un homme aimé de Dieu et uni au Fils de Dieu par le mystère de l’incarnation : « Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous » (Jn 1, 14).
Le mot « dialogue », d’origine grecque, comprend le mot « logos » qui veut dire « verbe », «parole », « raison ». La préposition « dia » signifie « à travers ». Dialoguer suppose se laisser traverser par le Logos, la Parole de Dieu et par la parole des autres.
Notre Dieu n’est pas solitaire mais trinitaire. Notre Dieu unique dialogue au cœur de la Trinité : le Fils écoute le Père dans l’amour de l’Esprit.
Dieu aime le dialogue. La Bible révèle le dialogue de Dieu avec son peuple. Dans la célébration de la messe, nous vivons le dialogue de Jésus-Christ avec son Église. Le Christ nous parle et nous nous lui parlons en grandissant dans la connaissance et l’amour.
Le saint pape Paul VI, dans son encyclique « Ecclesiam suam » de 1964, écrivait : « L’Église se fait conversation » (n°67). Le dialogue fait partie de la mission de l’Église.
Le dialogue interreligieux se pratique de différentes manières : dialogue de la vie, dialogue de la collaboration et de l’expérience spirituelle, dialogue théologique.
Le dialogue de la vie concerne le quotidien. Nous côtoyons des musulmans et des hindous dans nos quartiers, sur nos lieux de travail et de loisirs, dans les commerces en faisant les courses … Il importe de se saluer et de se souhaiter une bonne fête lors des événements religieux. Il arrive que l’on partage des gâteaux pour associer les autres à la joie de croire. Les chrétiens pourraient partager quelques œufs de Pâques en chocolat si aimés par les enfants. L’œuf fermé qui contient le poussin symbolise le tombeau du Christ, scellé mais contenant la Vie.
Nous nous connaissons peu. Les catholiques connaissent peu les autres religions. Les musulmans et les hindous n’ont souvent du christianisme qu’une vision superficielle. Nous gagnerons à nous mieux nous connaître et cela enlèvera la peur.
Le dialogue de collaboration renvoie aux engagements humanitaires tandis que le dialogue spirituel correspond au partage de l’expérience de Dieu dans la prière.
En ce qui concerne le dialogue théologique, il est préférable de le confier aux experts. Le chrétien affirme et affermit sa foi dans le dialogue. Il respecte la différence des croyances. La foi chrétienne repose sur la liberté de conscience et de religion, qui n’est pas toujours partagée malheureusement par d’autres religions. Les disciples de Jésus vivent dans une société pluraliste qu’ils servent avec le meilleur d’eux-mêmes.
Notre frère dominicain, Mgr Pierre Claverie (+1996), évêque et martyr en Algérie, désirait que les hommes passent de la tolérance au dialogue. En regardant la société avec des menaces de violence et de divisions, Mgr Pierre Claverie tenait à se placer « sur les lignes de fracture » afin d’y travailler pour la paix et la réconciliation. À la suite de Jésus persécuté (cf. Jn 15,20) et de saint Paul qui a subi la prison, les coups de fouet et la lapidation, l’évêque d’Oran a versé son sang au service du dialogue avec les musulmans.
Dans la première lecture, tirée des Actes des apôtres, saint Luc nous a présenté la vision du Macédonien, événement extraordinaire qui m’a toujours émerveillé : « À Troas, pendant la nuit, Paul eut une vision : un Macédonien lui apparut,9) debout, qui lui faisait cette demande : ‘Passe en Macédoine et viens à notre secours’ » (Ac 16, 9).
Il y a l’appel intérieur à sortir pour la mission. Dès le lendemain de cette vision, Paul et ses compagnons se sont mis en route vers la Macédoine, dans l’actuelle Europe, en quittant Troas dans la Turquie contemporaine.
Dans la tradition ignacienne, il est question du « sentir intérieur ». Dieu se manifeste se faisant « sentir » dans l’âme où il fait resplendir sa volonté. Cette volonté divine pour le salut de l’humanité finit par s’imposer dès l’intérieur à l’apôtre qui entreprend alors un nouveau chemin d’évangélisation.
Il me semble que cela s’applique aussi au dialogue interreligieux et aux appels que Dieu fait pour rapprocher les hommes.
Le cardinal Tauran affirmait : « Le religions font partie de la solution, pas du problème[2] ». Nombreux sont les exemples qui le montrent.
En 1986, le saint pape Jean-Paul II qui a foulé le sol de notre île, avait organisé à Assise (Italie) une rencontre interreligieuse avec une douzaine de représentants de plusieurs religions, sous le patronage de saint François, « le pauvre » qui voulut être le frère de tous.
La Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 a aussi choisi ce mot « frère » pour désigner les relations entre les hommes.
Les religions contribuent à la paix.
À Marseille, en 1990, lors de la guerre du Golfe, le maire de la cité phocéenne réunit les représentants des religions présentes dans cette cité méditerranéenne afin de calmer les esprits. Dans la peur des conflits, des Marseillais achetaient des armes et se préparaient à des affrontements. C’est alors que dans le salon de la mairie, face aux journalistes et aux preneurs d’images, le prêtre orthodoxe Cyrille Argenti (+1994), proposa aux responsables religieux de se prendre par la main. Cette image de solidarité et d’espérance arrêta d’un coup les velléités de violence.
À La Réunion, le Groupe de dialogue interreligieux GDIR, travaille activement pour la paix. Par ailleurs, en tant qu’aumônier de la prison de Domenjod, je me réjouis des prières communes organisées à peu près une fois par an avec nos frères musulmans. Chrétiens et musulmans prient chacun selon sa foi et au terme de la rencontre, nous partageons un jus de fruit, geste d’amitié. Le fait de se serrer la main et de prier ensemble témoigne de notre fraternité. Les autres détenus comprennent que ce ne sont pas les religions qui déclencheront la violence.
Retenons encore une fois le message du cardinal Tauran : « Les religions font partie de la solution, pas du problème ».
Fr Manuel Rivero – OP
[1]« Le Haut Comité pour la fraternité humaine » a invité tous les croyants à une prière contre le Covid-19 le 14 mai 2020. Le Haut-Comité pour la fraternité humaine est né de la signature le 4 février 2019 à Abou Dhabi du « Document sur la fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune » par le Pape François et le Grand Imam d’Al-Azhar, Ahmad Al-Tayyib lors du voyage du Saint-Père aux Émirats arabes unis.
[2]Cardinal Jean-Louis Tauran, Je crois en l’homme, « Les religions font partie de la solution, pas du problème ». Paris. Bayard. 2016.