« Jésus fut conduit au désert pour y être tenté ». Frères et sœurs, qu’entendons-nous par tentation ? Quelles sont les images qui se présentent spontanément à notre esprit ? Le gamin au bord d’une vitrine de pâtisserie, devant les éclairs au chocolat ? La jeune femme devant une vitrine de prêt-à-porter, convoitant une robe à la mode ? Ou bien encore le monsieur qui regarde le dernier modèle automobile d’une marque trop chère pour lui ? Pour nous, la tentation désigne toujours une certaine complicité avec le mal. Alors pour le Christ, la tentation au désert est-elle aussi une complicité avec le mal ? Pour ma part, je pense que non, je pense que le Christ n’a pas été tenté comme cela.
Alors en quoi consistent les tentations du Christ ? Comment a-t-Il été tenté ? Tout d’abord, il faut le dire, le démon qui est très intelligent, beaucoup plus intelligent que nous, a compris d’emblée qu’il n’y avait dans le Christ, qu’il ne pouvait y avoir aucune complicité avec le mal. Par conséquent, il ne l’a pas pris sous ce biais-là, il savait bien qu’il n’y avait pas de faiblesse à la cuirasse. Et c’est nous, parce que nous sommes des hommes, et parce que pour nous la vie chrétienne est un combat, nous qui pensons toujours que pour le Christ aussi il fallait qu’Il gagne des mérites et pour cela qu’Il se batte contre le diable. On serait presque tenté de dire : au fond dans le Christ, il devait y avoir comme en nous une sorte de complicité avec le mal, Il aurait peut-être pu pécher, au moins un petit peu, et ainsi il a eu du mérite, Il s’est donné du mal. Cela nous paraît tellement important. Et pourtant, il faut affirmer avec toute la Tradition de l’Église que le Christ ne pouvait pas pécher, qu’Il ne pouvait avoir aucune complicité avec le mal. Il est le Fils de Dieu et son être est tout entier tourné vers son Père.
C’est comme si le Christ répondait à Satan : « Tu voudrais, d’une manière ou d’une autre, t’interposer comme un écran pour qu’ils soient diminués et pour effacer la liberté de l’homme en face de son Dieu. Cela je ne le permettrai jamais. Ce que je veux, c’est que mon amour brûlant et libre aille rejoindre cette possibilité qui est au fond de leur cœur et qui est aussi un amour brûlant et libre que Moi, je veux leur donner. Mais je ne veux pas leur donner mon amour à n’importe quel prix, je veux leur donner mon amour au prix d’un total don de soi. Et tout ce que toi, le démon, tu feras pour réduire, caricaturer ou défigurer ce don de soi et cette capacité de se donner qui est dans l’homme, cela je ne l’accepterai jamais, je ne m’en ferai jamais le complice ».