Frères et sœurs, en ce dimanche des Rameaux, nous entendons le récit de la Passion selon saint Luc. Il y a deux manières d’écouter ce récit. Et ces deux manières correspondent à deux attitudes de l’homme moderne qui nous orientent vers deux voies totalement différentes.
Il y a une deuxième manière de lire la Passion, je crois qu’elle est plus vraie. Il y a une deuxième manière d’entendre le personnage de Jésus comme un homme qui a souffert pour nous, comme un homme qui a porté nos péchés, un homme qui a enduré pour nous toutes les souffrances, c’est indéniable. Mais le Christ n’a pas fait cela pour nous mettre dans une situation de dette. Il l’a fait gratuitement. Il faut une générosité folle pour venir dire aux hommes : « Je sais ce qu’est le fond de votre cœur. Je sais la violence et le péché qui habitent les hommes et cependant, je viens au milieu de vous pour vous dire que l’amour de Dieu est sans conditions, sans intérêts, sans préalables financiers, économiques ou d’échanges. Désormais, je ne veux plus être avec vous dans une relation de dettes, je veux vivre avec vous dans la relation de gratuité que je suis en train d’instaurer ».
Frères et sœurs, c’est pour cela qu’aujourd’hui, pendant la fête des Rameaux, nous lisons la Passion. En réalité, la véritable attitude que nous devons avoir devant la Passion, c’est celle que nous avons en agitant gratuitement des rameaux. En acclamant le Christ par un geste absolument gratuit et un peu fou, pour le remercier parce qu’il est là, pour ce qu’il a fait pour nous. Il y a une complémentarité fondamentale entre le geste d’entrer en acclamant le Christ pour la gratuité de son salut, et d’autre part le récit de sa Passion lu en ce dimanche des Rameaux, récit de la gratuité de l’offre du salut par Dieu lui-même. Ceci a une énorme importance dans notre propre vie. Vous le savez, si nous hésitons entre les deux lectures, la lecture économique et la lecture de la gratuité, c’est parce que nous nous sentons pris petit à petit dans un monde où c’est l’échange réglé, mesuré et calculé qui a fini par envahir toute notre vie et tous nos réflexes.