30ième Dimanche du Temps Ordinaire – Claude WON FAH HIN
30e dimanche ordinaire – Matthieu 23, 1-11
L’Église est à peine mise en place que Jésus se heurte à l’opposition des pouvoirs juifs, en particulier celle des pharisiens. Le texte d’aujourd’hui nous donne un portrait des scribes et des pharisiens, guides intellectuels du peuple de Dieu et grands adversaires de Jésus. Ce sont des dirigeants religieux qui, s’appuyant sur l’autorité de la Loi Mosaïque, transmettent la doctrine traditionnelle de Moïse, excellente doctrine dont font partie les dix commandements. Ces dix commandements servaient de guide au peuple de Dieu qui avait auparavant l’habitude d’adorer des idoles. Il fallait bien leur donner le moyen de suivre le Dieu unique qui vient de se révéler à ce peuple. C’est ainsi que Les scribes et les Pharisiens dirigeaient le peuple de Dieu. « Faites donc et observez tout ce qu’ils pourront vous dire », la doctrine de Moïse est toujours bonne. Aujourd’hui encore, les dix commandements sont toujours valables. Jésus ne conteste pas l’autorité de ces responsables religieux. Il dénonce l’incohérence de vie entre ce qu’ils enseignent et ce qu’ils font : « ils disent et ne font pas ». Ils imposent au peuple des règles lourdes (613 préceptes) dont eux-mêmes sont incapables de respecter, contrairement à Jésus qui accomplit toute la Loi, tout en douceur, étant attentif aux gens les plus simples et qui peinent dans leur vie ; ils semblent se montrer en exemple face au peuple, mais ce n’est qu’extérieurement qu’ils le sont, soignant leur apparence : apparence de piété, apparence de douceur, apparence de modestie ou d’humilité, apparence de sagesse qui affecte l’innocence, ce qu’on appelle encore un air de « sainte-nitouche », cachant une réalité moins visible qui s’appelle « hypocrisie ». « Ils agissent pour se faire remarquer des hommes, portent de larges phylactères et de longues franges, aiment à occuper les premiers divans dans les festins et les premiers bancs dans les temples, à recevoir les salutations et à se faire appeler Rabbi par les gens. Voilà le type de personnage que Jésus dénonce, ceux qui sont faux devant Dieu et devant les hommes, ceux qui n’ont pas de cohérence de vie, pas de cohérence entre ce qu’ils sont réellement et l’apparence qu’il donne aux autres. Dénoncé par Jésus, cela signifie que c’est grave. Il lit aussi dans le cœur de chacun d’entre nous et s’il est possible de tromper les gens par des apparences, face à Dieu cela n’est pas possible. Chacun doit s’observer soi-même et voir si dans sa vie de chrétien, il ne mène pas une double vie : une vie d’apparence de chrétien avec une belle apparence de piété et une autre, bien cachée intérieurement et qui n’aime pas les gens, avec des pensées de médisance, de dénigrement, de haine, tout le contraire du chrétien authentique qui ne fait que se tourner vers le Christ pour mieux s’unir à Lui en permanence. Jésus nous dit « ne vous réglez pas sur leurs actes », il parle des scribes et des pharisiens de l’époque, mais aussi de tous les pharisiens d’aujourd’hui qui n’appliquent pas les enseignements de Jésus, lui infligeant un « mauvais traitement » ainsi que Jésus lui-même l’a dit à Marguerite Marie Alacoque. Le plus petit manque de respect est un « mauvais traitement » fait à Jésus. Un jour que sainte Marguerite-Marie se préparait à la sainte communion, elle entendit une voix qui disait : « Regarde, ma vie, le mauvais traitement que je reçois dans cette âme qui vient de me recevoir. Elle a renouvelé toutes les douleurs de ma passion… Je veux que, lorsque je te ferai connaître le mauvais traitement que je reçois de cette âme, tu te prosternes à mes pieds après m’avoir reçu, pour faire amende honorable à mon Cœur, offrant à mon Père le sacrifice sanglant de la croix, à cet effet, et tout ton être pour rendre hommage au mien et réparer les indignités que je reçus dans ce cœur. » La sainte fut surprise d’entendre ces paroles sur une âme qui venait de se laver dans le sang précieux (c’est-à-dire qui vient de recevoir la sainte Hostie); Notre-Seigneur lui dit : « Ce n’est pas qu’elle soit dans le péché, mais la volonté de pécher n’est pas sortie de son cœur, ce que j’ai le plus en horreur que l’acte du péché, car c’est appliquer mon sang par mépris sur un cœur corrompu, d’autant que la volonté du mal est la racine de toute corruption ». On a beau ne pas être en état de péché et recevoir l’hostie, mais si la volonté de pécher n’est pas sortie de notre cœur, cela attriste le Christ qui considère cela comme un mauvais traitement que nous lui infligeons et qu’un autre devra racheter par une pénitence à la place de celui ou celle qui, recevant l’hostie, ne veut pas se convertir véritablement. A chacun de nous de bien se regarder intérieurement et de changer de direction afin de plaire au Christ. Le chrétien n’est pas là pour chercher les défauts des autres, ni pour faire semblant d’être un bon chrétien, mais pour faire la volonté de Dieu, c’est-à-dire aimer Dieu, et du même coup aimer les gens. C’est là l’unique attitude du chrétien. Toutes les autres attitudes ne plairont pas au Christ. « Ne vous réglez pas sur leurs actes ».
« Rabbi », « Maître », « Père », « Directeurs », ce sont là des mots qui désignent ceux qui, en général, ont de grosses responsabilités, ce sont ceux qui sont, pour ainsi dire, au sommet de la pyramide, et bon nombre de personnes aimeraient être à ce sommet. Ce sommet représente pour eux, un lieu à atteindre, comme si c’était le but de leur vie, comme si c’était, pour employer une expression courante, le top des tops. C’est en tout cas l’image que ce sommet leur donne en même temps que le mérite, la reconnaissance, le rayonnement, la respectabilité, l’importance de leur personne. Et on verra alors, plein de soi-disant chrétiens se poindre, visant ce qui, pour eux, semble être le sommet et devenir ainsi une sorte de « petit chef », un peu comme les scribes et les pharisiens. « Quiconque s’élèvera sera abaissé, et quiconque s’abaissera sera levé ». Devenus aveugles par ces petites ambitions, ils se détournent en réalité du vrai but à atteindre : le Christ vivant et qui donne la Vie, la vraie vie. C’est à croire que la parole de Dieu est vraiment difficile à comprendre : quand Jésus parle d’humilité pour avoir pris lui-même un corps d’homme, et devenir plus bas qu’un esclave, le pseudo-chrétien pense ambition, être premier de la classe et devenir petit chef ; quand Jésus parle prière et sagesse spirituelle, le pseudo-chrétien pense sagesse du monde où si l’on n’a pas richesse, pouvoir et honneur, on serait moins que rien ; quand Jésus parle d’aimer Dieu et son prochain, le pseudo chrétien s’acharne à vouloir aimer Dieu et l’argent ; quand Jésus parle de donner et se donner, le pseudo-chrétien pense surtout à se comporter comme un égoïste. Le langage du Christ est simple et clair : aimer Dieu et son prochain. L’Eglise dit que le chrétien a une fonction sacerdotale, prophétique et royale. Dans ces trois cas, nous pouvons être serviteur comme nous le demande Jésus. Dans la fonction sacerdotale, il s’agit d’être un authentique chrétien qui sache prier sincèrement, communier avec beaucoup de respect pour le Seigneur, avoir une vie sainte dans la vie quotidienne, de l’abnégation et une charité active. Dans la fonction prophétique, il s’agit d’annoncer la Bonne parole de Dieu et connaître qui est Jésus. Dans la fonction royale, il ne s’agit pas d’être roi comme on le comprend habituellement, mais roi à la manière de Jésus, c’est-à-dire en se mettant au service des autres. « Le plus grand parmi vous sera votre serviteur ». Rm 14,18 : « Celui qui sert le Christ dans la justice, la paix et la joie est agréable à Dieu et approuvé des hommes ». Il s’agit bien sûr de servir Jésus sans arrière-pensée, le servir le mieux possible, avec amour et cohérence de vie. Et pour avoir une cohérence de vie, il faut être en union permanente avec le Christ. D’où prière continuelle. Et ceci est valable pour tous, en tout cas pour tous ceux qui veulent se mettre à la suite du Christ. Et particulièrement pour les privilégiés de Dieu, c’est-à-dire pour tous ceux qui ont reçu le sacrement de l’Ordre. Les prêtres doivent être continuellement en prières, surtout entre deux célébrations liturgiques. Bien sûr, ils ont aussi besoin de repos, mais alors qu’ils se reposent dans le Seigneur afin de rester continuellement unis au Christ. Leur vie entière doit être prière. C’est pour eux une garantie de ne pas perdre le Chemin, c’est-à-dire le Christ lui-même. Et nous, nous devons prier chaque jour pour eux, afin qu’ils soient dignes de Dieu et qu’ils soient de bons guides pour nous tous. Ils doivent pouvoir dire comme Saint-Paul dans la deuxième lecture d’aujourd’hui : « Vous êtes témoins, et Dieu l’est aussi, combien notre attitude envers vous, les croyants, a été sainte, juste, sans reproche. 11 Comme un père pour ses enfants, nous vous avons, chacun de vous, 12 exhortés, encouragés, adjurés de mener une vie digne de Dieu qui vous appelle à son Royaume et à sa gloire. 13 Voilà pourquoi, de notre côté, nous ne cessons de rendre grâces à Dieu ». Il faut, eux comme nous tous, ne pas cesser de rendre grâces à Dieu, car à chaque instant nous avons tous des raisons de lui rendre grâces, car Dieu est en permanence avec nous, à la seule condition de ne pas le refuser. C’est pourquoi celui qui prie continuellement est assuré de sa présence, et sa présence nous apporte aussi la paix, paix de Dieu, sans trouble, sans inquiétude, sans angoisse de la vie, même si on est malade, même si on a des difficultés, la paix régnera en nous tant que Dieu demeure en nous. La confiance que nous mettons en Jésus et en Marie nous permettra de surmonter bien des obstacles. Si les difficultés de la vie sont toujours les mêmes qu’avant de connaître le Seigneur, les solutions seront différentes avec l’aide de Marie et de Jésus. Les problèmes résolus avec plus de patience, de douceur, avec calme, toujours dans la Paix du Seigneur. Et nous pourrons alors dire avec Malachie : « Mon alliance était avec Lui, c’était vie et paix, vérité, intégrité et droiture ». Devenons des chrétiens, des vrais, pour la gloire de Dieu avec l’aide de Marie, notre Sainte Mère.