« Pourquoi mon âme être accablée par la tristesse, pourquoi gémir au fond de moi ? » Frères et sœurs, nous allons dans quelques instants entendre l’évangile de la Passion et ma parole n’est là maintenant que pour vous aider à entrer dans cette Parole, comme on entre dans une maison, dans une demeure, avec infiniment de précaution, de délicatesse, parce que cette demeure, c’est le cœur de Dieu qui entre dans sa Passion.
Frères et sœurs, c’est peut-être quelque chose comme cela qu’il y a dans le cœur de Dieu aujourd’hui quand on célèbre et qu’on fait mémoire de sa Passion. Personnellement, je n’ai jamais pu m’empêcher de penser qu’au moment où Jésus était sur le dos de son âne, j’imagine que cette acclamation devait lui paraître à la fois rocambolesque, fantastique, et en même temps, génératrice en lui d’une terrible solitude. Qu’est-ce qu’ils attendent ? Qu’est-ce qu’ils veulent ? Est-ce qu’ils ont vraiment envie d’attendre quelque chose de moi ? S’ils attendent quelque chose de moi, est-ce que la mesure de leur attente c’est leur propre cœur, ou c’est mon cœur ? En fait, c’est une chose étrange que Dieu ait accepté cette scène un peu d’hystérie collective, et qu’Il ait deviné, qu’Il ait vu dans le cœur de cette foule, d’une certaine manière, toute l’ambiguïté du désir des foules, et qu’Il se soit dit : « Au fond, où est-ce que je vais ? Quel est ce chemin de solitude mystérieuse dans lequel je m’engage ? Apparemment, je suis au milieu d’une foule incroyable et cette foule est polarisée vers moi, elle m’acclame, elle jette ses manteaux à mes pieds, cette foule agite des palmes », comme nous ce matin. Apparemment c’est le bonheur, et pourtant, qu’est-ce que cela veut dire ? Je crois que cette question-là, Il est allé jusqu’au bout, et c’est pourquoi ce matin, nous lisons en même temps l’évangile des Rameaux, et l’évangile de la Passion. Car c’est cela le fil conducteur de la fin de la mort de Jésus. Ce n’est pas simplement les coups et blessures, c’est le fait d’entrer dans cette solitude de Dieu qui veut tout donner, qui n’a pas de mesure à son don, et qui ne rencontre rien, aucun geste de compréhension, d’attention ou de reconnaissance. C’est Dieu qui circule, porteur d’un trésor, à travers une foule et personne n’en veut.